"Jean-Louis Costes, sous-performer scato."
Télérama - 12 août 2006
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SOURCES (pour revenir sur le site utilisez le bouton RETOUR de votre navigateur)
"COSTES SE LA COUPE EN PUBLIC". Pour lire
l'article cliquer
ici
Article dans SPIN MAGAZINE (1989). Pour lire l'article cliquer
ici
Enquête "LES HOMOS VUS PAR LES ROCKERS" (ANDROZINE n°14, 1990). COSTES est
interrogé. Pour lire l'enquête cliquer
ici.
Interview
manuscrite de Jean-Louis COSTES à l'atelier Les Limbes en décembre 1994
pour les éditions TERRE NOIRE (Merci à SPEEDY DELLA
MORTE POUR L'INFO)
MAGAZINE
ACTUEL
"UNDERGROUND ATTITUDE" (Avril 94)
(téléchargement format .PDF
MAGAZINE
PENTHOUSE
n°135
"COSTES LE DEGENERE DU SEXE"
(Dominique
Rebellini-Penthouse-Avril 1996)
(téléchargement format .PDF)
ABUS DANGEREUX (Novembre 97)
(téléchargement format .PDF)
"COSTES TOUJOURS" (Mars 2001)
"L'OBSCENE PUBLIC" (Mars 2001)
ABUS DANGEREUX Face 71 (Avril-Mai 2001)
(téléchargement format .PDF)
ANARKO PUNK FANZINE
( Hors serie n° 1 "Special Sexe"- Avril 2003)
'COSTES: LE BORBORITE CONVULTIONNISTE'. Extrait du texte de Laurent James dans CANCER n°8
AMPHETAMINES
n°4 (téléchargement format .PDF)
TANT
PIS POUR VOUS, "COSTES DESTROY MAN" (Septembre 2004)
INDISPONIBLE
LIBÉRATION
(juin 2005)
ECHOS
DES SAVANES décembre 2005 (téléchargement format RAR)
Article 'LA RAGE EN DEDANS' dans l'édition
du 23.02.06
BORDEAUX 7
mars 2006 (téléchargement format PDF)
Jean-Louis Costes, Entretien
avec Marc Alpozzo, "Ca fait jouir de pouvoir lire dans
les tripes de la tête d'un écrivain", La Presse
Littéraire, n°4, Mars 2006 (Merci à SPEEDY DELLA MORTE)
Article PREMIER ROMAN ULTRA COSTIQUE,
vendredi 10 mars 2006, p. 22
Article ON Y ETAIT
lundi 13 mars 2006, p. 22
INTERVIEW
pour le numéro du 16 mars 2006 de VENTILO magazine gratuit marseillais
Article LA CHAIR ET LA
CROIX dimanche 9 avril 2006, p. 11
GRAFF IT (n°18 - Avril
2006) (téléchargement au
format PDF)
STANDARD
MAGAZINE (n°11 - Avril 2006) (téléchargement au
format RAR)
"MERDE A CELUI QUI LE LIRA", portrait de COSTES par Emmanuel PONCET,
LIBERATION du 27 avril 2006
"PAPA CACA", portrait de Jean Louis COSTES, Petit Bulletin édition Lyon du 24
mai 2006
Petite
présentation de COSTES et du roman GRAND PERE (édition du 6 juin 2006)
"JEAN LOUIS COSTES : PARIA LA PROVOC" Portrait dans le NOUVEL OBSERVATEUR
du vendredi 9 juin 2006
FHM
- Aout 2006 (telechargement au format .GIF)
Interview pour la revue PRIM
ESCAPE N°3
Texte COSTES & CUL (Irreverent n°1, octobre
2006) INDISPONIBLE
Il s'appelle Jean-Louis Costes. Il est tout l'inverse des lieux parisiens du même nom, authentique, rageur, trash. Il écume depuis des décennies la scène underground française avec ses spectacles, il chante, hurle, insulte, se torture, saigne, défèque au besoin, c'est une voix unique, essentielle, flippante devenue un personnage culte. L'année dernière, il est entré dans la littérature par une porte dérobée, son roman "Grand père" a été publié aux éditions Fayard. C'est une épopée sublime d'un homme et de sa violence, passant des plaines emplies de cosaques et de loups au début du siècle, à la guerre absurde et ses mercenaires en Afrique du Nord, à la France frileuse et ses femmes, à la jungle des échappés de Cayenne pour finir dans un HLM devant un écran de télé. Costes a accepté d'écrire une nouvelle pour Irreverent inspirée par l'empire, elle est baptisée "Costes & Cul".
Présentation
de COSTES dans la revue canadienne MONTREAL MIRROR (vol 22, n°42, du 12.04.07 au
18.04.07)
"MAUDIT
ARTISTE", interview de Jean Louis COSTES, Petit Bulletin édition Grenoble du 24
mai 2006 (Pour lire l'article au format PDF, cliquez
ici)
"Scatological noise artist Jean-Louis Costes and pals hit the Smiling Moose.",
pittsburgh city paper, 8 mars 2007
BONUS !
Lettre
d'une non-admiratrice à NOVA MAGAZINE
Interview-comparaison entre COSTES et Marcel Proust
par ???? en ????
Annonce du
show "The Holy Virgin Cult" au Club Mummy dans ???????
LE SPECTACLE DU CÉLÈBRE PERFORMER FRANÇAIS
JEAN-LOUIS COSTES À QUÉBEC ANNULÉ
Qui
n’as pas entendu parler (en bien ou en mal, souvent en mal) de Jean –Louis
Costes ? Pour ceux qui habiteraient sur Mars, je fais un récapitulatif :
cet homme est l’auteur de nombreux spectacles pornos-trashs et de disques,
abordant des thèmes tels que la sexualité, le racisme, la police, la pédophilie
etc… avec un point de vue très subversif et dérangeant qui lui a valu de
nombreux ennuis avec la justice et les biens-pensants. Il est donc aujourd’hui
dans une situation très délicate ce qui explique la teneur très amère de ses
propos.
Je
passe 90% de mon temps à me branler et à zoner chez moi sans sortir. Les
autres % je me filme en train de me branler ou bien je gueule dans un micro des
cris de pédé en rut. J’appelle ça de l ‘art.
2)
C’est pas trop dur la vie
en seine st denis depuis NTMFN ? Tu as eut des nouvelles des NTM depuis ?
Je
reçois pas mal de menaces de mort par mail et téléphone. Des fois j’ai
vraiment peur. Je suis obligé de toujours faire attention. J’ai peur de
sortir. J’ouvre jamais les volets et ma porte est blindée. Mais je résiste
encore !
3)
Tu en es où de tes procès ?
L’union
des étudiants juifs de France et ses alliées de la LICRA, la LDH et le MRAP me
font encore un procès en 2002. Ce sera la 5ème fois que je serai
jugé depuis 1997 à cause de ces assos que je hais. Je n’ai pas eut une journée
tranquille depuis. Ils me pourrissent la vie. Ils vont me détruire matériellement
mais je vais les anéantir intellectuellement.
4)
Vis-tu de ce que tu fais ?
Je
bouffe du pain avec des oeufs crus. Mes ventes de disques payent le pain et les
œufs.
5)
Avec toutes ces emmerdes,
qu’est-ce qui te motives pour continuer ?
La
haine et la frustration
6)
Tu as l’air de haïr tout
et tout le monde, est-ce qu’il y a des choses que tu aimes ?
Je
ne m’aime même pas moi-même. J’apprécie peut-être un peu le chat pur sa
grâce.
7)
Il paraît que certaines
villes ont refusé ta présence, lesquelles ?
Comment s’y prennent-ils pour t’empêcher de te produire et quels motifs
invoquent-ils ?
La
LICRA a fait campagne contre moi en suisse en me faisant passer pour un nazi :
des shows ont été annulé, la police est venue m’arrêter, des gens ont cassé
tout le matériel sur scène et nous avons été blessés. En France, quand la
salle de spectacle dépend de subventions municipales ou de l’état, il est très
possible qu’un de mes spectacles soit annulé. Mais dans les milieux vraiment
indépendants, il n’y a aucun problème. Ils ne baissent pas leur froc devant
le premier connard qui leur fout la pression au téléphone.
8)
Toi qui est contre la
censure, penses-tu qu’il faille néanmoins un âge minimum pour voir tes shows ?
Non.
Il y a des enfants de un an qui voient mes shows et qui dansent devant. Ils
adorent surtout les passages où je bouffe ma merde ! Ils se reconnaissent !
9)
Si tu avais quelque chose à
censurer dans les médias d’aujourd’hui, que censurais-tu ?
Je
ne censurerai rien. Je veux juste que les gens lâchent cette merde et que toute
cette maffia du show-bizz et de l’art subventionné crève toute seule.
10)
Quels sont les gens, les œuvres qui t’ont influencé ?
Je
n’écoute rien, je ne regarde rien, je ne fréquente personne. Je
m’auto-influence comme le crabe qui s’auto-encule.
11)
Tu cites « l’unique et sa propriété » de Stirner comme étant
une une de tes références, te considère-tu comme anarchiste ?
Je
hais les anarchistes organisés genre fédération anarchiste. Je suis
probablement anarchiste au sens où un rat d’égout est anarchiste. Sirner ?
Ouais… J’ai essayé de le relire et maintenant il me fait chier aussi !
12)
Tu es très apprécié dans le milieu punk/ hardcore, pourquoi à ton avis ?
Quelles sont tes relations avec ce milieu, t’en sens-tu proche ?
J’aime
tout ce qui est qualifié de « hard-core ». J’aime la violence. Ça
me calme, ça me relaxe. Les punks hardcore
ça doit être pareil pour eux. En moi ils apprécient l’extrême
violence et le dépeçage physique et mental.
13)
C’est vrai que tu vas jouer dans film d’Ovidie ? D’où la
connais-tu , que pense-tu de ce qu’elle fait ?
J’ai
joué dans un film d’Ovidie. J’aime beaucoup la personne réelle cachée
derrière Ovidie, mais le personnage médiatique me déçoit et le milieu porno
où elle évolue me dégoûte.
14)
Parle-moi de tes deux derniers disques…
Deux
derniers ? Euh… J’en fait tellement, je sais même plus quels sont les
deux derniers. Je sors un Cd par jour. Sur le Cd de hier j’ai chié une heure.
Sur celui d’aujourd’hui j’étais constipé.
15)
Quels sont tes projets ?
Je
réalise actuellement un gros long métrage, un machin psychologique et
dramatique en collaboration avec Darline Monfort. Nous mettons le paquet, et
comme on est totalement mythos, on va sortir le film en salle en 35mm et devenir
des stars et foutre dehors tout ce show-bizz de merde et prendre leur place et
eux les foutre dans notre HLM pourri. Dégagez les tarés de la télé !
Y’a Costes et la Monfort qui se pointent ! ça va cartonner !
16)
Quelque chose à rajouter ?
Je
vais crever.
Prepare for one
of the true pioneers of boredcore/noise hailing out of France.Starting out in
the 80's,Costes has made quite a collection of material.Ranging from
books,cds,tapes,videos,and more.Also performing with Lisa Suckdog,original queen
of sleaze boredcore noise and being called the french equivilant of GG
Allin.Costes' performances have been said to be art to social deviance to
instigating social/political change.But in reality they are a porno-social opera
of fetishistic characters and sexual situations with metaphors and lots of
meanings.Let's delve into the maddening mind of this veteran noise pioneer and
see what the coprophiliac Costes has to say....
Q:
Please let us know your name?
A:
My name is Costes, my parents were living naked, eating only potatoes and french
stinky cheese on the mountains of the wild mountains. that's why they were
called Costes, meaning the monkey at the top of the hill.
Q:
What is it like in France?
A:
I am living in an arab neighborhood. The young guys are dressed like Ben Laden.
It is a fashion here. They go to the supermarket dressed as going to the battle
field, but still wearing Nikes, and they buy Mecca Cola rather than Coca-Cola.
Each time a tower or a railway station explodes, they dance happy in the
streets. This is France in 2004. The only left old style catholic french are the
naked nuts at the top of the forgotten moutain.
Q:
Give a brief history of where you got the idea come to create your solo project
Costes?
A:
I wad playing in a hard-rock band in 1975. We just playing only covers of Deep
Purple. In fact only Smoke on the water, because I could play the bass on one
string. I was supposed to be the singer, but the guys thought I was plaing and
singing too much out of tune. So they fired me. And now this is 30 years I play
alone at home. I wanted to be a pop-star and I ended being the yelling bum.
Q:
What are your influences?
A:
I never listen music, neither watch film or talk to people. My only left
influence is me. Masturbation is the main influence. There is the violent song
before mastrubation and the depressed song after masturbation.
Q:
How many people are in Costes currently?
A:
Me, me and me. But for shows people join me. Drunk bums show their dick and
sluts show their butt.
Q:
What type of music do you consider Costes?
A:
My music is a mix of noise and song. I sing on noise and I yell on melodies.
This is because I love at the same time easy listening music and hard-core
noise. And I try to put as much as possible pathos in the most obscene violent
lyrics I can imagine. The most violent the song is, the most I feel relaxed
after listening to it.
Q:
What is your political and religious beliefs?
A:
I believe I will die very soon. This is the engine of my creativity. To create
as much as possible before death. Death is my only faith.
Q:
What do you think of Christians?
A:
I am catholic. I love rituals more than the message. Any faith is ok for me as
long as I feel moved by an intense ritual.
Q:
What is behind the songs of Costes?
:
Frustration bringing hate and despair... And sometimes a joke.
Q:
What is the imagery you are trying to convey thru the media you have chosen?
A:
I don't have any aim in my music. I do it without understanding what it means.
This is a messy flow of intense images, wars and warriors and princess and
goddess. My brain live in the dark age in the middle of nowhere.
Q:
How many official releases does Costes have?
A:
There are hundreds of CDs, tapes, live shows, films on american, japanese and
european labels, but none are official.
Q:
Has Costes played live and if so with who and where?
A:
I have played more than 500 live shows in ten years. Four tours in USA, the last
one being in 2003, and many tours in europa, and one tour in Japan.
Q:
What is a typical show like?
A: It is what I call a porno-social opera. It is based on a story like a broadway musical, except it is gross obscene violent and mostly nude. In this way it is like the classic operas who were
always
very violent stories of crime and incest breaking all taboos. The music is
mainly on a backing tape. the voices are live. There are two, three or four
singers-actors. The story goes through songs and wild action. It lasts about an
hour. for evey tour i create a brand new opera, with new story, new music, new
actors.
Q:
What is your involvement with Lisa Suckdog,please give a brief history?
A:
I have been married to Lisa Suckdog in the 90's. The style I perform on stage
was invented with her. At first we were doing those operas together. Then she
decided to become a writer and I did the next operas with different people. But
she stays for me the unchallenged icon of this style.
Q:
What do we expect soon from Costes?
A:
I just released the DVD of the USA tour Holy Virgin Cult, available in European
PAL and USA/ Japan NTSC video standards (sold from my website).
Two new cds in english are going to be released by american labels. and I will
tour USA again in 2005.
Interview
with:Costes
Interview
by:The_Rev Ogre Snot Gurgle aka The_Rev Samekh Anubis Amoun-Ra
2004
Costes
est un artiste qui n’aime pas les détours, encore moins les concessions. Son
oeuvre foisonnante, à travers ses disques, spectacles ou vidéos, et même
dernièrement un livre intitulé Viva la merda !, vise à mettre en évidence
les faux tabous et les malaises de notre société pour mieux les briser en
place publique. Elle laisse rarement indifférent et suscite souvent la
controverse, comme en témoignent les procès à répétition et les tribunes
assassines dont il a fait l’objet. Performeur jusqu’au-boutiste, après plus
de vingt albums et des centaines de performances trash, Jean-Louis Costes
poursuit aujourd’hui son œuvre de déconditionnement avec son nouvel opéra
porno-social, Le culte de la vierge.
On
va peut-être commencer par parler de ta nouvelle performance...
Le thème du show Le culte de la vierge est religieux. Giulio Nesi et moi jouons
des pasteurs protestants qui partent en vrille sous l’influence du vaudou haïtien,
que je connais de Saint-Denis. Ils commencent en costard et puis pètent un
plomb, avec des moments de transe très intenses.
Comment
réagissent les adeptes de ce nouveau "culte" ?
Il y a parfois des mouvements de panique impossibles à maîtriser. Des hordes
de gros balèzes se précipitent vers la sortie de secours en se marchant les
uns sur les autres pendant que nous leur balançons du chocolat liquide. Le
problème qu’on a parfois, c’est de garder un espace scénique suffisant
parce qu’il y a une bande de barjots qui prend d’assaut la scène et qui
n’a qu’une envie, c’est d’exploser notre poupée gonflable. Il y a trop
d’interactivité avec le public, c’est trop moderne ! C’est quand même
un show "religieux", relativement réactionnaire. Et puis ça coûte
cher, une poupée gonflable ! A la fin du show, on devrait jouer la scène
de la partouze avec une poupée toute molle, on aurait l’impression de baiser
une grand-mère toute flétrie.
C’est
aussi une véritable cérémonie de transe vaudou ?
Je n’arrive pas au niveau des Haïtiens qui peuvent rester perchés un mois,
possédés par des démons. On s’inspire du vaudou, on essaye de se mettre dans des
états seconds, mais on est vraiment loin d’eux parce qu’on n’a pas une culture,
un background. C’est un état modifié de conscience qu’on cherche à retrouver à
chaque fois sur scène par la peur, le stress. La scène, ça me permet de faire
des choses que physiquement, je ne pourrais jamais faire sinon. Je ne sais pas
ce qu’il faudrait faire comme déjante pour s’exprimer autant physiquement,
peut-être une guerre ou du sport de haut niveau. Des fois, je me fais chier dans
le show, d’autres fois, c’est bien, on sort vraiment de nos gonds et on se
réveille le lendemain matin sans être tout à fait redescendu. Et pourtant, on ne
se drogue pas, c’est pour te dire.
Pourquoi
la religion t’obsède-t-elle autant ?
Ah bon ? Ça ne m’obsède pas plus que ça. Tiens, je suis shintoïste
depuis quinze jours. J’ai carrément un autel et je fais des offrandes.
C’est hyper fort comme religion. Les dieux ne te demandent rien si ce n’est
de faire des offrandes en échange de t’apporter des plans. Il n’y a aucun
message moral, il n’y a aucune coordination philosophique, c’est n’importe
quoi. Il n’y a pas deux shintos qui adorent la même chose, il n’y a pas de
centralisation. C’est ce qu’ils faisaient dans leurs villages, c’est pour
ça que les croyances sont éparpillées, chaque village avait les siennes.
C’est un truc païen des Japonais, ce n’est pas bouddhiste. Au niveau des
croyances, il n’y a pas de textes fondateurs. Tu fais toc-toc, tu tapes deux
fois des mains. Ensuite, tu ramasses un papier pour voir ce qui va t’arriver,
si ça ne te plaît pas, tu remets 100 yens et tu en ramasses un autre. Tu vois,
ça a un côté tac-o-tac. Ce qui compte, c’est que tu paies. On ne me demande
pas si je crois en quelque chose. Je sais même pas pourquoi je fais ça, les
autres, je ne crois pas qu’ils en sachent plus. C’est un peu Disneyland.
Tu
penses jouer au Japon... pour te rapprocher des sources du shinto ? Comment
trouves-tu les plans pour jouer partout comme tu le fais, tu as un véritable réseau
maintenant ?
Pour le Japon, ce n’est pas sûr. J’ai déjà joué là-bas une fois, mais là,
je n’ai aucun plan, donc je ne peux pas dire pour l’instant. On joue souvent
sur ma réputation, ça tourne surtout autour de ça. Mon réseau s’est
renforcé avec l’Internet. En Allemagne, j’ai toutes les dates comme ça. En
Autriche, c’est par Noël Akchoté, il me connaît par Rectangle, qui a sorti
Nik ta race, et il habite en Autriche. Ça se répand de proche en proche. Pour
les Etats-Unis à l’automne, on a déjà trois dates sans chercher. Je pense
qu’on va en avoir dix ou quinze, peut-être plus, ça va être très facile.
Il faut aussi préciser que j’avais déjà joué là-bas.
Existe-t-il
un réseau Costes ?
Il y a un réseau Costes, comme tout le monde est en réseau, on a tous tendance
à faire ça. Mais dans mon cas, c’est pas un système politique, ni un réseau
de business, mon réseau se limite à ma passion, la musique. Ca marche que sur
la passion et c’est vachement puissant. Maintenant, avec le mail, c’est
encore plus puissant. Et après dix ans là-dedans, tu as cinq mille adresses,
dans le monde entier, de gens qui ne peuvent rien faire dans le business de la
musique, parce que le show business est une entreprise de destruction culturelle
pas possible, une dictature qui détruit des millions d’artistes pour faire du
business avec deux-trois connards. Tous ces gens qui sont frustrés de ça, ils
ont réussi à s’organiser en utilisant la photocopie, Internet, le courrier,
les tracts, les petits concerts dans les squatts et maintenant, ça fait un méga-réseau,
c’est fou. Les salles dans lesquelles je joue, c’est peut-être pas des énormes
salles, mais quelquefois, c’est la plus grosse salle de la ville. Quelquefois,
un squatt peut faire plus d’entrées que toutes les autres boîtes réunies
dans la ville, c’est pour ça qu’ils luttent contre, parce qu’ils coulent
le business. Les squatts sont très puissants parfois, quand ils sont bien
organisés. Et c’est un réseau très disséminé.
Arrives-tu
à atteindre d’autres milieux que celui de la musique ?
C’est bizarre. Normalement, je devrais aussi toucher le milieu du théâtre,
mais ça n’arrive jamais. Ils sont pourris par les subventions depuis au moins
trois cents ans, depuis Molière. Ca fait longtemps que c’est un truc de
pourris, le théâtre. Le "groupe de la petite fleur bleue" ou bien
"de l’aqueduc vert", tous ces noms de oufs, genre
"transcendance verticale", c’est uniquement pour les subventions.
Ils ne font pas de spectacles, ils attendent qu’on leur file la monnaie. Ils
sont tous prêts à faire des trucs pour les enfants, c’est dire. C’est
absolument immonde, ils les prennent pour des cons, moi j’interdirais aux
gosses d’aller voir des trucs comme ça.
Il
n’y a pas d’endroits où la subvention est justifiée ?
Aucun. Je pense qu’il faut supprimer complètement le Ministère de la
culture. Quand j’ai cru que la droite allait détruire le Ministère de la
culture, j’ai adoré, putain, je votais direct, mais ils ne l’ont pas fait.
En fait, ils n’ont pas osé y toucher. Ah non, il fallait péter tout le truc.
Bon, admettons qu’ils entretiennent trois ou quatre monuments, mais ils détruisent
tout avec leurs subventions. Dès que quelqu’un marche à la subvention,
c’est simple, j’ai plus le droit de passer. La subvention, c’est tout de
suite le calcul sur le contenu du spectacle et après, on nous vire direct. Et
puis c’est d’abord les malins qui en profitent.
En
quoi tes films se différencient-ils de tes shows, en particulier au niveau de
l’improvisation ?
Ça n’a rien à voir, c’est des films à la con. J’écris un scénario et
voilà. Il y en a où je suis bourré, je fous la caméra et je dis n’importe
quoi. Là, c’est improvisé. Le côté bizarre, c’est que la moitié des
acteurs, je les trouve en cours de route, personne ne croyant à rien quand il
n’y a pas de fric. A partir de ce principe-là, le film devient vraiment
dingue. En ce qui concerne les shows, c’est très peu improvisé, même les
sorties. Au début, on a une phase où l’on teste nos sorties par rapport au
public, parce qu’on ne peut pas trop prévoir les réactions ou les moments
qui vont être les plus intenses. Après, on peut exploiter les réactions.
Donc, ça fait un peu d’impro au début et après, je change le texte comme ça,
pour me marrer. J’improvise le texte, sauf les chansons. Sinon, je cherche même
pas à faire un long-métrage parce qu’il faut aller chercher l’argent au
CNC (Centre National de la Cinématographie). Je ne l’aurai jamais, ils ne
donnent qu’à leurs potes. Par exemple, Alice aux pays des portables est un
film que j’ai fait entièrement, ça m’a pris huit mois de travail, c’est
même pas trash. On avait trouvé un distributeur, on avait tout en main, on a
eu aucune subvention pour pouvoir le passer en pellicule, ils nous l’ont refusée,
ils n’ont même pas voulu le visionner.
Tu
ne peux pas passer en cinéma ?
C’est complètement interdit. Les salles où on peut passer sont classées
"Art et Essai" et fonctionnent sur les subventions. Pour les toucher,
ils doivent diffuser des quotas de films d’auteur français. Qu’est-ce
qu’un film d’auteur français ? C’est un film agréé par le CNC.
Pour être agréé, il faut que tu aies une société de production dont le
capital a été vérifié par un expert à 50 000 balles, on commence par ça.
Une fois que tu as ta société, on te demande la fiche de paie de tous tes
techniciens et de tous tes acteurs... C’est facile, hein ! Et si tu dis :
"J’ai fait ça avec mes potes", ils te répondent : "Vous
n’allez pas me dire que vous avez fait ça avec votre sœur et votre mère ! ?"
"Si justement, ma mère fait ma mère et ma sœur, ma sœur." Et là,
tu es niqué. Il y a autre chose, la préférence nationale, et ça, c’est
carrément facho. Alice se passe en banlieue, il y avait donc beaucoup
d’acteurs et d’actrices immigrés. Dans un film français, il faut mettre
des acteurs français parce que chaque fois que tu mets un acteur qui n’est
pas français, tu perds des points. Si tu as 65 sur 100, ton film est agréé
mais si tu n’as que 60, tu n’es pas agréé. Et moi, il y avait des Haïtiens
de partout ! Il faut aussi que les mecs parlent français ; si ce
n’est pas le cas, ils t’enlèvent aussi des points. Bon, tu n’as pas
d’agrément, c’est pas grave, Jean-Louis, tu sors ton film sans agrément,
juste avec un visa de sortie. C’est possible, mais tu n’auras pas de
distributeur parce qu’ils touchent aussi des thunes pour distribuer un film
d’auteur français agréé. Tu vois le coup, si tu n’es pas agréé, ils ne
touchent rien, or les petits distributeurs de films d’auteur ne marchent qu’à
la subvention. Continuons, les cinémas "Art et Essai" ont besoin de
faire un quota de films agréés, ils ne vont donc pas passer ton film parce
qu’ils ne vont pas avoir leurs subventions. Dans les festivals, si tu n’as
pas de société de production, tu ne passes pas non plus. Et mes films ne
peuvent pas êtres achetés par la télé, la fille du CNC me l’a dit comme ça :
"Ne comptez pas non plus sur la télévision si vous n’avez pas l’agrément,
ahahah !", genre "mon pauvre gars", j’ai failli casser son
bureau. Les télés achètent pas cher du film français de merde sans volonté
de les diffuser mais pour faire du quota. Suis-je clair ? Le circuit est
verrouillé.
As-tu
un espoir dans les circuits alternatifs ?
Oui, le cinéma va faire comme la musique, ça commence parce qu’il y a plein
de gens qui sont en train de monter des films sur leur ordinateur. Je suis un
des premiers qui est arrivé avec un truc abouti. Mais c’est quand même huit
mois de travail, tout le monde ne peut pas passer autant de temps. Mais il y a
plein de bons films qui vont arriver et ça va foutre la merde, parce que les
autres sont incapables de les absorber car ils veulent garder leur business. Et
donc, les gens vont faire des films à que dalle.
Et
as-tu réussi à avoir un paiement sécurisé pour ton site ?
Toujours pas. Les banques refusent de me l’accorder à cause de tous ces procès.
Ils me disent qu’ils refusent pour des raisons éthiques. Parce que les
banques sont éthiques maintenant ? Les banques sont pour le business et
ils me considèrent comme un petit business. Tout salop que je suis, je
deviendrais éthique si elles pensaient que j’étais un gros business. Il y a
quatre ou cinq banques qui tiennent la France. C’est flippant parce qu’à
long terme, tu peux penser que le paiement sur Internet sera le seul moyen de
survivre pour une petite structure. Si les banques estiment que ce que tu fais
n’est pas "éthique", elles ne t’accorderont pas ce droit.
Où
en es-tu avec tes procès ?
Ce n’est pas compliqué, c’est tout le temps depuis sept ans. Depuis le début,
c’est toujours le même procès. Certaines associations me reprochent toujours
la même chose, mais elles trouvent de nouvelles raisons. A part pendant les
vacances, là, ça s’arrête. Ce sont des gens qui luttent contre le mal, mais
pas en période de vacances. A la rentrée, c’est toujours le même mec, en
moto, hilare, une sorte de coursier d’huissier : "Ouais, M’sieur
Costes, j’viens distribuer les convocations, on se connaît, j’crois !"
Mes voisins, ils doivent croire qu’il y a un putain de criminel dans
l’immeuble. En sept ans, je ne sais pas combien de dizaines de convocations
j’ai reçu. Sinon, c’est ma mère qui paie mes procès : elle a vendu
sa maison, ça fait de la casse, parce que moi, j’ai rien payé. De toute façon,
c’est ma mère qui paie tout, même pour la musique. Eux, ça ne leur coûte
rien, les procès, ils sont subventionnés pour les faire. Ils attendent
jusqu’à ce que je sois clochardisé total, que tous mes biens soient saisis
et que je me fasse virer de mon appart’. Quand tu as cinq associations en
face, même si tu dois leur filer ne serait-ce que dix mille balles à chacune,
tu as en plus les frais de justice, ça monte, ça monte et ça fait vite cent
mille balles. Et tu dois payer tout de suite, pas de crédit.
C’est
seul contre tous ?
Je vais les niquer. Le président d’une de ces associations vient de dire à
un mag que le procès Costes était une erreur. Il dit "c’était",
mais c’en est encore une, il dit ça pour dire que c’est fini, mais il ment.
Et son autre mensonge, c’est de dire : "Son site était dégueulasse",
mais il est toujours pareil, mon site, rien n’a changé. Il fait genre :
"On l’a niqué, on lui a mis une bombe, mais c’était une erreur."
En plus, il prétend que ça aurait médiatisé un marginal dégueulasse. Parce
que ce serait grâce à eux que j’ai une réputation ! ! ! Dans
une autre interview, pour la télé, il a tenu un discours du style :
"Tout le monde sait que Costes n’est pas un raciste. Mais seulement il dépasse
les limites de la liberté d’expression. L’art aussi a des limites. On ne
peut pas dire n’importe quoi, il influence les esprits faibles avec son délire
parce qu’il ne donne pas de clés." Tu vois ce que je veux dire ? Je
ne donne pas de clés à des fins pédagogiques... Et au prochain procès, ils
vont quand même m’attaquer sur les mêmes choses.
Quels
intérêts ont-ils ?
Je ne sais pas, je ne les comprends pas, c’est une minorité de malades
mentaux. Et je ne peux même pas imaginer avoir des dommages et intérêts,
parce qu’il faudrait que je chiffre mon préjudice : "OK, on vous a
insulté, mais vous êtes déjà tellement une merde sociale...", donc les
insultes ne me font pas de tort puisque je suis une merde.
Tu
avais un forum sur ton site, non ?
J’ai eu un forum. Comme par hasard, j’ai reçu 300 000 messages extrémistes
par jour. Attends, c’est le même mec qui a fait ça. Vu que je ne veux pas de
censure, je l’ai fermé. Les messages extrêmes sont intéressants mais dans
une proportion qui corresponde à leur place dans l’idéologie globale. Parce
que l’idéologie extrême, il faut la connaître et aussi toutes les idéologies
de la nouvelle droite parce qu’elles évoluent hyper vite, plus vite que
celles de la gauche. Elles courent vite, toutes ces idées-là, tu comprends
plus rien. Ils mixent tout, tu crois te retrouver sur un site bolcho et en fait,
c’est eux. Il y a aussi tous ces écrivains qui parlent de la guerre en
restant tranquillement chez eux. J’ai des mails d’un pote de mon frère qui
est à Hébron. Il est dans un mouvement pacifiste américain qui bloque les
rues, ça fait chier tout le monde. Mais bon, ils les tuent, les Israéliens
viennent d’écraser une de ses copines au bulldozer, exprès. Et ils n’ont
rien le droit de dire aux journalistes, le deal étant que s’ils parlent à la
presse, ils se font expulser du pays. Donc ils envoient des mails personnels. Et
c’est pas du tout comme les journalistes racontent, la guerre, c’est
pipi-caca. Parce que les soldats israéliens investissent les maisons
palestiniennes, ils s’en servent de bunker et font pipi-caca partout, c’est
surtout ça, la principale activité. Ils ne vont pas aller aux chiottes entre
deux tirs alors ils se chient dessus. Je te laisse imaginer l’état de la
maison à la fin... Il y a un aspect de la guerre très concret, très crade,
qui n’a rien à voir avec le nationalisme. Tout ça fait aussi partie des faux
tabous, comme le cul, la merde, les odeurs corporelles, dont on ne parle pas.
En
parlant de pipi-caca, tu viens de sortir ton premier roman Viva la merda !
Au départ, je voulais simplement écrire un scénario de film, c’est pour ça
que le bouquin est très concis au début. Et puis progressivement, ce scénario
m’est monté à la tête. Et j’en ai écrit toujours plus et à la fin,
merde, c’était plus un scénario mais un roman. Je ne l’ai pas fait exprès.
A priori, ça ne m’intéresse pas d’écrire des romans.
Tu
aurais pu faire quoi si tu n’avais pas été "Costes" ? Je
crois que tu as fait archi. Qu’est-ce qui fait que tu as osé aller sur scène,
osé faire ce que tu fais ?
Je ne sais pas. Quand tu parles à personne à l’école, que tu es complètement
ringard, tu as même pas le bon look, tu n’as rien, tu n’es même pas un
cancre, tu n’es même pas un contestataire, tu n’existes pas, donc tu fais
de la musique. Je m’emmerdais, je faisais ça pour m’occuper ou pour me
valoriser connement auprès des filles en me disant que peut-être, si je
faisais de l’art, ça irait mieux, ça n’allait pas plus loin que ça, à la
base. Mais je pourrais faire complètement autre chose, je n’ai pas de
vocation artistique, je n’en ai jamais eu. J’ai aussi fait des études
d’archi, mais le problème, c’est que je suis complètement asocial dans un
bureau d’architecture. J’ai travaillé là-dedans. Au début, je suis hyper
efficace, mais au bout de trois mois, j’éclate l’ordinateur à coups de
pied. Je n’ai pas la capacité psychologique pour réussir dans cette société
de malades.
Artiste censuré, musicien auto-produit, réalisateur de films undergrounds et performer provocateur, Costes dérange, persiste et signe en suivant depuis plus de dix ans un chemin de croix jonché de disques, de films et de performances données aux quatre coins de la planète. Ses détracteurs peuvent hurler, il n'en reste pas moins une des grandes figures de l'underground hexagonal et a su conquérir un large public hors de nos frontières. Interview...
Comment est-ce que Costes voit Costes ?
Je me regarde dans la glace...
dans la pénombre pour pas trop voir les défauts... je me hais... je ne peux
pas supporter de me regarder et pourtant je passe mon temps devant le miroir a
scruter mes faiblesses. Je hais ma musique et pourtant je la fais toujours. Je
suis un raté qui rêve d'être un héros.
Ton rythme de production est particulièrement effréné. Qu’est-ce
qui motive cette surproduction ?
L'art est autant un devoir qu'un
plaisir. Il FAUT que je fasse quelque chose de spécial de ma vie, de chaque
journée. J'ai un devoir a accomplir : atteindre le sommet de moi-même. Chaque
œuvre pour moi est la dernière, l'ultime effort vers le but suprême : le
devoir enfin accompli et le repos bien mérité. Mais hélas c'est toujours raté
alors je recommence désespérément.
Comment fais-tu pour rester motivé après tant d’années
d’autoproduction ? Est-ce qu’il n’y a pas un moment où cette précarité
peut décourager ?
Je pense chaque jour a tout arrêter
comme je pense chaque jour a me suicider. Mais je ne le fais jamais ! D'un côté,
je me rends compte de ma précarité sociale, d'un autre, je constate que
l'auto-production et l'informalité peuvent finalement l'emporter face aux
monopoles machines à profit culturel. Des outils comme l'Internet, le cd-r,
etc... permettent à l'artiste hors normes de s'exprimer "à armes égales"
avec les collabos-médiatico-merdiques. Sur Internet, j'ai la même exposition
que la Fnac ?!
Quelles sont selon toi les raisons pour lesquelles tu n’es pas produit
par un label de disque, même indépendant ?
La raison fondamentale c'est que
je peux pas leur rapporter assez de fric... ensuite c'est que ça leur
rapporterait trop d'emmerdes pour très peu de fric gagné... enfin, ils
trouvent que je suis de la merde ! Au début ça a été un handicap certain.
Mais maintenant que je peux vivre de mon art, le fait de n'avoir signé aucun
contrat me laisse entièrement libre artistiquement et propriétaire de tous les
droits. Finalement la situation de marginal rejeté s'est retournée en ma
faveur ?!
Est-ce que les ventes de tes disques, de tes films et les recettes de
tes spectacles te suffisent ? Combien vends-tu de copies d’un disque ou d’un
film actuellement ?
Je vends environ mille copies de
chaque cd (mais je mets plusieurs années a l'écouler !). Une année ou je fais
beaucoup de shows, je peux vendre environ 1500 produits (cds, vidéos...).
Actuellement, je grave les cds moi-même et enregistre aussi les vidéos, ce qui
veut dire que j'en vends de fait très peu. Ca me permet de survivre mais si je
dois faire un gros investissement (ordinateur, véhicule...) alors je dois
chercher un travail salarié en plus.
Tu as donné des spectacles en Europe, en Asie et en Amérique du Nord.
Qu ’est-ce qui change dans la manière dont ton travail est perçu selon les
pays ?
En effet le show est perçu différemment d'un lieu a l'autre, d'un pays a l'autre mais aussi d'une ville a l'autre, d'un jour a l'autre... Par exemple, si je prends l'exemple du nouveau show "Les Otages" : en Allemagne il a été reçu froidement en apparence mais les gens semblaient profondément touchés même s'ils ne l'exprimaient pas très ouvertement. En Angleterre, la nudité peut choquer certains, mais les autres sont extrêmement enthousiastes (peut-être que du fait que, pour eux, nous brisons des tabous forts ?). Au Japon, ce qui peut passer en Europe pour de la grossière provocation amorale est considéré comme du... romantisme exacerbé !!!?
Que penses-tu de la façon dont les médias te présentent ? Je me souviens notamment du numéro d’Actuel dont tu as fait la couverture…Le journaliste de Actuel a fait cet article la veille de la mise sous presse, sans rien savoir de moi directement. Il a carrément presque tout inventé sur les bases que je lui ai fournies. Les journalistes cherchent un discours simple, ambigu et accrocheur : ils parlent de "trash", de "provocation", de "sexe", car ces mots sont vendeurs. A part des articles faits dans des fanzines par des vrais passionnés, tout le reste est l'œuvre de pigistes a la botte de leurs patrons qui font du sensationnalisme pour vendre sans jamais rentrer sincèrement dans le vif du sujet : pour eux je suis juste un phénomène social a exploiter, en rien une œuvre artistique a promouvoir.
Tu as participé à la Nuit du Cyclone sur Canal +. Prévois-tu de remplacer les Deschiens dans la prochaine mouture de Nulle Part Ailleurs ?J'ai apprécié la manière dont l'équipe qui a fait l'émission a travaillé avec passion sur le sujet. Mais il s'agissait juste pour eux d'un coup ponctuel : Costes comme ils feraient X ou Y. Je n'ai aucun lien régulier avec les médias et ne cherche pas a en avoir. De toute façon, je crois que Internet va mettre à mal le monopole des médias et je n'ai pas envie de courir derrière des moribonds pour leur lécher le cul déjà pourri.
Justement, ça me semble intéressant. Qu'est-ce qui te semblait différent dans la Nuit du Cyclone de la manière dont les autres médias t'ont présenté ?Le sujet tenait beaucoup à coeur
au réalisateur Pascal Toussaint car c'était sa première émission pour la télé
et il a travaillé trois ans sur le sujet qu'il connaissait très bien. Ce n'a
pas été fait à la va vite. Ils ont mis le meilleur d'eux-mêmes. Et il a
volontairement essayé de casser l'image médiatique caricaturale pour essayer
d'en savoir plus (il faut dire que ca leur était nécessaire puisqu'à l'époque
les médias me faisaient passer pour un gros facho?!) En plus ils m'ont
laissé parler = au lieu d'entendre les conneries des autres, on entend les
miennes!
Est-ce que tu considères toi-même tes créations comme choquantes ou
provocantes ?
Parfois je culpabilise en écoutant
certaines de mes œuvres : elles choquent ma propre morale ! Mais je ne
fais en rien de la provocation volontaire : je déballe ce que j'ai en moi, les
rêves en moi et le réel autour de moi : ca peut choquer ok, mais le Kosovo
aussi ça peut choquer si on a un minimum d'imagination : disons que je rends
explicite la violence sous-jacente et sous-entendue.
Quel est le message de Costes ?
Aucun. Je fais, je montre, c'est
tout. A chacun d'interpréter à sa façon
As-tu des contacts avec le milieu de l’art contemporain ? Et si
c’est le cas, de quel ordre sont-t-ils ?
Je n'ai aucun contact avec le milieu de l'art contemporain officiel et subventionné que je hais et méprise autant qu'ils me haïssent et méprisent. Mais j'ai beaucoup de contacts informels et très fertiles avec de nombreux artistes indépendants hors normes à travers le monde.
Est-ce que tu te vois figurer dans les livres d’art des siècles à venir ? Ce serait un beau pied de nez. Je t’y imagine finalement beaucoup mieux que la plupart des artistes qui gravitent actuellement dans les circuits de l’art contemporain…Si j'avoue ce que je crois au
fond de moi, hors de tout masochisme auto-detructeur, je crois qu'il est
possible que je sois un des plus grands artistes de l'époque, simplement parce
que j'aurai explorées des zones d'ombre peu connues, ignores par les autres
chanteurs et acteurs, que j'aurai fait des milliers de titres sur toutes sortes
de sujets qui forment un portrait presque exhaustif d'un individu d'aujourd'hui
et de son époque.
Et que ca va être de plus en plus difficile de l'ignorer. Que je plaise ou non, je reste un phénomène, contournable peut-être, mais présent comme une montagne sur le chemin : on peut passer à cote, on peut percer un tunnel mais la montagne reste.
Je suis assez d'accord avec les résultats de ton analyse non masochiste et justement, comment décrirais-tu l'époque dans laquelle nous vivons... ? Je n'ai pas, pour ma part, l'impression que nous ayons beaucoup avancé depuis le Moyen Age, si ce n'est d'un point de vue technologique...Je ne me sens pas différent de mon chat... pas différent, je crois de l'homme préhistorique... j'ai vu des bushmen en Afrique qui n'avaient jamais vu de blancs auparavant, ils n'etaient en rien différents des beaufs habituels (sauf les plumes). La technologie n'est qu'un outil : Internet n'est pas plus que le bâton du singe qui nique des fourmis. Tous les prophètes de la révolution virtuelle sont des menteurs mercantiles. Assis devant mon ordinateur, mon mal être est le même ; je dois toujours porter/supporter mon corps dont je ne m'évaderai jamais. Et c'est la même souffrance que celle de mon ancêtre chimpanzé dans les bois du Tanganyika.
Où en sont tes démêlées avec la justice ? Peux-tu nous retracer rapidement leur histoire ?En 1996, j'ai créé mon site
Internet où j'ai mis des extraits de chansons de tous mes cds dont le cd
"livrez les blanches aux bicots" de 1989, qui est une
caricature/exploration de comportements racistes.
L'union des étudiants juifs de
France m'a fait, à cause de ces chansons, un procès en 1997 pour "racisme
et appel au meurtre", que j'ai gagné... mais en 1998, le procureur de la république
(bras judiciaire du gouvernement actuel), l'UEJF, la LICRA, le MRAP et la Ligue
des Droits de l'Homme m'ont refait un procès pour les mêmes raisons que j'ai
également gagné. Bien qu'il soit prouvé que je ne suis en rien un militant
neo-nazi mais un artiste qui représente le monde, bon ou mauvais, dans le cadre
de fictions, le procureur et ces mêmes associations ont fait appel et je serai
à nouveau jugé le 17 novembre 1999. Pour mes adversaires, l'expression
artistique doit avoir des limites, limites fixées par "le respect de la
dignité humaine"...
Pour moi l'Art consiste tout au contraire a passer toujours la limite dans le cadre de l'œuvre ; la création ne commence qu'au-delà de la limite, qu'elle soit esthétique ou morale, et si ces censeurs gagnent, ca sera une catastrophe pour l'Art, Internet et la liberté d'expression en France qui est bien plus précaire que la propagande officielle veut le faire croire.
Où en sont tes contacts avec la scène Rap française ?J'écoute beaucoup de rap, car je
me sens proche de l'improvisation free style et des méthodes de composition de
cette musique, mais je n'ai pas de contact personnel, physique avec des rappeurs
comme d'ailleurs avec
aucun autre musicien : je fais tout tout seul.
C'est évident pour moi, toutes ces micros cultures "tribales" qui paraissent si "cooool branchées" sont fondamentalement basées sur l'exclusion des autres : on forme un pseudo groupe pseudo élitiste avec sa pseudo culture, ses pseudos signes de reconnaissance pour se constituer une identité a peu de frais : au lieu de bosser dur pour faire son truc, on se fout un anneau dans la bite (ou une casquette Nike, ca fait moins mal à la bite !) et ca y est, on est un héros faisant partie du bon gang face aux autres minables qu'on méprise. C'est comme si la culture "ado" de mimétisme se généralisait à toutes les populations. Le besoin d'intégration des adolescents est nécessaire même s'il parait ridicule avec le recul (mes jeans pattes d'eph en velours lisse Newman !). Mais que ce type de culture "tribale" soit considéré comme la norme pour des adultes, c'est effarant !... Mais (diviser pour régner) ca doit bien arranger les vrais maîtres réels qui détiennent les vrais pouvoirs bien matériels...
Je cite Maurice Dantec dans l'interview qu'il avait donné à la Spirale : "les soit disantes alternatives sont déjà un vice du système". Est-ce que ce n'est pas la destinée de tout mouvement puisqu'il sera forcément récupéré plus ou moins rapidement par le marketing à prétentions culturelles ? Est-ce que ce ne serait justement pas un des points forts de ta démarche solitaire ? Le fait que tu sois quasi idéalement irrécupérable...J'essaye simplement de faire mon truc = ma vie a fond, le mieux possible (même si je merde 90% du temps). Je ne me pose pas a priori comme une alternative ou une nouveauté ou une révolution ou une simple révolte.
Je suis porté par mon propre désir. Je vis au niveau de mes sens, sans plus. Tant que dans le cadre précis de mon œuvre, j'agis selon mes propres règles, je ne vois pas comment je peux être "récupéré". Je pourrais jouer mon show a la fête du Front National est n'être en rien récupéré, tant que pas un iota de mon spectacle aurait été adapté.
Tu revendiques souvent le fait d’être solitaire. Est-ce réellement le cas ? On t’imagine pourtant entouré d’admiratrices nymphomanes et de fans serviles et soumis…C'est vraiment le cas ! A l'école
je ne parlais à personne, actuellement je vis seul plongé dans mon œuvre,
sans aucune vie sociale ni privée. Mais je ne me sens pas isolé : mon activité
m'apporte énormément de contacts, et après les spectacles j'ai tout le loisir
de sauter les "admiratrices nymphomanes" (complètement bourrées, il
faut l'avouer !)
Comment vois-tu l’avenir ? Tu parlais dans une interview de partir
vivre nu dans une réserve naturelle de singes…
Eh bien ! C'était un rêve et maintenant c'est fait, car j'essaye de concrétiser tous mes rêves. J'ai acheté un terrain en pleine jungle au milieu de l'Amazonie et j'y passe plusieurs moi par an au milieu des singes... et des moustiques (merde j'y avais pas pensé a ceux-la dans mes rêves bucoliques !).
Vous êtes chaudement invités à visiter le site de Costes : http://costes.org
Interview de Jean-Louis Costes par Thierry Zalic
TZ : À partir de quand as-tu trouvé ta voie particulière ?
Je n'avais aucune intention avant-gardiste. Je jouais au début des années 80
du rock, des tubes de Deep Purple et autre hard rock, mais comme j'étais
asocial et chantais faux, je me faisais toujours virer des groupes. Vers 1985,
quand sont apparus les premiers magnétos à cassettes multipistes, je me suis définitivement
enfermé chez moi et fais ma musique tout seul. C'est la solitude qui m'a permis
de me libérer du carcan esthétique du rock et de trouver mon style. J'ai sorti
un premier disque en 1986 "secouez... crevez !" et commencé à faire
des shows en 1987.
TZ : Quelles sont tes origines ? Ont-elles joué un rôle dans tes
fantasmagories ?
Mon père est militaire et ma mère catholique pratiquante. J'ai été élevé
avec une grande sévérité dans des collèges catholiques. J'ai toujours haï
ma famille et l'école. Évidemment, comme tout le monde, j'ai été forgé par
mon milieu, mais ca ne suffit pas à expliquer mon art. Ce que je fais est la réaction
de l'individu face au groupe, j'exprime l'inadéquation de l'individu face aux règles
du groupe, c'est une situation universelle, quelles que soient les cultures.
TZ : Quelles pulsions te poussent à aller vers un art extrême ? Est-ce un
art ? Un message ? Une contestation ?
Je fais simplement ce qui me plait. Quelque chose en moi me pousse à faire ce
que je fais. Je ne considère pas mon art comme extrême mais comme évident et
très loin encore de ses limites. Je n'ai pas de message, je dis n'importe quoi,
mais de ce n'importe quoi se dégage un message, un message que je ne comprends
pas moi-même. Je suis un médium. Je ne conteste rien non plus. Mes seuls
moteurs sont la haine des autres et de la société, la frustration et la
vengeance. Comme ils n'aiment pas ce que je fais, je crie de plus en plus fort
et deviens de plus en plus méchant.
TZ : Tu m'as dit qu'il n'y avait pas de provocation dans tes spectacles.
Es-tu tout de même conscient de provoquer ?
Les cons qui prétendent être provoqués par ce que je fais mentent. Le caca
que je fais sur scène n'est rien à côte de l'apocalypse de merde et de sang
qu'est chaque accouchement. Mon œuvre n'est qu'une pale représentation de la réalité.
La vraie provocation obscène c'est Arthur qui étale sa connerie satisfaite à
la télé avec toute sa bande.
TZ : Y a-t-il de l'humour, du second degré dans ta débauche ? Mais sans
doute n'apprécies-tu pas le mot débauche ?
Quand je fais mon truc, il n'y a aucun humour, pas de second degré. Je deviens
vraiment le con, l'amoureux, le tireur, le nazi ou bien le chevalier justicier.
Je suis à 100 % dans mon rôle, je me prends à mon propre jeu. Mais une fois
l'œuvre terminée, je suis le premier à rigoler devant la connerie ubuesque de
certains passages. La connerie humaine, la mienne en premier, m'hallucine.
TZ : On te retrouve dans le grand livre Underground, l'histoire, dirigé par
Bizot. Penses-tu participer à ce mouvement ? T'y reconnais-tu ? Que penses-tu
de lui ?
Je suis underground par la force. Ce sont les maffias du show-biz et de l'art
subventionnés qui forcent un artiste comme moi à crever dans sa merde dans
l'obscurité. De moi-même je ne me considère pas du tout marginal. Je suis sûr
que mon œuvre, peu formelle et esthétisante, simple, directe et crue, peut être
comprise par tous.
TZ : Tes films paraissent réalistes. Tu me diras que c'est le fait du cinéma
de ressembler à la vérité. Y a-t-il néanmoins des scènes de viols, sado
masos, lacérations, ingurgitations scatologiques qui soient vraies ?
Dans mon œuvre, toutes les scènes qui ne mettent pas en danger la vie sont
vraies. Je chie vraiment, je mange vraiment ma merde, je me branle vraiment et
j'éjacule vraiment, je frappe et blesse vraiment, mais je ne tue pas vraiment
car ca serait irréversible. Pourquoi truquer quand on peut faire vrai ?
Pourquoi utiliser un gode quand on a sa queue ? Pourquoi compliquer quand on
peut faire simple ?
TZ : À quoi répond l'utilisation de la croix gammée ?
J'utilise tous les symboles que la société et les médias nous mettent dans la
tête, de coca-cola à la croix gammée en passant par la musique de France
Info. La croix gammée n'est qu'un de ces symboles entre autres.
TZ : Pour toi, qu'est-ce que l'amour ? Ne peut-il être qu'extrême ? Est-ce
une supercherie bourgeoise ?
Je n'aime personne. Je n'ai aucun ami. Je ne peux donc pas répondre à cette
question.
TZ : Beaucoup doivent de penser fou, ou malade. Que leur réponds-tu ?
Bof... Je ne suis pas spécialement fou ou malade. Des fois je me sens menacé
par la folie, et ça n'a rien à voir avec la créativité. C'est la destruction
de la personnalité, c'est la mort mentale sous le folklore comportemental. La
folie qui détruit est tout le contraire de mon art qui me renforce.
TZ : N'es-tu jamais fatigué de lutter contre l'establishment qui te fait procès
sur procès et contre les extrémistes qui t'agressent ?
Je suis épuisé d'être persécuté depuis 1997, soit 7 ans sans interruption,
par l'union des étudiants juifs de France et ses alliés, la LICRA, le
MRAPLDHL, la LDH. Ils m'ont ruiné totalement, vont faire de moi un clochard,
mais je ne céderai jamais. Je comprends qu'ils vont me faire crever à force de
sabotages, procès, mais aussi pressions sur les salles de spectacle, les
distributeurs et les médias pour m'interdire totalement. Je ne cèderai pas et
je vais prouver qu'une œuvre culturelle sans concession, vraie, peut mettre une
claque à ces censeurs. Je suis un individu pauvre et isolé qui ne peut que
perdre face à ce réseau organisé et proche du pouvoir, mais l'œuvre de mon
esprit peut les battre à terme. Ils vont me détruire, mais ils ne détruiront
pas mon œuvre.
TZ : Penses-tu être un génie ? Une nécessité sur terre ? Un Michel-Ange du caca ?
Je suis un génie. Je n'ai aucun mérite en cela. Quelque chose parle du fond de
moi qui est plus fort que moi. Mon seul mérite est d'avoir laissé parler la
voix intérieure omnisciente et surpuissante. J'ai le pouvoir de changer le caca
en or.
TZ : Quels sont les autres artistes que tu apprécies ?
L'art des autres ne m'intéresse pas. Je suis totalement absorbé par mon œuvre.
Je ne crée pas en fonction d'évènements culturels extérieurs mais en
fonction d'exigences intérieures.
TZ : Quel est ton projet le plus fou, réalisable ou non, que tu rêverais de
faire ?
J'ai réalisé tous mes projets et tous mes rêves sauf un seul : mourir en
martyr. Mais l'UEJF va m'y aider.
Cette
enterre-view date de septembre 2002, donc la chose n'est pas trop fraiche !
Hum, réponses pas développées pour un sous, donc encore une fois je suis déçu
! La prochaine fois je me ferais passer pour un de télérama. Je me
tient quand même de préciser malgré la chronique du spectacle "le
culte de la vierge" (la date au batofar était fantastique) pas très
positive, ainsi que ma déception vis à vis des réponses qui suivent, que
j'apprécies ce que fait Costes en général ; ce qui me dérange c'est les
fanatiques autour, l'idéalisation de la personne. Bon, ça reste paradoxale
vu les procès tramant autour de Costes !
Commençons
par la fin...quelle est ton actualité ces temps-ci ? Implications, projets ? Tu
vends tes cd 10 euros, ne trouves-tu pas le prix un peu excessif ?
Je viens de finir un long métrage qui s'appelle " Alice au pays des
portables " en collaboration avec Darline Monfort, réalisatrice de 25 ans
d'origine haïtienne qui joue aussi le premier rôle. C'est une histoire d'amour
tragique liée aux message sms de téléphones portables. Je trouve pas le prix
de mes cd excessifs vu que j'ai pas un sou !
Tu
fais quoi dans la vie ? Tu travailles ? T'as quel âge ? De quel mode de
sexualité uses-tu ? Es tu dépressif ?
Je fais de la musique, des spectacles et des films. J'ai 48 ans. Je passe mon
temps enfermé dans ma cage à me branler tant la bite que le cerveau. Je vois
personne, je ne connais personne, je haïs tout le monde. Je ne communique que
part mon art qui est la vengeance du frustré.
Peux-tu
nous éclaircir sur les motifs de tous ces procès autour de toi ?
C'est en rapport avec l'antisémitisme je crois ? As-tu réussi à faire
comprendre aux gens, associations (qui sont-ils) le but et les raisons de ta
provocation ? D'ailleurs quel est le but de cette provocation ? (Je fais référence
aux cd's) Où en est-tu avec la justice à l'heure d'aujourd'hui ?
L'union des étudiants juifs de france me persécute par tous les moyens depuis
1997. Ils prétendent que je suis un raciste révisionniste scatophile nazi ! !
Ils me font des procès mais utilisent aussi d'autre moyens : pressions sur mon
hebergeur pour fermer mon site, articles diffamatoires dans les journaux,
pression sur les organisateurs de concerts pour qu'ils annulent mes shows. Résultat,
je deviens peu à peu clochard, tant leur pressions me ruinent...ils font
semblant de croire que mon œuvre est une réalité et pas une fiction ! Ils
m'accusent de tous les crimes représentés dans mes œuvres ! ! Ca peut aller
loin ! Ils m'accusent même de meurtre ! ! Mais l'UEJF n'est pas du tout une
asso anti-raciste. C'est une asso sioniste interdite aux non-juifs par ses
statuts. Tout le contraire de l'anti-racisme !
Il
est vrai que tu suscites énormément de réactions. A la base je voulais que
cet entretien soit un récapitulatif de ce que les gens autour de moi te
reprochaient, pour ensuite te demander de réagir face à ces critiquent ! Voici
quelques exemples Be ready :
-tu es fascho ! (classique j'imagine.)
Je n'ai aucun lien avec aucun parti d'extrême droite ou autre. Mon
activité est strictement artistique.
-le
fait de faire de la provoque en te faisant passer pour ceux que tu dénonces (en
l'occurrence un gros raciste), n'est-ce pas en fait pour dissimuler en tout
impunité le fait que tu es réellement raciste ?
Mimer le crime sur une scène n'est pas de la provoc' mais la base même du théâtre.
L'art est le lieu de La transgression symbolique. Les régimes totalitaires
(dont les nazis) ont interdit toute forme d'art Transgressif. Art gentil = art
nazi !
-quel intérêt de se faire sucer par un flic d'origine antillaise (dans
" les justiciers "), que remets- tu en question là-dedans ? (perso
cette " scène " avec le flic antillais, est-ce dù à quelque chose
de plus ou moins vécu.)
Dans mon quartier il y a pas mal de flics antillais. En fait je préférerais le
sucé qu'être sucé !
-au
lieu de faire un cd sur Coucou de NTM (pour apparemment des raisons d'infidélité
conjugale), pourquoi ne pas lui casser la gueule ? Si à chaque fois que j'avais
un problème relationnel très sérieux jouant sur les conséquences de ma vie,
je faisais un cd sur le ou la ou les personnes en question, cela n'arrangerait
rien du tout et je ne pourrais en aucun cas gagner le respect de la ou les
personnes en questions ? ! (ça sent le fan de Renaud qui passe sa vie au
comptoir !)
Je fais des cd parce que je suis un lâche. Je rêve de démolir un max de monde
mais comme j'ai peur, Je me contente de gueuler sur des cd.
Toujours
à propos du cd " NTMFN ", cette histoire avec Coucou c'est véridique
ou quelque chose monté, une fiction... ?
C'est vrai pour la raison de base du cd (une fille qui sortais avec Kool Shen et
avec qui je suis sorti), mais c'est faux sur les délires du genre j'ai enculé
Coucou au collège de Saint-Denis !
Penses-tu
qu'un site internet exhibant l'antisémitisme, la haine racial et la xénophobie
de toutes sortes, réalisé par des gens de la sortes doit être censuré ?
Quand je vois à quoi servent les lois anti-racistes et autres lois de censures
(toutes votées bien sur pour de bonnes raison morles) je suis contre toute
censure de la parole, de l'opinion, qu'elles qu'elles soient.
Il
paraît que tu as déjà reçu des e-mails de skin fascho te félicitant pour
tes compositions. Comment as-tu réagis ?
Je reçois des menaces de morts de l'extrême droite, des sionistes et des
gangs, finalement de tous ceux qui ne supportent pas de savoir qu'il y a des
gens pas comme eux.
Ton
avis sur les dernières élections présidentielles et législatives ! Votes-tu
? Si oui pour qui, si non pourquoi ? Entre un régime totalitaire et un régime
anarchiste, tu choisis quoi ?
J'ai pas voté. Ils nous ont fait croire que Le pen serait président et en fait
il a même pas un député ! Je peux plus supporter la propagande télé et
France info, le monde, libé, etc...le vrai pouvoir c'est pas le FN marginal,
mais bien les gros riches et maffieux en place qui ont les vraies armes pour
nous niquer la gueule.
Tu
es passé sur canal+ (dans " l'œil du cyclone ") avec Anne, qui réalise
spectacles...avec toi me semble-t-il. Qui vous a branché, contacté pour cette
émission ? Comment cela s'est-il passé ? Etes vous satisfait de ce passage TV
? Avez-vous eu libre cours pour vous exprimer ou vous a-t-on mis en garde sur
certains sujets à ne pas aborder,
J'ai pas regardé l'émission. Je me fous complètement de ce que les médias
disent de moi. Je haïs ces médias et souhaite leur chute et ruine rapide. (ndb
: c'est quoi le rapport avec la question ?)
Tu
as tourné dans divers pays d'Europe, au Japon, au Usa...comment fais-tu pour
organiser ce genre de tournée sur le point de vue finance ? Comment arrives-tu
à faire comprendre tes spectacles à l'étranger ? Comment on réagis les gens
? As tu fais du tourisme ? Des choses, (contre) cultures qui t'on plus ? J'ai
l'impression que tu es souvent sollicité par la scène " DIY "
(d'ailleurs que penses tu de ce " mouvement ") ? Considères-tu ce que
tu fais comme quelque chose de contemporain ? anti-culturelle ? Que penses-tu de
la culture proposée (imposée) ?
Avec internet et la force actuelle des réseaux d'artistes indépendants, c'es
assez facile d'organiser des tournées internationales pour pas cher. (ndb: ah
d'accord.)
As-tu
vu les 120 jours de sodom de Passolini " ? Aimes-tu les ouvrages de Sade ?
Ce n'est qu'un autre attraits de la mondainité, non ?
Je ne sort jamais. Je ne vais jamais au cinéma. La seule chose que je vois sur
l'écran c'est mon cul que je filme avec mon caméscope. Je fais Salo à la
maison, pas besoin de payer pour ça. (ndb: comme ça tu peux acheter du nutella
pour tes spectacles.)
Le
mot de la fin est-il indispensable ? Choisis un mot du dico (sauf dictionnaire).
Peux tu conclure par une question ?
Je vais crever assassiné par des...devinez qui ?
COSTES - THE VICIOUS FROG
Interview by Richard Baylor 1995
Costes is one of the
few modern artists who do exactly what they want. He does not stop to think
whether it will offend, if it is too extreme or if it will be accepted. Often,
this means flirting with such taboo areas as incest, scatological matter and
racism. It could be said that his work may not be for everyone, and that not all
of his work is for people who do understand and appreciate what he is doing.
What can certainly be said is that his creative output is not for the easily
offended.
His work encompasses music, performance pieces and film. He is a prolific
one-man show based in Paris. To date, he has released seven CD's, twelve
film/performance videos and scores of audio tapes. He gained notoriety with the
short lived Costes/Lisa Suckdog union and their early LP Rape GG. This
was followed by a series of live performance pieces including Rollerderby
and Civil War. Both of these anarchic and operatic shows were put out on
video. His foray into filmmaking produced the extreme and humorous Le Fils De
Caligula. It is a French tale of the recreation of the Caligula blood line,
complete with an extreme closeup of our hero taking a healthy dump on a busy
freeway and then being anally raped with a carrot as he breaks up a house party.
Almost all of Costes's work is supplemented by the talented French artist Anne
Van der Linden. She has managed to capture, both on film and canvas, the world
of Costes and his philosophies.
Costes is currently in Tokyo were he has performed a series of live shows.
Although in a culture less tolerant of his flamboyant and often nude
performances, he has found a circle who are willing to be subjected to the whims
of the Great Masturbator. When one approaches the work of someone as
controversial as Costes, one can not put forth their own views and
interpretations solely. What follows is a discussion with the man himself.
I have read that you went to India after finishing school. What kind of effect did that trip have on your life and your outlook on life?
I went to India in 1976 because it was the fashionable place to go. India was a big shock for me: culture, food, crowds, sickness, drugs, etc. All of these negative and positive elements changed me deeply. Even though I got hepatitis, I came back healthier and stronger. I became aware that the Western societies are not the only solutions, but that there are numerous other approaches and outlooks.
What is the significance behind the tattoos that you have on your fingers?
The tattoo on my right hand is the mystic Hindu symbol "OM", while the tattoos on my fingers are of the sun and the moon. I got those while I was in India and thought I would become a "real" hippy. My ideas of becoming a new man were destroyed when I realized that these hippies were just lazy bastards selling fake hashish. When I came back to France in 1977, punk rock had exploded. I was the uncool hippy with bad tattoos. The tattoos bring real problems with the police, customs officials, etc, but they force me out of society every day of my life. I've since stopped following any fashion or believing in anything.
Which form of media do you prefer and in which do you feel that you can best express your ideas?
I began with music, but slowly my songs became more like stories. This lead to my becoming more interested in theatre and opera. From 87/88, most of my tapes and CDs became based on a concept, a story or a song being organized as a scenario. When I began doing shows in 86, they were kind of normal in that I played keyboards and sang although my playing and singing were never normal. By the end of 87, I stopped playing on stage because the actions, theatre and costumes were becoming so important that I couldn't be stuck behind the keyboard. So, I just sang on backing tapes and this allowed me to use my energy in the performances. That is why my performances grew as important as my music important and special because the actions drive me crazy, similar to voodoo. In the beginning, video was a way of remembering the live shows. Soon, I used the camera to make my own films.
Some of your work, including the recent Jap Jew, has provoked cries of racism and fascism. Do you think that there are any foundations for these outcries and what is the purposes for such work?
My CD's are becoming more and more racist and I'm not sure why. I suppose it's the feeling of the times in France. It is in the news, on the television, rightwing politicians, lots of talk about foreigners, etc. I probably get influenced by my environment and I spit this shit out as wild as I can. I like strong provocative work and racist songs excite me for some reason. It is the purging of all the shit in my brain, being washed out, and I feel better after I vomit it up. Although some of my CDs are racist, I am not a racist guy in real life. On the other hand, my work is definitely not fascist because fascists love conventional, boring order, classical music (classical noise), clear square concepts, Christian values, families and the white race. I spit on all of these things, as much as I spit on Blacks and Jews. I hate all social groups, all ethnic groups and all people pretending to be part of a group. I'm alone and hate them all, firstly my own race and family.
So, your anger isn't really aimed at particular groups, just individuals who identify with groups?
When I was a kid and still now, I was unable to be a part of groups, not just formal groups at school, but informal ones with friends. Since that time, I hate all groups. Not only because I can't be a part of them, but because they make me suffer. I have built my own lonely culture and attitudes. I am used to judging myself by my personal achievements instead of my social status. I hate all groups, but I love individuals from all groups who, like me, don't feel that they need to hide behind the shield of a group.
Since Jap Jew stirred-up such a storm in Europe, how well received was it in Japan?
Jap Jew is my best selling CD in Japan. At first, even the Japanese who knew me were offended by the lyrics. But after a while, they could see what I was doing and could identify with it. Like me, they are lonely people and don't feel comfortable living in their own society. For others, I am an enigma: "does he mean it or not?" The CD probably sells well because people need to buy it just to know what it is really about. Unlike in France and Germany, I have never heard anyone in Japan call me a fascist or racist. This is a typical white middleclass attitude and thing to say. For them, just to speak about race is racist. I have never been charged with racism by Blacks, Arabs, Japanese to them, it is obvious that I'm not. Real racism is everyday oppression, not jokes in a song.
You are often mentioned in the same breath as Lisa Suckdog and GG Allin. What is the connection?
I have worked a lot with Lisa Suckdog and she is the only person that I have met who understands exactly what I am trying to get across in my shows. She is as creative and active in the opera projects as I am. Lisa also has good songs and is great on stage. As far as GG goes, I never met him, never really listened to his music and only saw a video of his performances in 93. I like him and am impressed by some of his performances. I suppose people connect us because of the yelling and nudity. Maybe it is because we both have a bat and two balls.
Rape GG seems to be a turning point in your career. The album tells the story of how Costes and Suckdog go to New York to exploit GG Allin. It weaves a tale of love, jealousy and obsession. How true are the lyrics and the liner note interview?
Lisa Suckdog was my girlfriend at the time and she was in love with GG. That is partly why I did this LP. Another reason was because at the time, I had no name for myself in America and was jealous of his fame there. Rape GG was a turning point because it was my first total HATE project. Since, I've done many against people, class and the music scene. As time passes, I have less hope and become more frustrated and nasty. The old sick buffalo feels the death coming soon!
When one thinks about GG Allin, one thinks of a person who treated the whole world as a stage. There didn't appear to be any time when he wasn't performing. I don't think many people were surprised with his early death. Is there a big difference between Costes the person and Costes the artist?
Of course GG wasn't treating the world as a stage. He was going to the launderette on his bicycle, politely buying groceries and beer on the way. But as soon as a video camera was around, he began to play "GG the Nasty Rock Star." I do not act off the stage, I would feel too ashamed to play the tough wild rock guy. Many people expect me to act in life like I do on stage. When they meet me, nothing happens. I don't drink, don't fuck, don't speak, don't even look at them. They say I'm a liar and are disappointed. The obvious link between the two is that Costes the person is an asocial introvert, while Costes the artist is spitting hate at everything.
Your work crosses all moral boundaries that our society has set-up. It is often scatological in nature, you approach areas of incest, masturbation, homosexuality, etc. Is there a moral line that you aren't willing to cross?
My only morals are my ideas of duty and pleasure. I believe that I have something to do every day of my life, produce something special to feel good. I want to make the best of my life and be my own hero, maybe society's hero. I judge all of my actions from this very moral point of view: Did I record a good song today? Did I make the best decisions about how I used my time today? Incest, masturbation, homosexuality are just words. In my songs, there are no words beyond what I want to do, just words beyond words. I always try to go beyond what I have done previously.
There are rumours that France is no longer as artistically tolerant as it once was. Have you felt any of these recent restrictions and do you feel that France is the best place for you to produce your work?
I still feel free to do what I want in France. Since I do it alone in my basement, no one cares. France could be the best place for me because I am lonely and have the time to work, but it is the worst place for shows and selling my products. In Japan right now, I am playing at the best clubs and sell far more than at home. So for the time being, it is hard for me to think about going back.
How well received are you when you tour through the U.S., Europe, and Japan? Are you mostly doing music or performance pieces?
I am best received in Japan, followed by the United States. The only problem in these two countries is their opposition to nudity. It is often against the law and I have to avoid it so that my shows can continue. Europe is more free, but people seem to show less interest in what I am doing. I never play live music concerts, but I sing on backing tracks for about an hour. Like an opera, I perform with one or two partners while the tracks are playing. While in Japan, though, I do have plans to play with an actual band.
You have been working with artist Anne Van der Linden for some time. Her work visually captures the Essence of Costes. How did the two of you get paired up?
Anne was my girlfriend before 87, so she was there at the beginning of my music. It is easy for her to understand my innerworld. She made a lot of great painted backdrops for the shows in Europe and the United States.
One point that has
been made in regards to Costes, is that the sheer volume of his output in such a
short period of time has meant that some pieces are extraordinary, while others
sink to a level of mediocrity. Costes achieves the best effect when taken in
short sharp bursts. After a continous onslaught of audio hysteria, the listener
begins to numb to the overpowering sounds. For myself, his most exiting and
rewarding work comes from his ability to take a very conventional sound/idea and
then to transform and mutate this into a disjointed and perverse finished
product. The tracks, The Great Masturbator from Lung Farts
and Costes Cock On Fujiyama from Jap Jew are just two
examples. As he does not work within any known moral boundries, no one knows
what to expect next.
Costes is an artist in isolation, the enigma is not whether he means it or not,
but whether this isolation is imposed by external or internal forces. Whether
one agrees with his views and philosophies or not, Costes is still an artist
whose work needs to be exposed.
Costes -
Triviale Poursuite
Jean-Louis Costes, vous savez, le fou chantant tout nu, le grand moraliste du XXème
siècle mais aussi le triste Recordman du titre d’artiste français le plus
poursuivi en Justice depuis maintenant huit ans, et ce devant le Marquis de
Sade, Jean Genet ou bien d’autres encore ... Retour sur les motifs et
accusations:
skug #58 | Text: Noël Akchoté | Sun 12. Dec. 2004
Retour sur les motifs et accusations:- Merci!
Frank de Carvalho / redaction
web
Magdalena Blaszczuk / photo
Parution dans la version allemande: skug Vol. 58, 3–5/2004
(Traduction: Alessandro Barberi
- Bof, ils vont pas te tuer...ils
vont te laisser juste minable clochard le nez dans ta merde.
- Ah ouais? Je m'en branle. J'y suis déja le nez dans ma merde. Je la bouffe et
j'en redemande.
Entretien avec Jean-Louis Costes
Novembre 2004
Costes toujours
Costes, chanteur scato et parodique, est trainé en justice pour propos racistes. Problème : en singeant la haine des autres, il voulait surtout dénoncer l'horreur du fachisme. Histoire d'un incompris.
Il a enregistré plus de cinquante
cassettes, une trentaine de CD, donné des centaines de concerts
internationaux et réalisé des dizaines d'opérettes hallucinées. Mais
Costes n'aurait jamais pensé devenir aussi célèbre : depuis le 16 mars
1997, il est poursuivi devant les tribunaux par toutes sortes d'associations
(Union des Etudiants Juifs de France, Licra, MRAP, etc.) pour la publication
sur son site Internet des paroles de l'album " Livrez les blanches aux
bicots "…
Les doigts sur les murs
Florilège : " Trop de bicots dans les rues, trop de négros dans le
métro / Trop de négresses accroupies dans les chiottes turcs chient à côté
dans l'obscurité / S'essuient les doigts sur les murs et touchent la monnaie
/ Et quand je prends la monnaie je touche leur merde. " Le tout hurlé
d'une voix suraiguë et noyé dans d'autres flots de paroles où Costes se
chie dessus. Le voilà ainsi attaqué pour des textes qui n'ont pas été
compris : Costes n'est pas raciste, ne l'a jamais été.
Bête immonde
Au contraire. Le performer tourne en dérision les amis de Le Pen en parodiant
à l'extrême leur discours. Un enfant de 5 ans comprendrait ça. Mais, depuis
trois ans, de musicien provo et underground, Jean-Louis Costes a accédé au
statut peu enviable de bête immonde prônant un racisme ordurier à caractère
scatologique. Comme une erreur de transmission. " Je vous le jure,
Costes, c'est vraiment un type bien. " Là où vivent les oubliés de
Saint-Denis, les immigrés du 93 qui croupissent dans des maisons quasi
insalubres, Costes a la cote.
Hiroshima sonores
Les gosses du quartier l'adorent. Lui-même n'aspire qu'à la tranquillité.
Costes ne sort presque jamais de chez lui. Il passe son temps à jouer dans la
cave. Et puis à se branler aussi. Dans cet antre, près du canal, il compose
des Hiroshima sonores, chansons hurlées, maxi trash mega provoc' (" Je
m'appelle Costes, Jean-Louis Costes, né à Paris en 1954, un vieux con de
Français. J'suis un vieux con de Français, fils de Français, arrière
petit-fils de Français.
L'anus marron
Blanc de la tête aux pieds, bon, pas tout à fait blanc, c'est vrai. J'ai la
queue marron, bon, ouais, j'te jure, j'ai la queue marron, tu veux que j'te
l'prouve ? J't'assure, j'ai même l'anus marron, tu veux que j'te prouve
que j'ai l'anus marron ? Tu crois que j'suis pas cap' de te prouver que
j'ai l'anus marron devant toute la cité ? Tu veux que j'baisse mon froc
et que j'te prouve que j'suis pas vraiment un blanc de la tête aux pieds ?
" Extrait de Sperme blanc sur l'album Nik ta race).
Des cris d'amour
Loin de l'humour potache des salles de garde ou du Caca's Club, ces chansons
sont également des murmures d'agonie ou… des cris d'amour. Car le secret de
Costes - pincez-vous le nez -, c'est l'amour. " L'amour dans toute
sa déchirante atrocité, commente Jérôme Noirez, musicologue sympathisant.
L'amour, dans ce qu'il a de plus lyrique et en même temps de plus cru.
Mystique et coincé
Costes se situe dans la grande tradition du fin'amor, de cette poésie
courtoise qui alternait avec des "contre-textes" obscènes, violents
et anticléricaux ". Costes, troubadour moderne ? Peut-être. Mais
c'est surtout un créateur fou qui traite de sujets sensibles (violence, caca,
racisme, cul…) parce que l'amour, c'est bien, mais - quand on est martyr,
mystique et très coincé - ça fait mal ! Prenez l'amour filial par
exemple. Costes en a mal au cœur : " Père militaire violent et mère
catho grave complice. "
Fourreaux suggestifs
" Pas un seul souvenir heureux de ma vie de 0 à 18 ans ",
confesse-t-il. L'adolescence n'est guère plus brillante : "
Totalement asocial, aucun ami, passe mon temps dans ma chambre à me branler
et à faire joujou au suicide avec des rasoirs. Je hais tout, tout le monde et
surtout moi-même. " Dans ce contexte, l'art se présente comme un
exutoire salvateur : Costes fabrique des " poupées de bite ".
Il enfile des fourreaux suggestifs sur son sexe en érection et, devant le
miroir, se fait des petits strip-tease, ôtant un à un les rubans de tissu et
de cellophane dans un lent dévoilement érotique.
Trop belle
Costes fait de la performance et sublime déjà beaucoup : le voilà éperdument
amoureux d'une fille du Lycée - Anne van Der Linden - " trop belle
" pour lui et qui alimente ses fantasmes. A 18 ans, son destin d'artiste
frustré branleur prend forme : il quitte ses parents et " vire
zonard drogué ". Paradoxalement, ça lui sauve la vie. " J'étais
tellement complexé que, sans la drogue et l'alcool, j'aurais jamais réussi
à baiser une fille. Ça commence bien comme histoire, hein ? Les
origines d'un génie. "
Musique et masturbation
Effectivement, ça prend forme : Costes fait des débuts fracassants dans
la musique : " Je jouais des claviers dans des groupes rock de drogués
où on passait plus de temps allongé sous le piano qu'a jouer dessus. "
Qu'importe. Il tient le bon bout. En 1983, il a 29 ans. Plus asocial que
jamais, il s'enferme définitivement chez lui pour se consacrer à ses œuvres :
musique et masturbation. " Solitaire, sans plus aucune contrainte, ma
musique se radicalise à toute vitesse.
Une petite minorité crie au génie
Tout le monde se fout de ma gueule, ce qui a pour effet de rendre mon style
toujours plus agressif. Je suis décidé a faire chier un max ! " De
temps en temps, lors de sorties surprises, il distribue gratuitement ses
cassettes à la sortie des concerts branchouilles. Les gens refusent, effrayés.
D'autres acceptent, puis veulent lui casser la gueule après les avoir écoutées.
Une petite minorité crie au génie.
Sifflets et crachats
Costes enregistre des chansons bouleversantes. L'art c'est la guerre, en 1986,
est un de ses plus magnifiques albums. En 1986, justement, c'est le début
d'un (relatif) succès : Costes fait des concerts ! " Toujours
aussi complexé et persuadé de ma nullité, je pense que me voir seul sur scène
brailler mes chansons bruyantes doit être chiant pour le public. Idée
confirmée par les sifflets et crachats des punks lors de mes premiers
concerts, tous interrompus au bout de cinq minutes. " Ça ne fait rien,
il continue.
Yaourt-épinard-chocolat
Distribuée par le biais du mail-art, son œuvre dépasse les frontières. Il
part aux Etats-Unis et tombe amoureux de Lisa Suckdog qui, comme son nom
l'indique, est aussi adorable et timbrée que lui. Elle l'épouse. Quand elle
apparaît sur scène - drapée de nudité candide et juvénile -, le
public arrête de siffler. Costes en profite pour créer des " opéras
pornos sociaux " où la violence de ses chansons se transforme en sévices
sexuels simulés et barbouillages au yaourt-épinard-chocolat. Ça passe ou ça
casse.
Sabre rouillé
Ces shows plaisent rapidement. Costes tourne en Europe, aux Etats-Unis et au
Japon. Là-bas, il a même des groupies : " Je tombe chez le manager
de ma tournée, dans une maison de samouraï en ruines. C'est un pédé fou
amoureux de moi qui me répète "I love you Costèsse", qui se
glisse la nuit nu dans mon lit et qui finit par vouloir me tuer avec un sabre
rouillé. ". Anecdote authentique. Les ennemis de Costes sont tout aussi
dangereux. Parmi eux : Kool Shen.
NTM-FN
Sous prétexte que Costes est amoureux de sa copine, Shen débarque un soir,
pas cool, et tente de défoncer la porte en hurlant des menaces. Le lendemain,
Costes commence la première chanson de l'album NTM-FN, brûlot délirant entièrement
dédié à la dénonciation du célèbre duo de rap français, présentés
comme de vulgaires démagos. On y entend Kool Shen dire " Y a pas que ta
mère que je baise, y a aussi ta meuf. " Un message personnel laissé sur
le répondeur du chanteur fou. Quand on a une embrouille avec Costes, toutes
la ville est au courant.
Carrière de martyr
Autres gentils messages : ceux des fachos. Parce qu'ils le haïssent, des
néonazis téléphonent un soir à Costes et lui disent qu'ils vont tuer un
Pakistanais. Costes raconte cette histoire sur son site Internet. Après quoi,
un journaliste écrit dans un article que Costes a tué un homme. " Le
pire, c'est que même les plus sceptiques, les plus contestataires y croient.
Il se disent "Si c'est dans le journal, ça doit être vrai." C'est
le début du quiproquo. " Parce qu'il choque trop et qu'il renvoie dos à
dos toutes les idéologies, Costes entame une carrière de martyr.
Invendable
" A l'école, j'avais pas le droit de chanter tellement je chantais faux,
ça foutait en l'air la chorale. Et je continue à foutre en l'air, la
chorale, qu'elle soit techno ou rap, c'est pareil ! " Parce qu'il
fait de la provocation sur Radio Libertaire, même les anarchistes le virent.
Parce qu'il écrit des chansons antiracistes intitulées Les races puent, il
se fait poursuivre pour " incitation à la haine raciale ". Trop
destroy, invendable, inclassable.
Grandes causes
En 1997, c'est le début de son odyssée. L'Union des Etudiants Juifs de
France le poursuit en justice pour avoir mis sur son site les paroles de son
album "Livrez les blanches aux bicots" (un album qui caricature et
parodie les racistes). Costes va à la Ligue des Droits de l'Homme pour
obtenir de l'aide. Mais, quelques jours plus tard, il apprend que la Ligue
porte également plainte contre lui. " Les pourfendeurs du mal, les
chevaliers des grandes causes, ils se débinent. "
Harcèlement judiciaire
" Raciste, quelle horreur… Si encore on m'accusait d'être porno ou
antiflic, là je pourrais compter sur tous les révolutionnaires de salon.
Mais le mot "raciste" paralyse tout le monde, même si c'est
faux." En trois ans, il gagne successivement trois procès contre ses
accusateurs. Peine perdue : à force de harcèlement judiciaire, l'UEJF,
la LDH, la Licra et le Mrap obtiennent la levée de la prescription sur
Internet. Résultat immédiat : l'extrême droite profite de cette décision
pour tenter de réduire au silence un site antifacho.
Lopin en Guyane
La Ligue des Droits de l'Homme s'aperçoit, mais trop tard, qu'elle a marqué
contre son propre camp. Dégoûté, Costes s'est acheté un lopin en Guyane…
A tout prendre, les singes sont moins cons que les hommes. De temps en temps,
il part dans la jungle pour manger des bananes et puis, quand il revient,
c'est pour se battre, comme un martyr : " Enfant, je trippais et me
branlais sur les vies de saints si sexy bouffés nus par les lions devant tout
le monde.
Sorte de cri fécal
" Je veux être bouffé nu par les antiracistes sous l'œil froid de
mille webcams reliées aux cinq continents ". On l'aura compris :
Costes emmerde le bon sens et le goût. Sorte de cri fécal, ses productions
ne flattent pas l'oreille mais hérissent le poil. Notre côté socialement
correct trouvera ça au choix " nul ", " inutile " ou
" gratuit " (ce qui n'est pas si mal dans un monde où tout est
payant). Mais la petite fille démoniaque qui sommeille en nous ne pourra que
ricaner.
Un hérétique
Costes est ce qui reste de l'individu 2001 quand on lui a arraché tous ses
appendices sociaux : le bon sens, la raison, la décence, la dignité, la
fierté, l'apparence, la race, le genre sexuel… Reste un trou noir qui éructe
et défèque quelques vérités bien fumantes. Il vous met le nez dans la
merde jusqu'à s'éclabousser lui-même. Dans une époque qui a la religion du
bon goût et de la frime, Costes est un hérétique.
Jusqu'à la mort
" Désormais, je ne crie plus seul dans une cave au fond d'une banlieue.
Je me bats, jusqu'à la mort, contre l'ordre moral, en pleine lumière sur
Internet. Ma première cassette s'appelait "L'art c'est la guerre".
Maintenant c'est la réalité : J'ai fait la preuve qu'avec l'art, un
branleur vraiment branleur à mort peut faire trembler les pouvoirs. "
Agnès Giard le 21 mars 2001
Un
tour d'horizon de ta biographie en quelques dates clés
Au
début, je faisais du rock le samedi avec mon frère en banlieue, c'est tout. Je
faisais pas du tout de concerts, c'était plus un hobby. Et puis après, vers
85/86, j'ai commencé à commencer sérieusement mais j'voulais pas faire ça
normalement. Puis ils ont sorti les magnétophones multipistes donc j'ai eu un
truc, un home studio . C'est comme ça que ma musique a barré très vite en
couille…parce que y avait plus personne pour me dire " tu joues faux, tu
chantes trop fort, les paroles sont nulles… ".
Après, j'ai sorti mon premier CD en 86, puis en 88 j'ai fait des choses dans le
style de ce que je fais maintenant, peut être moins développé.
Quid
de ton engagement politique, on te dit extrême-gauchiste…
D'abord
j'aime pas les gauchistes parce qu'ils m'emmerdent souvent avec leur côté
moraliste. Ils font une AG pour savoir si y a des gauchistes dans la salle. Puis
ils font une AG pour savoir s'il faut me laisser jouer. Ils sont pires que le
gouvernement qu'ils critiquent…ce soir pour jouer au Batofar, on m'a pas
demandé mes textes…
Moi, j'ai jamais eu d'activité politique mais je dois être plus proche des
anarchistes, pas parce que j'fais partie de leur fédération mais parce qu'on
fait les trucs par nous-mêmes, on partage l'argent sans règles…Mais moi
j'suis pas un anarchiste qui veut détruire le reste de la société, mais
j'veux arriver à faire un truc à ma façon, dans mon coin…maintenant pour le
reste, j'paye mon essence, j'suis pas non plus…un révolutionnaire, sauf quand
on m'emmerde vraiment, là j'ai envie de tout péter mais c'est plus de la haine
qu'autre chose…
Est-ce
que tu as l'impression de servir à quelque chose ?
Tu
peux poser ça pour toute activité artistique ou 90% de ce que tu trouves dans
un supermarché tu peux te demander si ça sert à quelque chose. J'ai pas plus
de réponse…savoir si ça sert d'avoir des saucisses de Strasbourg…Ouais
disons si tu choisis de relativiser, ça doit servir à quelque chose comme
n'importe quel art.
J'ai
lu sur ton site que déjà le fait que tu emmerdes le monde faisait que tu
servais à quelque chose.
Disons
que je me suis dit que si j'emmerde tellement le monde qu'on me fait des procès
c'est qu'y a un impact. J'ai commencé à cogiter le spectacle qu'on fait ce
soir avec Julio. Puisque ça emmerde les gens ben ce qu'on dit sur scène c'est
sérieux, ça a une importance…On dit n'importe quoi, mais le n'importe quoi,
ça a un sens de toutes façons.
Ouais, plus je dis des conneries, plus c'est fort j'ai remarqué. Non j'te
jure…
Le
spectacle de ce soir…
On
l'a conçu avec Julio, on travaille dessus depuis 2 mois. Julio, il fait aussi
des performances par ailleurs, c'est comme ça qu'on s'est rencontrés. Y a
Marie-Claire CORDAT, que je connaissais parce qu'elle dirigeait le Pez Ner (NdlR
: salle de concerts-expos-perfo-installations à Lyon, qui a fermé il y a deux
ans environ) qui vient d'intégrer le spectacle.
Au
départ, toi tu voulais faire de la musique ?
Ouais,
j'voulais faire de la variété mais c'est complètement parti en couille. Je
connais rien à l'art moderne, j'ai pas d'ambition de révolutionner l'art ou
quoique ce soit. Mon idole c'était Paul Mac Cartney donc tu vois…Ca allait
pas plus loin que ça ; si un truc était pas numéro un au hit parade je l'écoutais
même pas.
C'est que quand je faisais mes K7, mes trucs, que je me suis rendu compte qu'y
avait d'autres gens qui écoutaient ça mais je croyais que j'étais seul, tu
vois ? Je savais pas qu'y avait des petits labels…je savais même pas ce qu'était
un fanzine ! Je me suis aperçu qu'y avait d'autres gens qui n'arrivaient pas à
percer dans la musique normale, ça a commencé à se structurer et maintenant y
a tout un réseau ; il y a des salles partout, je peux jouer partout…
C'est pas forcément en France. Ca se passe beaucoup aux Etats-Unis ce genre de
trucs…
Ce soir c'est très hétéroclite, chacun fait son délire.
Justement,
la soirée de ce soir, comment les intervenants ont été " castés "
?
Ben,
y a un petit label, Rectangle, et Dan a dit " tiens, on va faire une
compilation où les gens vont reprendre une chanson de Costes " donc il l'a
sorti et c'est comme ça que cette soirée s'est montée avec les gens de la
compil.
Ca
tourne donc autour de ton nom…
Ouais,
enfin ça tourne autour de mes chansons, des gens qui apprécient ce que je
fais.
Les
performances que tu fais sur scène se veulent choquantes, en tout cas elles
choquent, ça marche, y a des velléités de censure autour de toi. Moi
j'aimerais savoir, alors que tu te montres sous toutes tes coutures, où se
retranche l'intimité, où est ton intimité ?
Y
a pas moyen en fait de livrer son intimité. Tu peux exhiber ton intimité…Avec
une fille avec qui je suis sorti on a déjà essayé. On commençait à se
disputer sur scène, on s'engueulait vraiment…on a mis au dos du disque tout
le dialogue de la dispute, c'était la haine pure, des fois c'était des trucs
vraiment graves quoi…Et en exploitant ce genre de truc, même ça, tu le lis,
c'est pas de l'intimité, ça redevient encore un document.
L'intimité c'est un truc que tu vis à chaque seconde, dans ton corps…
Alors
pourquoi les gens sont choqués ?
Ils
disent qu'ils sont choqués… mais c'est pas une bite…Ben oui, si tu fais
sauter le Batofar, tout le monde va sortir mutilé, là ça va choquer. Mais là
les mecs sont choqués…c'est des malades mentaux…Ils aiment pas ça mais
bon…ça va, c'est eux qui ont des problèmes psychiatriques.
Ils essayent de me foutre tout un fardeau, que je suis un débile, que ça vient
de mon enfance tout ça…bon j'suis peut être un débile d'accord, mais c'est
pas la raison, y en a d'autres…
Mais nous on essaye pas tellement de choquer. On a une idée, tiens si on
faisait un spectacle sur la religion ? On va créer une nouvelle religion, on réfléchit
à ce qu'on pourrais faire, comment on va commencer, parce que nous on aime bien
quand la scène est un peu choc, un peu délire…quelque chose qui va avoir un
impact sur les gens, leur en donner plein la vue.
On cherche surtout à faire quelque chose qui nous plait.
Et
tu t'amuses ?
Non,
bof…On s'amuse…Des fois c'est plus que de l'amusement…Des fois ça fait
vachement de bien, ça défoule, c'est un sport. Si tu le fais là, tu le fais
pas ailleurs, sinon ce serait vraiment des conneries…Des fois c'est une
routine aussi, parce qu'on travaille, même si on a pas le feeling on le fait,
les gens y voient même pas la différence je suis sûr.
C'est vrai que quand on s'éclate on peut s'éclater vraiment.
Là
vous tournez sur combien d'endroits et pendant combien de temps ?
On
tourne jusqu'en juin en Europe, surtout Europe du Nord…Y a des trucs partout ;
en Italie on va peut-être jouer devant 30 personnes…Après en septembre on
veut partir aux Etats-Unis, on a des plans, et en Australie.
Comme on s'adapte à toutes les conditions techniques, d'argent et autres…on
peut jouer partout.
C'est même bizarre de trouver autant de dates quand t'es rien du tout avec un
show aussi bizarre…c'est bien en fait, ça fait plaisir quand même.
Mais
t'es pas quelqu'un de particulièrement haineux en fait ?
Si,
si ; C'est la haine qui me motive à fond, dans tout ce que je fais. C'est la
frustration , le fait de pas être riche, de pas être respecté pour ce que je
fais. Moi je suis un clochard ça m'énerve. Je vois pas pourquoi n'importe quel
connard qui vend du pain, il gagne sa vie.
Je pourrais faire autre chose, sans problème, mais maintenant je bloque là-dessus
tu vois ? Je m'entête. Je pourrais lâcher à tout moment parce qu'y a plein de
trucs qui m'intéressent dans la vie…j'pourrais aller défricher l'Amazonie…
Ce qui m'éclate c'est de construire mon propre truc, tu vois, construire une
cabane pour moi c'est pareil…Aller au bout d'un truc, le contrôler soi-même…Ce
que fait un fermier, un chirurgien…Quand tu le vois taffer, c'est trop fort,
t'hallucines sur la concentration, la passion du mec…
Pas regarder sa montre au travail en en faisant le moins possible.
Comment
tu te vois vieillir ?
J'suis
déjà vieux alors…Je sais pas, je vais crever d'un jour à l'autre, assassiné
peut être…
Tu te sens menacé ?
Bien
sûr que je suis menacé physiquement. Ouais je fais gaffe quand même. Je vais
pas dire qu'y a que moi mais quand t'es dans un truc n peu public tu peux te
faire avoir. Je suis assez seul.
Et tu penses que la haine peut retomber ?
La
mienne ou celle des autres ?
La
tienne
La
mienne non, moi c'est la frustration. J'ai toujours été frustré. Quand j'étais
à l'école je parlais à personne, je sortais pas avec des filles. Toujours été
le frustré de service, c'est ça qui alimente…J'utilise un ressort comme ça.
Je crache parce que je suis jaloux, ça me rend dingue. Mes chansons c'est ça,
je m'énerve en pensant à un truc. C'est souvent ça.
Dernière question gastronomie : Est ce qu'on peut savoir ce que quelqu'un a mangé en mangeant sa merde ?
Ah
ben ouais…Demande à Julio.
Julio : je sais pas, j'ai jamais mangé de merde
Attends, le truc du lait avec le muesli …
Julio : Ah ça…je saigne de l'anus pendant une semaine, c'est que j'ai mangé
ça. Je chie 8 fois par jour quand je mange du muesli avec du lait. J'me torche,
j'me torche, j'me torche comme je suis un maniaque de la propreté alors je me
fais saigner…
Et
t'en manges souvent ?
Julio
: Ben là, ça fait une semaine, j'ai pas arrêté. C'est une lubie, ça m'a
fait plaisir.
Voir
le site de Costes
(les amateurs pourront commander ses livres et sa musique en ligne)
-
POUR CEUX QUI ONT EU LE BON GOUT D'ACHETER CET IVG MAIS QUI NE TE CONNAISSENT
PAS , QUI EST J.L COSTES ?
Je suis un mec timide et frustré qui, comme il arrivait pas à se faire de
meufs à cause de son sale
look, s’est réfugié dans la musique pour essayer de briller un peu, pour
enfin pouvoir s’en faire une. Et ca a marché : des meufs nues mouillées se
sont pointées après les concerts. Mais merde, j’arrivais
pas à bander. Encore raté!
- TU SORS DONC TON DERNIER ROMAN "GRAND PERE"
CHEZ FAYARD MI-FEVRIER. PEUX TU ME DIRE COMMENT S'EST PASSE L'ECRITURE?
Je reste enfermé chez moi face à mon vieux PC pourri. Et j’attend. Je sais
pas quoi écrire, mais tant que ça vient pas je bouge pas. Je bouffe plus, je
dors sous l’ordinateur. Et finaement d’un coup ça vient. D’un seul trait,
sans relire, j’écris mille pages en six semaines. J’écris tout ce qui me
passe par la tête le plus vite possible. Et après, je fais le tri. Je relis.
J’en enlève les trois quarts, je bricole le reste, et ça donne un roman
super puissant d’aventures trash et mystique : Grand Père. Franchement,
c’est de la bombe!
- D'APRES TOI, QUELLES SONT LES VERITABLES RAISONS QU'UNE
"GRANDE" MAISON D'EDITION S'INTERRESSE AUJOURD'HUI A TON TRAVAIL?
Le directeur éditorial de Fayard, Raphael Sorin, a aimé les nouvelles que je
publiais sur le net. En plus, il pense que le meilleur en littérature viendra
d’outsiders comme moi et pas des journalistes et des profs qui squattent ce
business depuis trop longtemps.
- S'IL FALLAIT CLASSER TON ROMAN DANS LES RAYONS D'UNE
LIBRAIRIE BRANCHEE. TU SERAIS : EN VITRINE, GRANDS ECRIVAINS FRANCAIS , A COTE
DU "FESTIN NU" RAYON "BEAT GENERATION", A LA LETTRE C...
Exact, je serai à la lettre C dans le rayon “Grands écrivains”, mais plus
seulement dans les magasines
branchés, dans toute les librairies, fnac et virgin. L’underground
met le turbo!
-
JE NE T'AI PAS ENCORE VU EN SPECTACLE ET TU ES ACTUELLEMENT EN TOURNEE. QU'EST
CE QUE TU POURRAIS ME DIRE EN AVANT GOUT?
C’est un one-man-show tout en musique de 40 minutes. Il y a une bande-son mais
aussi des parties jouées live au clavier et de l’électronique noise bricolée.
Il y a une histoire aussi : C’est un mec qui attend une meuf chez lui. elle
vient pas et il se prend la tête en chantant des chansons de haine triste. Et
puis d’un coup elle arrive! tout excité, il essaye de la sauter, mais il
bande pas. Ca le rend dingue dingo, et à partir de là tout dérape grave, de
pire en pire...
- YA T'IL UN COSTES FOU ET MALADE RETRANCHE DANS SON
BUNKER DE BANLIEUE ET/OU UN COSTES QUI VOYAGE, FINALEMENT PEUT ETRE HEUREUX?
Je ne suis jamais heureux. Je marche vers un but inaccessible. que ça soit en
art, en amour ou en
voyage, dès que j’atteins le but, je suis déçu, et je suis obligé de me
recasser plus loin. toujours plus loin, je marche en vain, jusqu’à la mort.
Ca ressemble à la quête du graal, mais sans armure et avec un slip sale.
- OU EN EST D'APRES TOI CETTE "LIBERTE D'EXPRESSION"
AUJOURD'HUI EN FRANCE?
Il n’y a pas vraiment de liberté d’expression en France. On fait joujou
dans un aquarium. On peut aller où on veut mais on peut pas sortir de
l’aquarium. Le con qui se croit libre se cognera douloureusement dans la vitre
blindée qu’il avait pas vue.
- ENFIN, POUR DOPER NOS VENTES, DIRAIS TU QUE TU LIS
BEAUCOUP DE B.D?
Ma formation de base en littérature, c’est la BD. Je n’ai lu que çà
enfant, alors forcément, ça m’a
éduqué = déformé. J’ai construis mon roman comme une BD, des scènes, des
cases. Une écriture visuelle. directe, efficace. On a pas besoin de savoir lire
pour lire mon livre. Avec 500 mots, je décris l’Apocalypse. Pour décrire
l’Apocalypse, j’écris BOUM! J’écris comme si je
dessinais dans Spirou!!!
- LE DESSIN T'INTERESSE DANS TON TRAVAIL?
comme je lisais que des BD, gosse je voulais être dessinateur de BDs.
D’ailleurs j’ai pas mal dessiné
pour des fanzines quand j’avais 14-15 ans. J’en ai gardé un style de dessin
caricatural au trait, qu’on
retrouve sur mes pochettes de disques.
- POUR TERMINER, ACCEPTERAIS TU D'ETRE LE PARRAIN DU
NOUVEAU-NE-IVG?
Je serai le parrain d’IVG, si tu le baptises à l’Eglise Catholique.
Pourriez-vous
vous présenter en quelques mots ?
A la base, je suis musicien. J’ai produit une trentaine de CDs de chansons
depuis 1986. Et joué une vingtaine d’opéras. Pratiquement tout est
auto-produit. J’évolue dans les milieux artistiques indépendants en marge du
show-business.
En 1997, j’ai créé un site Internet pour faire connaître ma musique, et
j’ai commencé à publier dessus des textes courts.
En 2005, Rapahel Sorin de Fayard a apprécié ces textes et m’a proposé d’écrire
un roman : Grand Père.
Grand père, c’est une autobiographie ou un
roman ?
Le personnage central du livre, Garnick Sarkissian, est mon grand-père. C’était
un arménien originaire d’Ukraine qui a eu une vie extrêmement aventureuse.
D’abord cosaque pour le tsar pendant la révolution bolchevique, puis légionnaire
dans les guerres coloniales françaises, et ainsi de suite, toute sa vie
mercenaire des causes perdues. Le héros est mon grand-père mais sa vie est
romancée parce que je ne sais pratiquement rien de sa vraie vie. Quand je
l’ai connu, il n’était plus qu’un vieil ivrogne devant la télé et
refusait de parler. C’est l’écriture du livre qui m’a permis de deviner
ce qu’a pu être sa vie. Je l’ai reconstituée à partir d’indices
infimes. Elle est peut-être historiquement fausse, mais mentalement elle est
vraie. C’est une représentation de la souffrance christique des vieux
clochards. Un autel à ceux qui sont morts oubliés par nous pour qui ils ont
combattu.
Par l’Art, on révèle les mystères. J’ai vu dans le fascinant mystérieux
grand-père tout cassé, le héros d’un grand roman d’aventures trash et
mystique. C’est mon tribut aux ancêtres, aux Grand Pères (sans trait
d’union méprisant), bien plus fort que nous, pauvres merdes molles modernes.
C’est un roman réactionnaire dans le sens où je pense que l’Histoire
humaine est une chute. A chaque génération, on tombe plus bas, plus faible,
plus vicieux. Le progrès n’est qu’une prothèse pour des singes dégénérés.
Que représente la littérature pour vous ?
Rien de spécial. Je ne fais pas de différence entre les moyens d’expression.
Musique ou écriture, c’est toujours le même flux magique qui jaillit. Mais
je fais la différence entre la vie et l’Art : L’art permet de plonger dans
le Chaos et le Mal pour en jouir, explorer et apprendre. Ce que ne permet pas la
vie où nous passons notre temps à louvoyer et magouiller entre les petits maux
misérables. Je voudrais finir englouti dans l’Art, que le roman devienne la
vraie vie, rentrer dans le texte et y mourir.
Lorsque vous écrivez, avez-vous en tête le
public auquel vous vous adressez ? Est-il ciblé ou large ?
Je ne peux pas cibler quand j’écris car j’écris n’importe quoi. Tout ce
qui me passe par la tête, je le marque sans aucune censure. J’évite systématiquement
de me poser la question de la qualité de l’œuvre.
Même si je me sens terriblement nul, je continue sans répit à noircir la
page. Je descend toujours plus bas dans la nullité et je finis par trouver des
trésors cachés sous les tas de merde méprisés. Ne sachant pas à l’avance
ce que l’Ecriture va me révéler, il m’est impossible de viser quoique ce
soit. Cibler n’est pas une démarche créative. L’art conceptuel qui prétend
savoir ce qu’il va faire avant l’acte est une imposture. Ecrire est une
expression incontrôlable du chaos intérieur.
Qu'est-ce qui vous a motivé pour écrire cet
ouvrage ?
Je n’ai aucune motivation positive pour écrire. Je suppose que je le fais
pour tuer l’ennui, ou bien me venger de la vie et des hommes. Je n’ai pas de
vocation. J’écris comme je pourrais faire chercheur d’or ou serial-killer.
C’est comme si vous demandiez à un ivrogne qui roule à 200 sur l’autoroute
ce qui le motive. Rien à part l’humaine folie.
La vocation d’écrivain s’est-elle imposée
à vous comme une évidence ou avez-vous eu besoin, d’une sorte de révélation
?
Révélation est le mot absolument juste. Mais la Révélation n’est pas préalable
à l’œuvre. J’écris dans l’obscurité, le découragement permanent, le
sentiment d’échec. C’est seulement une fois le livre écrit que je comprend
pourquoi je l’ai fait. La puissance, la beauté et la vérité du roman
justifient ma vie de larbin du clavier et transfigurent la matière la chair tas
de merde en souffle lumineux de l’esprit.
Quels sont les événements qui influencent
votre écriture?
Les échecs amoureux, la masturbation, la frustration de rater ma vie, le
radotage de France-Info et la couleur de ma merde.
Votre livre va paraître, vous allez déborder
d'activités. Est-ce que cela freine vos projets d'écriture ?
Je n’ai pas de projet d’aucune sorte. Je vis chaque jour comme si j’allais
mourir demain. J’écris chaque oeuvre avec l’intensité du dernier cri
Costes a un CV bien rempli. Chanteur scatologue réputé
et auto-produit, il a enchainé les disques parodiques et/ou ultra-violents,
s'attirant l'admiration des tarés de tout poil et la haine des bien-pensants.
Ses shows bordéliques, pornos et déjantés sont des sommets de brutalité et
d'imbécillité jouissive. Costes se plait à se baigner dans le sang, dans la
merde et le sperme. Il aime éructer et vagir.
35 disques, 20 trash-opéras, 5 long-métrages et une vingtaine de court-métrages
à son actif, puis un premier roman, 'Viva la merda'.
Ceux qui n'ont pas entendu parler de ses performances ou de ses disques se
souviendront peut-être de lui en train d'imiter la truie sous la menace du
flingue des héroïnes du film 'Baise-moi' de Virginie Despentes et Coralie Trin
Thi. Ou, tout au moins, en train de réclamer un fist-fucking à Vincent Cassel
et de se prendre des grandes claques dans la gueule dans 'Irreversible' de son
pote Gaspar Noé.
Jusque là, comme on s'en doute, les grosses boites de disques ou d'édition
avaient évité Costes comme la peste, ce qui ne l'avait pas empêché de bâtir
une grosse réputation grâce à Internet et au bouche à oreille. On a de la
peine à croire qu'une maison d'édition bien propre sur elle comme Fayard,
s'acoquine de bonne grâce avec cet agitateur. C'est pourtant le cas puisqu'il
sortent le nouveau roman de Costes 'Grand Père' en février 2006.
En vieux routier du net, Costes connaissait la Zone et m'a proposé de
l'interviewer pour parler de ce roman. Résultat...
(http://le-mort-qui-trompe.fr/)
A.F. - Dans vos textes, les paroles de vos chansons et dans vos spectacles, on trouve très souvent mise en scène une innocence brisée ou violée : la vierge (in « Le Culte de la vierge »), l’enfant (in « Pédé-pédophile » [1]), ou l’idiot (la soeur mongole in « Viva la Merda » [2])... On n’a pas l’impression qu’il s’agit d’une nostalgie de ces états-là ni d’une fascination purement esthétique ... cette expérience radicale, organique, du Mal, elle a un sens moral ou c’est autre chose ?
J-L Costes - C’est mon cul violé par le père et la queue castrée par le regard de la mère. C’est l’enfant innocent, le contrepoint de la violence, car toujours je balance entre haine inassouvie et amour inavouable.
A.F. - Dans vos spectacles, vous mettez en scène, en musique et en mots, une violence primitive, le sacrifice ressemble à une espèce de festin rituel. Les valeurs et les symboles : vous voulez les violer, vous en repaître ou ... vous affamer ?
J-L Costes - Mon corps est tatoué scarifié de symboles. Il y a des croix en travers dans mes intestins. Et mon cerveau est quadrillé par les robots moraux. L’enchevêtrement symbole métal froid / chair sang chaud est inextricable. Aucune cisaille de pompier de la loi ne pourra en venir à bout. Alors ça sort en tas, tous les ingrédients mêlés dans le caca.
A.F. - L’ « homme sauvage » et l’ « art sauvage », ce sont des fictions théoriques ou ces expressions ont-elles un sens pour vous ?
J-L Costes - L’homme n’est pas sauvage. L’homme est un slip sur une bête sauvage. L’art est le cri idiot d’un singe qui enlève son slip qui lui gratte le cul.
A.F. - A vos détracteurs (nombreux) mais aussi à ceux qui vous placent au panthéon des subversifs, vous répondez que votre art n’a aucune « intention subversive ». Votre œuvre, vous la voulez souverainement in-justifiée, dans un sens quasiment mystique, non ?
J-L Costes - Je ne suis pas parti d’un engagement vers l’avenir léger mais d’une réaction au poids du passé. Je me débats connement dans des liens plus forts que moi. Mon œuvre paraît subversive mais elle ne l’est en rien puisque je reste prisonnier. L’oeuvre est libre par ses ratages qui font des trous dans la trame du filet, mais l’artiste est l’éternel condamné à tout rater. Ca devient mystique quand j’accepte l’échec, que j’ai trop crié et je tombe à genoux. Je vois, cachée sous la commode, une croix en bois avec un corps froid. Et je me reconnais façonné vivant à l’image d’un dieu mort.
A.F. - L’artiste, vous le voyez plutôt comme un combattant, comme un génial imposteur ou comme un traître ?
J-L Costes - Un combattant, car il faut lutter pour produire malgré la misère matérielle et les menaces de mort. Un génial imposteur quand il fait miroiter la liberté du chaos aux humains méthodiquement attachés. Un traître, car il cherche la Gloire et abandonne dans l’obscurité ses frères de misère.
A.F. - L’homme, vous le voyez plutôt « souillé » ou plutôt « souillure » ?
J-L Costes - L’homme est un souillé souillure. Une évidente souillure Mais je comprend pas bien ce qui a souillé comme ça le brave singe de base ? Mais putain merde Chimpanzé, t’as marché dans la merde de Dieu ou quoi ? !
Le roman "Grand Père" de Jean-Louis Costes vient de paraître chez Fayard. Plus d’infos sur le site du livre.
Visitez le site de Costes.
(http://contrechamp.kaywa.com/)
Chaleureux et volubile, Jean-Louis Costes, qui achevait un appétissant pot-au-feu (sous l'oeil envieux de son chat), nous a reçus ce samedi 18 février chez lui, pour un entretien fleuve, de la cuisine à la cave. L'occasion d'entrer de plain-pied dans son singulier processus créatif et de revenir sur son roman Grand-Père.
Comment es-tu arrivé à la performance ?
Par la musique. Le week-end, je faisais des reprises de Deep Purple. J’ai toujours aimé la musique, de la pop aux approches plus expérimentales. J’ai investi dans du matériel et ai commencé à faire des maquettes tout seul. J’en rajoutais toujours par peur d’être chiant. On retrouve cette même surenchère dans le bouquin.
La musique préside donc à la mise en
scène du corps ?
C’est une manière de le théâtraliser, mais mon corps n’est qu’un outil au service d’une histoire. Je ne fais pas du tout un travail sur le corps, au sens strict de la performance. Je me crois dans une comédie musicale de Broadway. Il y a un scénario, un personnage. Comme dans un grand opéra
On se trompe quand on associe ton
travail à la démarche esthétique du performer ?
Je n’ai aucune démarche esthétique ou idéologique préalable à la création. Je suis anti-concept et anti-engagement politique dans l’art. La tendance, c’est d’arriver avec un discours esthétique, la « plaquette de présentation », mais la proposition artistique, au final, est vide de sens. Si on me dit que mon livre relève d’une idéologie, c’est non. Je ne contrôle pas ce que j’écris. J’écris ce qu’une voix dans ma tête me dicte. Et je ne sais jamais où elle va m’emporter. J’écris dans l’isolement de ma cave, possédé par la voix.
Tu as écrit le livre très vite.
Six semaines. J’avais plus de mille pages. Une fois l’inspiration tarie, je commence à le corriger. Pendant que j’écris, je ne relis et n’enlève rien. Plus tard, Fayard n’a opéré aucune censure. Il y a eu des corrections bien sûr, mais qui allaient dans le sens d’une plus grande efficacité de la narration.
On sent un vrai rythme dans ton écriture.
Le livre est très musical, en effet. Quand j’écris, je marque le rythme, compte par quatre. C’est presque de la poésie. C’est scandé, comme du rap
Je retrouve dans tes spectacles la même
dimension viscérale et physique que dans ton écriture, une sorte de transe.
Comment entres-tu dans la transe ?
Je n’entre pas vraiment dans la transe, il ne faut pas exagérer. Je suis obsédé par mes accessoires et la scénographie et ne suis pas complètement dans l’abandon. Ce qui n’exclut pas de se laisser emporter. Un peu comme un jazzman, dans le cadre strict de ses compositions. La bande-son est un esclavage qui me met les limites, m’intime de m’arrêter. Et dans le roman, c’est l’histoire qui cadre le délire.
Quelles sont précisément tes limites ?
J’ai une limite personnelle : je ne transige pas sur mon intégrité physique. Entailler son corps, pour 100 euros n’a pas de sens. Il y a aussi des limites imposées par la société : il y a des lois et une intolérance générale qui font qu’on ne peut pas totalement se lâcher en art. J’ai d’ailleurs eu un procès en 1997 à cause de mon œuvre. Le niveau de censure devient tel en France, qu’on pourrait se faire assassiner pour une œuvre de fiction ! Or, représenter la violence, dans le cadre d’un roman ou d’un spectacle, ce n’est ni la faire subir, ni la subir. C’est la conjurer.
Le livre rencontre le contemporain de manière fulgurante. Comment te positionnes-tu en tant qu’écrivain et individu face aux revendications identitaires et mémorielles actuelles ?
Je
me cogne dans l’époque quel que soit le sujet. Dans le livre, on remarque
davantage ces thèmes (il y en a d’autres) car ce sont ceux que les médias
ressassent aujourd’hui.Ca ne veut pas dire que je cautionne ou nie les thèses
dominantes. Elles ressortent dans mon œuvre malgré moi, simplement parce
qu’elles traînent dans ma tête. Je n’adhère à aucun dogme. Selon la situation,
les personnes et les croyances changent. D’ailleurs, dans le roman, le héros,
d’abord victime, devient ensuite bourreau. Sous le Bien, il y a toujours le Mal,
prêt à bondir. Et sous le pire crime, on trouve un peu d’amour déçu.
Tu canonises ton grand-père d’une
certaine manière ?
C’est comme un saint laïque, absout par la repentance après une vie de péchés. Emporté par des flammes purificatrices. Sauvé de l’Enfer par le martyre.
Il y a dans ton écriture une vraie dimension visuelle et cinématographique.
Si je ne vois pas, je n’écris pas. J’écris le film qui défile à toute vitesse dans ma tête.
Trash et lyrisme alternent en permanence chez toi.
En moi comme dans mon œuvre, je sens toujours l’amour romantique sous la merde et la violence..
Tu es un grand voyageur.
J’ai traversé le Soudan à pied, du désert à la jungle du Zaïre. Je me suis construit une maison en bois en Guyane, ce qui m’a servi d’ailleurs pour l’évocation du bagne et du camp de la mort dans le livre. Je m’appuie sur ma vie aventureuse pour écrire. Je ne suis pas un écrivain parisien enfermé uniquement dans ses fantasmes
T’es-tu appuyé sur des recherches documentaires, des témoignages familiaux, ou t’es-tu laissé emporter par la sorcellerie évocatoire du verbe ?
C’est complètement ça. Je ne sais rien de précis sur mon grand-père. Je sais
juste qu’il a été cosaque, légionnaire, bagnard. Je n’ai vu, enfant, qu’un
vieillard ivre et violent courbé devant la télé, cassé par la vie. Trois mots,
cosaque légionnaire bagnard, et le souvenir d’un vieillard balafré par une vie
de guerrier, m’ont suffi pour inventer cette histoire.
Ce que je trouve de très beau dans ton
livre, c’est précisément ce qu’on ne sait pas, les béances. Costes fait tourner
les tables.
Je
me suis laissé emporter par l’imagination, mais j’ai magiquement deviné la
vérité. La guerre civile en Russie, les massacres dans le rif, la vie au bagne,
tout ce que j’ai inventé concorde avec les faits historiques. On a dans un coin
de la tête, une intelligence instinctive capable de reconstruire le réel à
partir d’indices ténus. C’est cette intelligence animale qui opère dans mon
écriture.
Penses-tu que les génocides ou les
guerres affectent les générations suivantes ?
Oui, parfois dans leur chair même. Je suis tombé sur un site communautaire
arménien qui comprenait l’évocation brutale du génocide dans mon livre, son côté
dégueulasse. Relativement à cette mémoire, on ne peut pas, selon le rédacteur du
site en question, édulcorer les événements. Il pense que je suis moi-même une
victime indirecte du génocide arménien, la violence initiale m’ayant été
transmise par mes ancêtres, et pouvant me mener à l’autodestruction. En écrivant
ce livre, j’ai pris conscience du poids de meurtres et de souffrance passés qui
pèse sur moi, vivant pourtant dans une société en paix.
Te sens-tu concerné par l’arménité ?
Consciemment, non. Je n’ai pas été élevé dans ce milieu et suis de toute façon un solitaire asocial.
Comment tes parents reçoivent-ils ce roman familial ?
Mes parents ne connaissent rien de mon œuvre. Ils pensent par préjugé que c’est la production d’un malade mental ! A priori, un roman intitulé « Grand Père » les inquiète, craignant peut-être je ne sais quelles médisances. Ils ne semblent pas comprendre qu’un père de fiction n’est pas le vrai père.
A la fin du roman, le narrateur dit que, quels que soient les conflits qui les séparent, toutes les générations sont liées malgré elles dans le même inévitable destin.
Oui, c’est une idée qui a surgi du roman, qui s’est révélée et imposée en écrivant. Que je rejette mes vieux ou non ne change rien : je suis pour toujours lié à eux par la souffrance et le crime, le péché originel qui se transmet de père en fils, du premier singe jusqu’à moi.
(mishimax.org)
Fini la punkitude, Jean Louis Costes sort enfin de l’ombre avec un premier roman pas mauvais du tout. Une interview vite fait bien fait pour revenir sur son taré de grand-père, le paludisme et les évangélistes haïtiens…
Fabien Loszach - Alors ça y est t’es plus un punk ? Fini les squats, t’es chez Fayard et tu passes à tout le monde en parle?
Jean Louis Costes : Eh oui ! Fini la Galère ! Enfin la gloire ! J’ai
passé vingt ans dans l’underground, ignoré par les médias, méprisé par les bien
pensants, haïs par les justiciers de l’ordre moral... Et me voilà écrivain chez
un prestigieux éditeur! La vie est bizarre. C’est un jeu de hasard.
FL-Ta maison d’édition te compare à du Cendars explosé ou
du Céline Ivre. Dans ma critique, je te met entre les lamentations de Jérémie et
Louis Calaferte… Dis moi Jean-Louis, t’es ou ?
JLC - Je suis enfermé à l’intérieur de moi-même. Ca fait longtemps que j’ai
quitté le monde réel pour le rêve littéraire, plus charnel que le monde en
plastique. Jérémie, je m’en fous. Et Calaferte, connais pas. Trop occupé à
creuser le tunnel dans ma tête et mes tripes. J’y trouve un paquet de merde et
dedans des pépites,des histoires de fou, comme celle du roman “Grand Père”...
FL - Justement, parlons-en, un bon taré ton grand père non
?
JLC - Né en 1900, il a été cosaque contre les communistes en 1917, légionnaire
dans les guerres coloniales françaises dans les années 20, criminel et bagnard
en 1930, évadé du bagne et chercher d’or en Amazonie, et enfin collabo et
trafiquant pendant la guerre de 39-45 en France. Tous les massacres du 20e
siècle, il en était. Un baroudeur fou! Il aurait du mourir mille fois et à
chaque fois il s’en est tiré. Car il était un super-héros, c’est-à-dire un
salop.
FL - La haine que tu manifeste à son égard, cache pourtant
mal une certaine admiration pour le personnage. Je me trompe ?
JLC - Quand j’étais enfant, il n’était plus qu’un vieux clochard alcoolique affalé devant la télé. Il était ultra violent et puait la pisse, et je le détestais. Mais en écrivant le roman, je me suis rendu compte que ces beaufs des années soixante étaient des super-héros ignorés : entre 1900 et 1945, ils ont été pris dans les plus grands massacres de l’Histoire. Leur vie a été d’une intensité extrême, et moi qui ne suis qu’un artiste de merde, je ne peux qu’admirer le cosaque qui charge au sabre des tanks. Au Grand Père qui a survécu à toutes les guerres, je dis “bravo” !
FL - Peut être que tu t’en défends, mais je trouve qu’il y a dans ton écriture quelque chose de très chrétien(dans tes spectacles aussi). J’ai l’impression qu’il y a une recherche permanente de rédemption et de catharsis qui passe en grande partie par le corps et par le corps douloureux… ça te rappelle quelqu’un ?
JLC- Je suis catholique pratiquant, bien que je n’ai pas vraiment la foi. Les rituels, et le rituel catholique en particulier, me fascinent. Je m’intéresse aussi aux transes, et vais souvent dans les églises évangélistes haïtiennes où les possessions sont fréquentes. Rituel et transe sont mes deux sources d’inspiration. J’ai cherché à produire un roman le plus intense possible, pleins d’aventures épiques, traversé par un souffle mystique, afin de secouer le corps du lecteur et d’enivrer son esprit. Que lire “Grand Père” soit une grande aventure inoubliable. Que le lecteur devienne le cosaque dans la steppe, puis le légionnaire en Afrique, puis le bagnard en Amazonie. Qu’il traverse en une nuit de lecture tous les mondes réels et imaginaires. Et referme le roman heureux d’avoir survécu.
FL - C’est quoi cette histoire, t’as été malade, et t’es parti t’enfermer dans ta cave pour pondre ce livre ?
JLC - Avant d’écrire “Grand Père”, je suis parti en Guyane visiter les
ruines des “Camps de la Mort” dans la jungle, là où les bagnards punis
mourraient comme des mouches, là où le héros du roman a failli mourir puis s’est
évadé. Et dans cette jungle infecte, j’ai attrapé le paludisme. Pendant que
j’écrivais le roman, j’ai été pris par la fièvre, ce qui a influencé mon
écriture. L’avant-dernière scène du livre, qui révèle le lien indissoluble qui
nous lie malgré nous aux crimes de nos ancêtres, m’a étédictée par un esprit
sortie de la fièvre paludique. Jean Louis Costes, Grand Père, Fayard, 2006
Ecrit par:
Fabien Loszach
Voilà près de vingt ans que
Jean-Louis Costes s’improvise musicien, performer, cinéaste ou écrivain pour
exorciser ses pulsions les plus inavouables, et cracher ses chroniques de la
haine ordinaire au visage d’un public toujours plus nombreux. Seul contre tous,
Costes crée le dégoût artistique.
Biographie : Jean-Louis Costes publie dès 1985 d’innombrables cassettes et
disques dont les titres traduisent bien la portée nihiliste et fantasque :
Secouez… crevez !, Les Oxyures, Livrez les blanches aux bicots, Jap Jew,
Terminator Moule, Le Fils de Caligula, Un sparadrap sur l’anus…
Parallèlement, il développe sur scène ses « opéras porno-sociaux », où se mêlent
chansons, théâtre, actions violentes, nudité et sentiments exacerbés : parmi
ceux-ci, La Marelle, Lost Kittens, Partouze à Koweit-City… qui lui
permettent de se produire du Japon aux Etats-Unis. Jean-Louis Costes a également
réalisé plusieurs films, fait l’acteur pour Virginie Despentes et Gaspard Noé,
enregistré avec Noël Akchoté, et publié en 2003 son premier roman, Viva la
merda, aux éditions Hermaphrodite.
Quels sont vos rapports avec la censure ?
« Au départ, je croyais qu’en France, il n’y avait pas de censure.
J’étais franchement persuadé que dans le cadre d’une œuvre d’art, on pouvait
tout dire, tout faire. C’est d’ailleurs le cas, toujours, pour ceux qui ont le
droit, puisque les gens ne t’attaquent que pour se réserver le droit de parler
de certains sujets. Parce que si tu veux voir du meurtre, du crime, tous les
soirs, il y a trois cents morts à la télé. Et personne ne téléphone à la police
pour dénoncer l’incitation au meurtre. Dans une fiction, normalement, on a le
droit de représenter le mal : c’est quelque chose d’acquis en Europe, une
convention propre à nos cultures. La scène, c’est un lieu d’expression du crime
– et si ce n’est pas pour faire ça, si c’est pour bouffer des yaourts, c’est pas
la peine, on n’a pas besoin d’un lieu symbolique pour faire des choses
autorisées. On a besoin d’un lieu symbolique pour bien comprendre que “ça”,
c’est “faux”, que ce qui se passe sur la scène est grave. Ça a toujours existé
en Europe, et cela joue un rôle social essentiel : couper ça, c’est détruire une
société. Je ne sais pas bien expliquer le rôle de l’art, de cet art-là, mais
j’ai le sentiment qu’il est là depuis longtemps et qu’il doit avoir un rôle
moteur. Le problème, c’est qu’en France, le code pénal ne fait pas clairement la
distinction entre fiction et réalité, contrairement à la Suisse par exemple, où
la distinction est claire, et où, si tu revendiques ce que tu fais comme de
l’art, terminé, ça bloque les poursuites. Les attaques que je subis seraient
impensables en Hollande (un procureur hollandais qui avait vu un de mes
spectacles a même écrit une lettre en ma faveur pour la justice française) ou en
Allemagne, je n’ai jamais eu de problèmes ailleurs qu’en France.
Dès le début, votre travail a suscité l’incompréhension…
« C’est sûr. Déjà, avant les procès, les gens se posaient des questions
sur ce que je fais, étaient contre. Parce qu’en art, si ce que tu fais ne
s’inscrit pas dans une structure connue ou dans un certain style, il y a déjà
une grosse résistance : lorsque tu n’es pas habitué à une forme, tu ne
l’acceptes pas. Au départ, j’ai eu plutôt affaire à ce problème-là, d’autant
plus qu’il y a un côté ridicule dans ce que je fais : pour les gens, j’étais un
bouffon, un con, quoi, c’est à peu près ça qu’on me reprochait. Si je n’accédais
à rien, c’est parce que j’étais nul (ce que je suis d’ailleurs le premier à
reconnaître). Mais quand les procès ont débuté, en 1997, mon audience avait déjà
commencé à se développer, c’était parti, et tout a été bloqué net. Parce que ces
gens qui intentent les procès exercent un contrôle qui excède largement le cadre
de “l’anti-racisme”… Au départ, ce sont l’UEJF et la Licra qui ont déclenché les
poursuites – des associations qui, à la base, défendaient les gens qui étaient
dans la merde au lieu de mettre des gens dans la merde. Puis, au bout d’un an ou
deux, sont venus se joindre à eux la Ligue des droits de l’Homme et le Mrap, ce
que j’ai trouvé beaucoup plus étonnant. D’abord, parce que je connais pas mal de
gens qui sont au Mrap et à la LdH, et ensuite parce que c’est moi qui avais
contacté cette dernière pour solliciter son aide à l’époque du premier procès :
non seulement elle ne m’a jamais répondu, mais en plus, elle a fini par
m’attaquer – et c’était moi-même qui lui avais transmis le dossier ! Le plus
drôle, c’est qu’alors qu’on me prenait pour un bouffon dont le délire passait
pour un délire anti-fasciste – le disque pour lequel on me poursuit, Livrez
les blanches aux bicots, m’avait jusqu’à présent valu des menaces de mort de
l’extrême droite –, on s’est mis à me prendre au sérieux en renversant
complètement mon “discours”.
Ces attaques posent notamment la question du caractère
prescriptible de textes publiés sur Internet…
« Oui. Mais selon la règle, ou tout simplement le bon sens, les faits
étaient prescrits au moment où l’on m’a attaqué en justice. Les textes
incriminés, qui datent de 1989, sont arrivés sur Internet en septembre 1996,
année où j’ai lancé mon site, et ce n’est qu’en janvier-février 1997 que ces
associations ont commencé à m’adresser des menaces. Elles m’ont d’abord envoyé
au civil, dans l’idée de faire tomber Internet hors du droit de la presse de
1881. Normalement, un procès dans le cadre du droit de la presse va tout de
suite au pénal, c’est pourquoi ces associations ont été déboutées au civil, au
motif que les faits en question ne dépendaient pas de celui-ci. Je pensais que
c’était terminé, mais non, elles sont reparties au pénal pour les mêmes faits,
en prétendant que j’avais créé un nouveau site alors que j’avais simplement pris
un nom de domaine, ce qui a été facile à prouver. Parce que, quoi qu’on en dise,
il n’y a rien de plus contrôlable qu’Internet : tu ne peux pas dater une
photocopie, par exemple, mais sur Internet, tu as des horloges, des machines qui
pistent tous les dossiers. J’ai donc gagné une nouvelle fois, c’était en 1998,
on a admis que les faits étaient toujours prescrits. Mais les associations ont
fait appel et, bizarrement, elles ont gagné, le juge décrétant qu’il n’y avait
pas prescription, ce qu’aucune loi ne permettait d’affirmer : je veux bien qu’il
y ait une lecture continue sur Internet, mais il y a aussi une lecture continue
des livres dans les bibliothèques ! Les livres, jusqu’à présent, durent plus
longtemps que les sites Internet… L’affaire va devant la Cour de cassation, qui
casse le jugement. Je pensais qu’on allait enfin s’en arrêter là, mais non ! En
1999, la Cour de cassation décide de renvoyer l’affaire en appel, et là,
l’avocat sort une nouvelle astuce de son chapeau, en affirmant que le fait
d’avoir pris, pour l’adresse de mon site, un “.org”, avait simplifié l’accès à
celui-ci, et donc augmenté sa fréquentation… Cela fait huit ans que ça dure, que
je suis convoqué tous les trois mois, que je subis un black out des
médias, et parfois ça me fatigue vraiment, ça me monte au cerveau. Mais je
bloque par tous les moyens parce que j’ai compris que ce que font ces
associations n’était pas fair-play. Toutes ces manœuvres visent à faire sauter
la prescription et à pouvoir me juger sur le fond pour me condamner, c’est leur
seul but… Quoi qu’il en soit, je reste fier de Livrez les blanches aux bicots
: c’est le seul disque à avoir été fait sur le racisme des années 1980. Mais il
n’est plus du tout d’actualité, les problèmes, aujourd’hui, sont de nature
différente. Non, le vrai disque qui serait CHAUD, ce serait un disque sur le
communautarisme : là, tu peux te la manger, la balle.
Comment expliquez-vous cet acharnement ?
« Mon truc, c’est que je suis un taré. Qui a résisté à ces associations, à part
moi ? Quand un artiste dépasse les bornes, il y a toujours un éditeur ou une
maison de disques sur lesquels on peut faire pression. Mais si un barjot qui
fait tout lui-même, comme c’est mon cas, décide de se suicider financièrement…
Parce qu’au bout d’un moment, tu es acculé à la misère, il y a une grande
différence entre ma renommée et mon argent : alors que tous les PDG de chaînes
culturelles me connaissent, je ne peux jouer que dans des salles indépendantes,
des lieux recyclés, des squats – des réseaux dont les juges n’ont absolument pas
idée. Voilà encore un argument pour les avocats des associations qui m’attaquent
: le fait que je me produis dans des caves sans faire de publicité dans les
médias, c’est bien la preuve qu’il s’agit d’un complot, d’une “association de
malfaiteurs”. On veut à tout prix empêcher que mon image artistique arrive
jusqu’au juge, parce que si je m’établis, c’est fini… Je pense que si
ce que je fais possède une forte valeur politique, cela n’a rien à voir avec le
contenu de mes textes mais plutôt avec ma manière de travailler. Ce qui dérange
surtout, c’est que je me prends en main moi-même.
On vous a comparé aux dadaïstes ou aux actionnistes viennois, à Artaud ou à
Pasolini. Comment vous situez-vous sur la scène artistique ?
« Je ne me rattache consciemment à aucun mouvement. Mais surtout, je refuse
catégoriquement que l’on dise que dans mon travail il y ait un quelconque
message, y compris anti-raciste. Pour ma voisine haïtienne, ce qui m’arrive est
incompréhensible. Pour elle, ce que je fais, c’est de l’ordre du vaudou… »
David SANSON Publié le 00-03-2005
8 juin 2005
Après
coup.
La performance.
Jean-Louis Costes chante, se masturbe, joue avec le sang et s'enduit de caca. «Parmi le chaos total de n'importe quoi que je fais, il y a la merde. Parce que je chie tous les jours, dit Jean-Louis Costes. S'il n'y a pas une grande part de crime dans l'art, c'est pas la peine d'en faire.» Il participe à un débat sur la provocation, face aux animateurs Laurent Drezner et Thomas Joubert (1).
«Dans une précédente interview, vous avez dit, je vous cite : "Je passe 90 % de mon temps à me branler et à zoner chez moi sans sortir. Le reste, je me filme en train de me branler ou je gueule dans un micro des cris de pédé en rut." Alors ? continue le présentateur, vous considérez-vous comme vraiment un artiste ou cette interview est-elle de la provocation ?» «Non. C'est comme ça que je fais mon art. Je reste enfermé chez moi à attendre que ça sorte. J'écoute France Info, je me branle. C'est ça, une journée d'artiste.» «Vous dites vous-même que votre musique est nulle ?» «C'est-à-dire que je me déteste moi-même, mais j'ai remarqué que plus on se sent mal, plus on va vers une forme d'art qui paraît nulle, et meilleur on est. Toucher à un sujet crétin comme la merde, ça paraît con, comme ça. Ou les parasites intestinaux. Franchement ? Ça paraît con. Mais en fait, il y a plein de choses impliquées dans la merde», reprend Costes. «C'est quoi qui vous fascine ?» questionne le présentateur. «On s'aperçoit que c'est un truc essentiel de l'humanité, je sais pas, s'enduire de merde, c'est se purifier. Je peux pas expliquer.» «Et ça, c'est de l'art ?» «Oui, c'est de l'art ! Moi, je m'enduis la tête de merde et les oreilles des autres.» Spécialiste de l'art contemporain, Serge Le Borgne intervient. Au mot de spectacle il préfère le terme de «performance». Le graphiste Kiki Picasso lui coupe la parole : «C'est mieux que de la performance. C'est une expression théâtrale complètement délirante. Il balance une énergie folle, une intensité jamais atteinte dans l'histoire du théâtre.» «Performance», maintient Le Borgne. Kiki Picasso montre le plateau d'un geste de la main. «Mais déjà, cette qualification ! Qu'est-ce que c'est, là ? C'est de la télé de merde, non ? C'est un plateau absolument immonde, avec deux présentateurs en petit costard ! Il y a en a un qui ressemble à Mgr Gaillot et l'autre à une espèce de mec du téléachat, dans un plateau d'une platitude monstrueuse, d'une laideur épouvantable, et un public pas très marrant ? Et puis voilà. Ce n'est pas de la provocation ce que je dis, c'est la vérité.»
(1) C'était lundi à 15 h 21, sur Pink TV.
CHALANDON Sorj
Libération
27 avril 2006
Jean-Louis Costes, 51 ans, artiste performer spécialisé dans la scatophilie. Ses spectacles pour happy few de plus en plus nombreux sont idolâtrés en France comme au Japon.
Merde à celui qui le lira
par Emmanuel PONCET
Saint Augustin disait joliment : «Nous voyons le jour entre les selles et l'urine.» «Viva la merda», proclame depuis bientôt vingt ans Jean-Louis Costes. Ce jeune quinquagénaire au corps tendu et musculeux, très Iggy Pop, est souvent réduit à un «bouffon qui se met du caca sur la tête» (un proche qui résume). Car, lors de ses performances, il se badigeonne souvent le corps de substances organiques ou excrémentales. Héritier décalé des actionnistes viennois des années 70, ce musicien d'origine traîne du coup une image indécrottable d'«artiste scatologique». Sombre et méphitique provocateur. Il ne fait rien pour dissiper cette image hard-crade. Honnêtement persuadé depuis toujours que «les actions humaines passent toutes par la pisse, le sperme et le sang». Imperméable à tout jugement social, ce singulier performer, idolâtré en France, aux Etats-Unis ou au Japon, trimbale une authentique aura underground.
Dates
Jean-Louis
Costes en 7 dates
13 mai 1954
Naissance à Paris.
1972
Bac, études d'architecture.
1982
Traversée de l'Afrique à pied.
1986
Premier disque, Secouez-crevez.
1988
Premier opéra porno-social, les Pendus.
1997
Procès pour «diffusion de propos racistes».
2006
Premier roman chez Fayard, Grand-Père.
Radicalement solitaire, entre moine-soldat et artiste ambulant, il transporte de ville en ville son matériel hétéroclite dans une R19 noire.
Néochaman en visite, il fait l'objet d'un culte fervent et confidentiel dans chacune des (petites) salles où il se produit. Au Totem ou au Zanzibar, il provoque d'amicales transes, parfois sexuelles. Ce qui lui fait dire maintenant en rock star : «Tout ce que je ne pouvais pas avoir à 18 ans, je l'ai maintenant.» Comprendre : les filles, surtout. «Séduire est le but de base. Il ne faut pas se cacher. Désormais, des filles de 18 ans viennent à moi.» Des jeunes filles en sueur. Des keupons, des pédés et des quidams aussi. Son fan-club s'est élargi singulièrement. A la limite aujourd'hui du Bottin mondain. Le cinéaste Gaspard Noé l'a fait tourner dans Irréversible. Virginie Despentes lui a logiquement confié un rôle très anal dans Baise-moi un coup de pistolet dans le cul. L'auteur des Chiennes savantes reste sa meilleure attachée de presse. Et loue depuis longtemps ses qualités littéraires. «Si mon boulot, c'était éditrice, écrit-elle sur son blog, je lui tomberais dessus et jamais plus je ne le lâcherais.» Le vieux renard de l'édition, Raphaël Sorin, n'a pas laissé passer l'idée. Il publie Grand-Père, récit autobiographique fictionné. Depuis que Sorin, l'engin-lanceur de Michel Houellebecq, l'a «sorti de [s]a poubelle» (lui-même), «Costes» (son nom usuel) se retrouve curieusement placé sous les projecteurs mainstream. D'Ardisson, par exemple, qui le compare souvent à Marilyn Manson pour son aura gothique et occulte. «Je suis à l'aise avec les médias, assure la nouvelle star, c'est moins stressant que de monter sur scène face à 200 punks bourrés, armés de canettes de bière !» On doute un peu. Son exposition médiatique semble plutôt accentuer ses airs touchants de phalène frémissante de stress.
Encore plus décalée lorsqu'on pénètre dans son lieu de répétition. Une échelle en bois. Puis une cave sombre et humide dans sa maison-squat de Saint-Denis, en banlieue parisienne. Un vieil ordinateur poussiéreux, un synthétiseur vintage, des poupées désincarnées, des restes de peinture mystérieux... Avec Costes, la définition ambiguë de l'artiste underground devient littérale : une panic room sous la terre ; un vague matelas ; un improbable duvet. Contrairement à une légende tenace, aucune odeur de pisse ni trace d'excréments décelables. «J'essaie quand même de nettoyer un peu quand les journalistes viennent», concède-t-il en souriant. A l'étage, (un peu) plus confortable, vivent sa femme et sa fille de 2 ans. Sa compagne japonaise a tapé un jour «sexe scato» sur Google. Jean-Louis s'est naturellement imposé. Ils se sont mariés shinto. Mais la conjugalité n'a pas vraiment changé sa spartiate façon de vivre. Ce qu'il appelle «ma base-camping» comprend le strict nécessaire. Et moins encore. Pour cet architecte diplômé qui n'exerce que pour lui, un couteau suisse, c'est déjà trop luxueux. Un couteau basique convient largement à ce fils de militaire, élevé dans une propriété de 3 hectares au Vésinet. La maison de ses grands-parents maternels, «pas très loin de chez Jean-Michel Jarre, à Croisy, où finalement, lui aussi travaille dans une cave...» Il n'aime pas spécialement l'argent, même s'il n'a rien contre. «Il ne dépense rien, confirme un proche. Il boit du lait et du Coca. Une économie de récup. Même pas dix mille euros devant lui pour s'acheter une camionnette potable.» Les six mille euros d'avance de Fayard ne suffiront donc pas. Il s'en fout. «J'ai vécu dans un milieu riche. Je suis un dégénéré de la bourgeoisie. J'ai vu mon grand-père maternel errer dans sa baraque, malheureux comme une pierre.»
Lorsqu'il débarque, seul blanc, dans son squat de Saint-Denis, il entend ses voisins haïtiens rigoler toute la journée. Pour l'adolescent mutique, élevé dans des internats stricts (Stanislas), que tout le monde croyait fou, le choix de vie est vite vu. Plutôt pauvre et «indé» que thuné et misérable. «Les riches sont des handicapés. Physiques. Ils ont besoin de prothèses toujours plus perfectionnées pour les assister.» Monomaniaque assumé, il aime creuser vingt-quatre trous, planter autant de poteaux et bâtir sa cabane en Guyane, où il s'exile deux fois par an comme un bagnard volontaire. Une traversée initiatique de l'Afrique, en 1982, lui a appris «J'ai failli crever» à ne dépendre que de lui-même. «Base camping» et kit de survie : «couteau-chaussures-feu», «Tintin-Sade-Artaud-Céline», «Fassbinder-Jean Rouch», «musique pygmée-Beatles». Il y a une «autoproduction» de soi costienne comme il y a une «invention de soi» wildienne.
Il n'a jamais eu de maison de disques. Depuis le début de sa «carrière», sa production se résume à «un CD-Rom que je grave», vite on line sur l'Internet. Marginal foncièrement, mais pas rebelle complaisant, il a longtemps été communiste politiquement. Maintenant, il se sent proche du Parti libertarien, qu'il a découvert aux Etats-Unis. «Je me suis rendu compte que l'idéologie de gauche ne fonctionnait pas. La bonne conscience antiraciste, par exemple, ne colle pas avec la réalité. Lorsqu'un nouvel habitant arrivait dans mon immeuble, mes voisines haïtiennes me disaient : "Il y a des Noirs qui viennent..."» Pour lui, les antiracistes bien pensants ne connaissent pas vraiment les immigrés. «Ceux qui viennent en France ne sont pas forcément les damnés de la terre. Ils appartiennent souvent à une petite-bourgeoisie débrouillarde. Leur but est exactement le même que tout le monde : un pavillon et un chien.» Mais non légendés, ses propos ou son oeuvre sont parfois mal interprétés. Plus ou moins volontairement. La Licra et l'UEJF ont cru un jour dénicher des «propos racistes» dans l'une de ses chansons titrée Livrez les Blanches aux Arabes. Il ne faisait pourtant que remonter la merde collective, comme dans ses spectacles cathartiques. Innocenté devant les tribunaux, cette expérience a manifestement affûté sa méfiance presque physique, des faux progressistes «qui prennent en otage les personnes adorables» (Pasolini).
«Il aurait pu devenir anar de droite aigri, analyse Olivier Stupp, journaliste et accompagnateur, mais il s'est passé exactement l'inverse.» «Anartiste», «analiste», «prêtre scatolique» ? Il faut trouver pour lui de nouveaux hybrides. L'art engagé l'ennuie. La politique ne le dégoûte pas. Il se verrait même bien maire. «Ramasser les crottes. Changer une ampoule de réverbère. C'est très concret. Ça me plaît.» Il critique d'ailleurs le sien, Patrick Braouezec, à Saint-Denis, «un mec discret... surtout à la télé».
En attendant l'investiture, Costes poursuit ses tournées bricolo en messie ascétique qui sautille sur scène en criant : «Papa, encule-moi !» «Il continue sa traversée du désert, décrit son accompagnateur du moment, Olivier Stupp, mais de plus en plus gens viennent à sa rencontre.»
TECHNIKART
decembre 2000
1 PETITE ENFANCE : BATTU ET VIOLÉ
Enfance difficile dans une famille tres stricte et sévère (père
militaire violent et mère catho grave complice) Pas un seul
souvenir heureux de ma vie de zéro à 18 ans! En gros, petite
enfance : se fait casserer la gueule sous le regard complice de
la mère, puis se fait enculer par le père sous le regard
complice de la mère.
2 ADOLESCENCE : ASOCIAL SUICIDAIRE
Adolescence : totalement asocial, n'ai aucun ami, passe mon
temps dans ma chambre à me branler et à faire joujou au suicide
avec des lames de razoir devant la glace des chiottes, ou au
fond de la classe à dessiner des cadavres et des filles
torturées. Je hais tout, tout le monde, et surtout moi-même.
Dans ce contexte l'art va être un exutoire salvateur. La seule
chose qui me branche adolescent à part me branler (mais ca me
fait culpabiliser) c'est dessiner.
3 JEUNESSE : ZONARD DROGUÉ
Apres 18 ans, je me tire de chez mes parents et vire zonard
drogué. Quoiqu'on médise sur les drogues et bien qu'actuellement
je déteste la drogue et les drogués, à l'epoque la drogue m'a
...sauvé la vie.
J'était tellement flippé, coincé et complexé que sans la drogue
et l'alcool j'aurai jamais réussi à baiser une fille. Je n'ai
pas touché une fille avant l'age de 23 ans et pendant des années
après j'ai toujours débandé au moment de la pénétrer!
(merde!!!!) et ce n'est que completement défoncé que je me suis
dépucellé sans mëme me rendre compte que j'etais dans le trou!
Ca commence bien comme histoire hun? Les origines d'un génie!
C'est avec la drogue que j'ai switché du dessin à la musique. Je
jouais des claviers dans des groupes de rock de drogués ou on
passait plus de temps allongé sous le piano qu'à jouer dessus.
4 TRENTE ANS : LE DEBUT DU TRIP COSTES
Mais étant toujours aussi asocial et flippé le coté tribal des
groupes de rock m'a fait trop flippé et, vers 1983 je m'enferme
définitivement chez moi pour ne plus jamais en sortir jusqu'a
aujourd'hui (sauf pour monter sur scene) me consacrant
uniquement a la musique et la masturbation.
Enfermé, sans plus aucune contraine sociale ou esthétique mon
style musical va se radicaliser a toute vitesse. Tout le monde
hait ma musique et tout le monde s'écarte et se fout de ma
gueule, ce qui a pour effet de rendre mon style toujours plus
agressif. Je suis décidé a faire chier un max!
De temps en temps je sors par surprise et distribue gratuitement
dans les concerts branchouillés des cassettes gratuites de ma
musique sur lesquelles j'insulte en musique le public et les
musiciens en vogue. alors que je fais ca par pur nihilisme, il
va se trouver des gens pour apprécier çà et évidemment une masse
pour détester. C'est comme çà que va commencer le phénomène "Costèsse".
5 LE RÉSEAU INDÉPENDANT. Vers 86 je découvre par hazard dans un
fanzine (je savais meme pas ce que c'était qu'un fanzine!) qu'il
y a d'autres bargeots comme moi sur terre qui produisent leur
musique chez eux, l'enregistrent sur cassette et la distribuent
eux memes sur leurs propres labels indépendants.
Je vais alors commencer à envoyer mes oeuvres à gauche a droite,
dans tous les pays, des usa au japon, et peu à peu va se
constituer un public de fans et, vers 1986, je fais mes premiers
concerts
6 PORNO-SOCIAL
toujours aussi complexé et persuadé de ma nullité, je pense que
me voir seul sur scene brailler mes chansons bruyantes doit etre
chiant pour le public. Idé&e confirmée par les sifflets et
crachats des punks et industriels lors de mes premiers concerts
qui sont tous interrompus au bout de 5 minutes.
Je commence alors a faire des opéras pornos-sociaux : la musique
est enregistrée sur bande, je chante live par dessus.
débarassé des instruments je peux introduire des actions
théatrlaes qui avec le temps vont se dévellopper en véritables
"opéras pornos-sociaux" ou la violence mentale et sexuelle de
mes chansons est transposée sur scene en violence physique et
sévices sexuels.
Ces shows plaisent rapidement et me permettent de bien tourner
en europe, usa et japon.
De 88 a 2000, une douzaine d'opéras pornos-sociaux différents
ont été représentés, le premier étant "les pendus", le tout
dernier actuellement sur scene "vomito negro".
7 LA VIDEO
Vu l'aspect spectaculaire des shows, beaucoup de gens les
filment en vidéo. Ce qui me branche sur la vidéo. Au début je
filme moi-même mes shows en donnant la caméra à des membres du
public au hazard. Et puis je finis par utiliser la caméra pour
produire, à partir de 1990, mes propres films de fiction que je
monte ensuite, avec la touche "pause", entre 2 scopes vhs!
"crack kiss" est mon premier film de fiction (tourné a new-york),
puis"le fils de caligula", "i love snuff, "morpho" ... des longs
métrages, et une floppée de courts métrages.
8 LES INFLUENCES (INDUSTRIEL, ELECTRONIQUE, HARD-CORRE, RAP...)
Le fait de fréquenter (par courrier, jamais physiquement) les
milieux artisitques indépendants va me faire découvrir toutes
sortes de musiques qui vont m'influencer. A la base je suis un
artiste "brut" : je me prend pas du tout pour un musicient
branché d'avant-garde, je veux juste etre le nouveau Paul Mac
Cartney mais j'y arrive pas!). Je découvre donc toutes les
musiques indépendantes : tout ce qui est radic al m'éclate et
m'influence : le bruitisme industriel, le hard-core us le plus
speed, le noise-rocj japopnais le plus déjanté, le rap hard-core
le plus violent et explicite. Sans vraiment imiter, je passe
toutes ces influences a ma moulinette, a la "sauce costes". Car
je sais pas pourquoi mais j'ai jamais réussi a bien imiter
quoique ce soit, meme pas le boogie-woogie ou la techno basique
que n'importe quel con imite en deux secondes avec la boite a
rythme que maman lui a acheté pour noel...et ben moi j'y arrive
pas, j'imite mentalement, mais rythmiquement et mélodiquement
j'ai toujours tout faux. Au fond mon style vient de mes
handicaps et de ma totale absence de don. A l'école j'avias pas
le droit de chanter tellement je chantais faux, ca foutait en
l'air la chorale! Et je continue a foutre en l'air la chorale,
qu'elle soit techno ou rap , c'est pareil!
9 L'INTERNET
Evidemment l'internet pour un mec comme moi c'est le miracle :
comme tout musicien indépendant asphyxié entre les majors du
show bizz et les collabos de l'art subventionné, internet va
m'ouvrir une miraculeuse fenetre d'expression. Sans label, sans
distributeur, sans controle et bénédiction du business ou de l'etat,
je peux faire mon truc comme je veux et le diffuser
instantanément a travers le monde. Le pied total quoi!
A trois heures du mat, seul chez moi, sans avoir a fréquenter
physiquement qui que ce soit, je peux communiquer mentalement
avec le monde entier, etre a la fois totalement seul et
totalement universel, mon reve de branleur frustré mégalo!
Je vais donc dès 1996 dévellopper un site important http://costes.org
ou je documente mes oeuvres, les distribue, mais aussi fait des
délires "spécial web" qui sont spécifiques au média internet.
Ce qui va faciliter mon travail et la distribution de mes
oeuvres, mais aussi m'attirer les pires emmerdes.
10 LA CENSURE
En fait internet va m'amener les pires emmerdes. Car les gros
intérets en place (majors du show bizz et grands médias
institutionnels) vont vite comprendre que internet pourrait
causer leur perte : tous ces indépendants (médias ou artistes)
qui d'expriment sur le web menacent les intérets en place : des
milliers de petits sites culturels cumulés (gratuits en plus!)
bouffent l'audience des gros médias et font chuter les recettes
publicitaires. Des millions de morceaux libres de droits en mp3
qui se baladent sur le net font une redoutable concurrence font,
cumulés, une redoutable concurrence aux majors.
Les énormes profits des majors et médias tiennent sur le
monopole et la concentration. Or les centaines de milliers
d'indépendants qui surgissent d'un coup sur le net détruisent
monopoles et concentration. En plus, tous ces journalistes en
herbe qui montent leur propres sites-médias sur le net, non
seulement ils cassent le business mais en plus ils s'expriment
librement, sans tous les filtres et barrieres des gros medias
institutionnels au service de la pensée et des intérets
dominants. "Le danger d'intenret" comme a dit francoise giroud,
"c'est que n"import qui peut dire n'importe quoi". En effet un
danger pour les magouilleurs et les menteurs bien en place, mais
un bonheur et une chance pour les gens honnetes et la
démocratie.
Alors les gros businessmen qui aiment pas la liberté et la
gratuité vont présenter internet comme un repaire de "pédophiles
& nazis" et ils vont lacher leur flics de la pensée pour casser
la culture indépendante qui monte en puissance sur le net. L'uejf
et les assos antiracistes, chiens de garde du pouvoir, vont
s'attaquer à la liberté d'expression sur internet. 1) en
détruisant le droit de la prescription pour le net, ce qui
permet de réprimer sans limites. 2) en attaquant sur le fond
tout ce qui bouge et est pas "politiquement et moralement
correct.
Et qui c'est qui vont choisir pour faire un exemple? Le plus
extreme forcément, le plus remuant et le plus incontrolable et
sans concession : ... Costes!
Alors depuis 1997 j'ai subi quatre proces, 150000Frs de frais de
défense, une condamnation et la censure de mon site en décembre
2000, plus toutes sortes d'autres pressions (pression sur l'hebergeur
pour qu'il coupe mon site, pression sur mon distributeur de
disques pour qu'il stoppe de me distribuer, pressions sur des
salles de spectacles pour quelles annulent mes shows, pressions
sur les médais pour qu'ils fassent pas d'articles culturels sur
moi...)
11 LE MARTYRE UNIVERSEL
Finalement, je voulais pas l'art régler mes comptes avec une
société que je hais, régler mes comptes avec le pére qui frappe
et encule, et j'y suis arrivé! Desormais je ne crie plus seul
dans un micro dans un cave au fond d'une banlieue, ignoré de
tous. Je me bats, jusqu'a la mort et jusqu'au martyr final et la
gloire, contre l'etat et l'ordre moral par les armes de l'art,
les armes de l'esprit, et je me bats en pleine lumiere sur
internet (le fait que les medias étouffent l'affaire n'a aucune
importance car nous n'avons plus besoin des médias, merci, par
ici la sortie!)
Ma premiere cassette s'appellait "l'art c'est la guerre",
c'était alors symbolique, maintenant c'est la réalité : "l'art
c'est la guerre sur le net"!
J'ai fait la preuve que l'art n'est pas juste un truc de
branleur qui emmerde plus personne. Un branleur vraiment
branleur à mort peut faire trembler les pouvoirs, et prouver son
propre pouvoir.
LE PETIT BULLETIN (EDITION LYON)
MAi 2006
Papa... caca !
Il a vu la Vierge, passe le plus clair de son temps dans une cave, hurle des horreurs, en écrit, en chante et en filme. Provocateur à la petite semaine, opportuniste à deux balles, génie du marketing ou génie tout court ? Mais qui es-tu Jean-Louis Costes ? Dorotée Aznar
Quand on rencontre Jean-Louis Costes, on se dit
que sa réputation est un peu surfaite. Le performeur, musicien
et écrivain de 52 ans arrive à l'heure aux rendez-vous, sourit
poliment en rougissant légèrement quand on s'adresse à lui,
tient les portes aux jeunes filles et dit merci à la dame. Le
Roi du pipi-caca, le Prince du scato a des airs de gentil papa
timide qu'on aurait sorti de sa sieste pour un rendez-vous
impromptu avec son banquier. Oui, mais ça c'est ce qu'on se dit
avant. Avant de le voir sur la scène du Marché Gare, nu comme un
ténia, se couper les bras avec un couteau, tenter de sodomiser
un baigneur en plastique en hurlant "papa, encule-moi une
dernière fois, comme quand j'étais petit". Bien avant de le voir
faire pipi sur le public, essayer (en vain) de se masturber en
direct, se mettre une carotte dans l'anus et manger son caca...
La genèse
Faut pas croire, on ne devient pas Costes par hasard. Tout petit
déjà, Jean-Louis n'aime pas beaucoup les gens. Son enfance
s'écoule entre les meilleurs internats de la région parisienne
et une famille où l'on n'aime pas trop les contacts physiques :
"on ne se touchait pas, on ne s'embrassait pas... c'est resté.
En dehors des moments d'excitation, je suis "anti corps". Même
si mes shows semblent montrer le contraire, chez moi, tout se
passe dans la tête". Une tête qu'il a d'ailleurs plutôt pleine.
Bac en poche, le jeune Jean-Louis entreprend et termine des
études d'architecture. À cette époque, la musique est un hobby,
"je faisais du rock le samedi, comme un bourgeois normal". Le
problème de la musique, c'est les groupes, "ils me faisaient
tous chier", Jean-Louis fera donc de la musique tout seul. La
musique et le reste. "C'est triste quand même de n'avoir jamais
touché une fille à 25 ans.... j'étais mal barré...". Sûr.
Bête
à concours
Costes adore jouer au loser et n'est pas avare en anecdotes.
"Comme j'étais attardé, j'ai essayé d'être branché. En 1978, je
me suis dit : il faut être hippie. Je suis parti en Inde. Je
suis revenu avec le total look et même les tatouages. Mais quand
je suis rentré, mes potes étaient devenus punk pendant l'été.
Pour les meufs c'était foutu". Alors quitte à loser, Costes
travaille comme un acharné, enregistre des centaines de morceaux
et commence à créer des opéras porno-sociaux dès la fin des
années quatre-vingt. Architecte le jour, trashman la nuit, il ne
se dédie entièrement à l'art qu’à partir de 1997. Le reste de
l'histoire oscille entre le médiatiquement vendeur et le
médiatiquement très vendeur. Il habite Saint Denis, a déserté le
premier étage de sa maison pour s'installer à la cave. "Je pense
très sérieusement à murer les fenêtres avec des parpaings car la
lumière me distrait", explique-t-il. L'homme est assurément un
bon client et les éditeurs ont fini par flairer la bonne
aubaine. Fayard a dégainé le premier et un roman, Grand-Père,
est sorti il y a quelques mois, un autre est déjà en
préparation.
Saucissonade
"Il n'y a pas de message dans ce que je fais", affirme Costes.
Il déteste l'art engagé ou conceptuel : "je voudrais qu'on leur
coupe les subventions" mais admet au final que les "côtés
subtils de son travail sont difficiles à transmettre" et dit
ériger "la mauvaise foi en loi". La revue Cancer s'est un temps
fait l'écho de ses frasques. Imaginez. Costes a la bonne idée
d'écrire une chanson intitulée Tapette à bicot. Extraits choisis
: "on devrait coincer Blanchette tapette à bicots/le coincer
dans un coin à plusieurs et l'empaler sur un saucisson ce pédé à
bicot". Les tribunaux sont saisis et Costes doit répondre de
"provocation à des atteintes à la vie et à l'intégrité d'une
personne". Le soir de l'audience, Costes dévalise son épicier,
achète toutes les formes possibles de saucisson et "s'empale"
devant un témoin (médecin) avec lesdits aliments puis remet un
rapport détaillé à la justice. On peut y lire que "les sodomies
à la saucisse de Strasbourg et au saucisson sec sont bien
acceptées par son anus et ne constituent pas une atteinte à la
vie et à l'intégrité de la personne". Il est précisé qu'en
revanche, la sodomie au saucisson à l'ail "dont le diamètre
dépasse celui de l'anus" pourrait provoquer l'éclatement du
rectum et donc la mort. Conclusion : seule la sodomie au
saucisson à l'ail peut provoquer la mort ; Costes n'est pas
coupable. La mythologie est en marche. Bien malin qui démêlera
le vrai du faux. Celui qui ne se définit "ni comme musicien, ni
comme écrivain", accepte bien volontiers l'étiquette d'artiste.
Mais il refuse d'être taxé de provocateur. "Quand je fais un
show, je commence à l'heure et je fais au mieux. La provoc, ce
serait de faire payer les gens et de ne pas venir. Je ne donne
pas de leçons et ne suis qu'un pâle reflet de la réalité". Le
fou du roi n'a pas peur de mettre le nez dans son caca. Mais le
temps passe et les shows ne seront bientôt plus de son âge, il
s'agirait de penser à la reconversion. Écrivain pour enfants,
gourou, allez savoir. L'avènement du Grand Messie des crottes
est peut-être pour demain.
DOROTHE AZNAR
TECHNIKART
Costes, l'homme qui fait de la caricature une arme politique, peut-il décemment tout chanter ? Entretien avec un artiste qui dérange tout le monde. Même les défenseurs des libertés publiques.
par Anna Mori, 21 mars 2001
Es-tu raciste ?
Non, pas du tout.
Dans ce cas, pourquoi dis-tu dans tes chansons "Les nègros puent du cul, ils s'essuient jamais le cul" ?
Je parle de choses que j'entends et qui sont atroces. Je suis dans une culture imprégnée par le racisme. Mes chansons digèrent la réalité et la ressortent sous forme de satire.
Tes chansons sont satyriques ?
Mes chansons sont dramatiques parce qu'elles montrent la réalité nue, c'est à dire pitoyable… Je n'ai même pas besoin d'exagérer la réalité pour la rendre parodique. Ecoutez un raciste, ses propres paroles le ridiculisent, le rendent caricatural ! Alors je me contente de le citer, pour faire apparaitre la connerie humaine dans toute sa splendeur.
Penses-tu que les gens qui t'écoutent sont conscients du côté parodique ou critique de tes chansons ?
Les Renseignements Généraux ont classé mon public dans les "sympathisants d'extrème-gauche" : ce sont les milieux indépendants, proches des squatts, des anarchistes, de la CNT et des milieux autonomes. Bref, ce sont souvent des gens qui luttent contre les skins et les fachos…
Aucun " facho " n'écoute ta musique ou ne va à tes spectacles ?
Musicalement ou idéologiquement, je piétine leurs valeurs. Dans mes spectacles, je représente des skinheads à poil sur une scène en train de s'enculer avec le glaive de Mussoloni : ça ne fait pas rire l'extrème-droite !
Ne trouves-tu pas dangereux de mettre des chansons pareilles sur Internet ?
Ce n'est pas plus dangereux sur Internet que ailleurs. Mes chansons en soi sont tellement excessives et absurdes qu'elles en deviennent parodiques. Quant à mon site, il est lui-même explicitement provocateur et anti-conformiste… Impossible de le confondre avec un site néo-nazi !
Que penses-tu des fascistes ?
Si un parti d'extrème-droite prenait le pouvoir, j'en serai la première victime. Avant même que les nazis soient au pouvoir, les artistes "dégénérés" se faisaient casser la figure dans la rue. Les artistes sont les premières victimes des dictatures. D'ailleurs, je reçois des menaces de mort de l'extrème-droite à cause du disque "Livrez les Blanches aux bicots".
Pourquoi ?
Parce que dans l'introduction de ce disque consacré au racisme, je dis " Facho, Je t'encule. Ma bite dans ton cul c'est Stalingrad, c'est Berlin en ruines, c'est la fosse commune à Auschwitz, c'est Varsovie etc…". Je cite toutes les grosses défaites des nazis, toutes leurs raisons d'avoir honte. Ils n'aiment pas ça du tout ! (...) Sur mon répondeur, ils laissent des menaces du style : "t'aimes bien te faire enculer, tu vas recevoir une balle dans ton cul". C'est quand même un comble que pour le même disque je me fasse attaquer à la fois par les fascistes et par l'UEJF (Union des Etudiants Juifs de France, Ndlr) !
As-tu peur de l'extrème-droite ?
Ce n'est pas un groupuscule de folkloriques tyroliens qui va me faire du mal ! Le vrai danger ce n'est pas l'extrème-droite, c'est le pouvoir en place. Le vrai danger, c'est l'état, s'il remet en cause la liberté d'expression.
Sur quelles paroles précisément es-tu attaqué ?
L'UEJF attaque trois de mes chansons : "Les races puent", "Blanchette tapette à bicot" et "Apprenez le caniveau au bicots". Elles font partie d'un album "Livrez les blanches aux bicots", consacré au problème du racisme.
Pourquoi dis-tu : "les races puent" ?
On m'a appris à l'école qu'il n'y avait qu'une seule race : la race humaine. On m'a appris que la notion de "races" était scientifiquement fausse et idéologiquement douteuse. Dire qu'il y a des "races", ça pue.
Comment expliques-tu qu'on juge tes textes racistes ?
Bien qu'il soit prouvé que je ne suis en rien un militant neo-nazi mais un artiste qui représente le monde, bon ou mauvais, dans le cadre de fictions, l'UEJF et d'autres associations m'ont diabolisé sous prétexte que j'utilisais des gros mots. Pour mes adversaires, l'expression artistique doit avoir des limites, limites fixées par "le respect de la dignité humaine"...
Les actions judiciaires contre toi ont permis au FN de remettre en cause le droit de prescription sur Internet et d'attaquer le Réseau Voltaire. Qu'en penses-tu ?
L'UEJF et les autres associations savent pertinemment que je ne suis pas raciste. Mais ils ont réussi à faire tomber une prescription qui leur permettra à l'avenir d'attaquer tous les sites non politiquement corrects. Ce sont les fers de lance de la repression, les nouveaux prêtres de l'ordre moral. Au nom d'un combat abstrait pour le bien commun, ils limitent très concrètement nos libertés individuelles. Peu leur importe que cela encourage l'extrème-droite à attaquer des sites anti-racistes…
L'art doit-il avoir une limite ? Celle imposée par la prudence vis à vis d'auditeurs crédules qui pourraient mal comprendre tes paroles...
C'est le
grand dada des réactionaires : pour eux, l'art corrompt l'âme.
La représentation du mal peut contaminer les esprits… L'UEJF se
situe en droite ligne de tous les curés répressifs de
l'histoire ! Ceux qui voudraient mettre Sade ou Voltaire au
bucher… Ceux qui nient l'existence d'un espace symbolique où
l'on peut manier l'humour, l'excès et la dérision…
NOUVEL OBSERVATEUR
MAI 2006
Jean-Louis Costes : Paria la provoc
Cet artiste déjantéet polymorphe sortun fabuleux roman, “Grand-père”, dontil
assure la promotion à l’occasion de son show “I Love Hate”. Voyage au pays de
son Saint-Denis destroy.
Liste de mariage
« Au bord du canal Saint-Denis et juste en face du Stade de France. C’est le site historique de l’orfèvrerie Christofle.Un musée magnifique tout en briques rouges. A l’intérieur, un lit fabriqué pour un maharaja avec 4 femmes nues argentées qui s’animent ! »
Orfèvrerie Christofle, 112, rue Ambroise-Croizat, Saint-Denis (93) ; 01-49-22-40-40.
Ravitaillement
« C’est mon centre de
ravitaillement. Y’a de la morue séchée, des olives piquantes, des fromagesde
brebis et du chorizo. Avec 10 € , tu manges pour trois jours. »
Aux délices du Portugal, 9, place du square-de-Geyter, Saint-Denis (93) ;
01-49-22-00-91.
Service de nuit
« Chez Momo, tu peux acheter des saucisses ou des merguez-frites toute la nuit. C’est le rendez-vous de tous les prolos, qui travaillent dans les imprimeries de “Libération“, du “Parisien“ ou de “Métro“, et des mecs qui livrent les journaux. »
chez Momo, 72, rue Ambroise-Croizat, Saint-Denis (93). Ouvert toutes les nuits, camion en facede l’imprimerie CIPP.
Une vie de squatteur parisien. Comme qui dirait une vie de chien. ç a démarre dans l’underground du Paname des années quatre-vingt. Au squat des Vilains, à Ménilmuche, dans le 20 e , Costes côtoie les Bérurier noir, « c’était mes voisins du dessous », mais doit aussi cohabiter avec les clochards et les voyous politisés « des mecs qui pillaient les petits commerces arabes ou les apparts des petits vieux d’à côté, et venaient ensuite te donner des leçons de morale politique. » Pas vraiment intégré à la communauté squartistique – « j’ai été lourdé parce que je faisais de la musique trop zarbie » – Jean-Louis-le-paria décide de migrer en 1989 dans le 9-3. Sur les bords du canal Saint-Denis où il vit aujourd’hui, il rachète un taudis, squatté par des dealers.
Seul petit Blanc au milieu de voisins haïtiens, Costes découvre le vaudou et plonge dans la transe artistique. Enfermé depuis plus de quinze ans dans sa cave-bunker, il y produit ses CD, filme des courts métrages hardcore, ou y compose sa prose illuminée. « Pour “Grand-Père”, mon premier roman, je me suis barricadé là pendant plus de six semaines, sans voir le jour. Ma femme me passait de la nourriture par la lucarne. »
A l’étage au-dessus, sa maison est toujours un immense chantier. On ne peut franchir la porte qu’après s’être cogné à la barre d’échafaudage. « Je refais la façade, dix mois que ça dure. » Au rez-de-chaussée, un local où l’on croise une poupée gonflable décapitée, un Gaulois en bois, des éclaboussures de (faux ?) sang sur les murs et une porte qui ne donne sur rien. « C’est le décor de mon dernier spectacle “I Love Hate”. » A côté, ce qu’il appelle son bureau, soit un Mac fatigué, un arbre en pot – « je ne voulais pas qu’il attrape froid l’hiver » – un sac en polystyrène et un matelas douteux où le performer dort pour ne pas réveiller Martine (sa femme) et sa fille les nuits où il rentre de ses tournées. Dans le jardin, au milieu des gravats et des sacs Leader Price, « Protégeons la nature » , sèchent une rangée de slips bleus et un tee-shirt « Prout ».
Ancien architecte (école de La Villette), Costes s’en prend à la politique de rénovation urbaine menée à Saint-Denis : « Ici, on rase tout, puis on fait de la spéculation immobilière sous couvert de logement social. » Les services sociaux n’échappent pas à son courroux : « Tous les mardis, ils font grève !» Apparemment, le dialogue entre Jean-Louis et sa commune n’est pas encore au top.
Jean-Louis Costes Vs Marcel Proust
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Parce qu'il ne passera jamais chez Bernard Pivot...
Parce qu'il a dit que l'art c'est la guerre...
Parce qu'il ose être un grand écrivain....
Parce que sa prose ne risque pas d'être au
programme scolaire de son vivant...
Parce qu'il est malade et que l'autre est mort...
Parce qu'il est vaginal et que l'autre est anal...
parce qu'il est présent et que l'autre est éternel
Parce qu'il s'en fout...
tous les autres ne faisant pas le poid,
Jean-louis costes en sortant son premier roman "grand-père"
sort donc par la même occasion de sa cave pour affronter Marcel Proust
dans un salon !
Marcel offensé choisit comme arme son fameux questionnaire snob ...
Assistons maintenant au combat de l'étron contre la madeleine,
de la cuvette des chiottes contre la tasse de thé,
de l'underground contre le classicisme ...
Vas y Costes!
Le principal trait de mon caractère
Jean-louis Costes: Stressé
Marcel Proust:Le besoin d'être aimé et, pour préciser,
le besoin d'être caressé et gâté bien plus que le besoin d'être admiré.
La qualité que je désire chez un homme
Jean-louis Costes: Le travail
Marcel Proust:Des charmes féminins
La qualité que je désire chez une femme
Jean-louis Costes: Son cul
Marcel Proust:Des vertus d'homme et la franchise
dans la camaraderie
Ce que j'apprécie le plus chez mes amis
Jean-louis Costes: Je n'ai pas d'amis
Marcel Proust: D'être tendre pour moi, si leur personne est assez exquise
pour donner un grand prix à leur tendresse.
Mon principal défaut
Jean-louis Costes: j'ai tous les defauts
Marcel Proust: Ne pas savoir, ne pas pouvoir " vouloir ".
Mon occupation préférée
Jean-louis Costes: travailler
Marcel Proust: Aimer.
Mon rêve de bonheur
Jean-louis Costes: la gloire
Marcel Proust: J'ai peur qu'il ne soit pas assez élevé, je n'ose pas le dire,
j'ai peur de le détruire en le disant.
Quel serait mon plus grand malheur
Jean-louis Costes: pourrir dans l'hopital bureaucratique
Marcel Proust: Ne pas avoir connu ma mère ni ma grand-mère.
Ce que je voudrais être
Jean-louis Costes: moi en mieux
Marcel Proust: Moi, comme les gens que j'admire me voudraient.
Le pays où je désirerais vivre
Jean-louis Costes: le désert ou la jungle
Marcel Proust: Celui où certaines choses que je voudrais se réaliseraient comme
par un enchantement et où les tendresses seraient toujours partagées.
La couleur que je préfère
Jean-louis Costes: toutes les couleurs
Marcel Proust: La beauté n'est pas dans les couleurs, mais dans leur harmonie.
La fleur que j'aime
Jean-louis Costes: toutes les plantes
Marcel Proust: La sienne- et après, toutes.
L'oiseau que je préfère
Jean-louis Costes: tous les animaux
Marcel Proust: L'hirondelle.
Mes auteurs favoris en prose
Jean-louis Costes: Costes
Marcel Proust: Aujourd'hui Anatole France et Pierre Loti.
Mes poètes préférés
Jean-louis Costes: ???
Marcel Proust: Baudelaire et Alfred de Vigny.
Mes héros dans la fiction
Jean-louis Costes: Moi dans mes rêves
Marcel Proust: Hamlet.
Mes héroïnes favorites dans la fiction
Jean-louis Costes :Leurs culs dans mes rêves
Marcel Proust: Bérénice.
Mes compositeurs préférés
Jean-louis Costes:Costes
Marcel Proust: Beethoven, Wagner, Schumann.
Mes peintres favoris
Jean-louis Costes:Anne Van der Linden
Marcel Proust: Léonard de Vinci, Rembrandt.
Mes héros dans la vie réelle
Jean-louis Costes :Moi en mieux
Marcel Proust:M. Darlu, M. Boutroux.
Ce que je déteste par-dessus tout
Jean-louis Costes :Moi en pire
Marcel Proust: Ce qu'il y a de mal en moi.
Le don de la nature que je voudrais avoir
Jean-louis Costes :L'optimisme
Marcel Proust: La volonté, et des séductions.
Comment j'aimerais mourir
Jean-louis Costes: Assassiné
Marcel Proust: Meilleur - et aimé.
Etat présent de mon esprit
Jean-louis Costes:Bof...
Marcel Proust:L'ennui d'avoir pensé à moi pour répondre à toutes ces questions.
Fautes qui m'inspirent le plus d'indulgence
Jean-louis Costes :La partouze
Marcel Proust: Celles que je comprends.
Ma devise
Jean-louis Costes : Seul contre tous
Marcel Proust: J'aurais trop peur qu'elle ne me porte malheur.
Interruption du combat par l'arbitre !
Marcel ! tu as triché! tu es disqualifié !
Le combat est truqué!
Jean-Louis Costes est déclaré vainqueur!
Et tu oses demander pourquoi !
Bernard Pivot nous a religieusement refait entendre ton questionnaire
semaine après semaine et année après année, dans ses émissions (dé)littéraires,
Apostrophes, puis Bouillon de culture...
En Amérique, qui ne connaît pas la reprise de ton fameux questionnaire par
le talk show américains de James Lipton, Inside the Actor's studio ?
Que dire encore de la dernière page du fashion magazine Vanity Fair
de notre Express et sans doute bien d'autres revues et magazines de par
l'immonde ?
Alors que ton histoire on la connaît...
Tu as acheté ce questionnaire qui porte ton nom en 1884 à la librairie
anglaise Galignani de la Rue de Rivoli, c'était "An Album to Record Thoughts,
Feelings, &c" (un album pour garder pensées, sentiments,)
d'où les questions en anglais. Tu avais 13 ans et tu l'a rempli pour
l'anniversaire d'une certaine Antoinette Faure
( fille du futur président félix faure)l'amour de ta vie à l'époque
qui se foutait bien de ta gueule...
Tu voulais quoi ? Montrer quel petit homme cultivé et sensible tu étais ?
Que tu étais branchouille parce qu'a cette époque aussi la mode venait
d'Angleterre?
Costes se fout de la mode et passe pour un Miso de première et pourtant
tout le monde sait qu'il nique autre-chose que sa mère !
Tu aurais pu prendre Costes à la loyal sur le style, ta connotation Proustienne,
le sensualisme, la dilation du temps,la réthorique et que sais-je?
bref sur des armes littéraire!
Mais toi,tu l'attaques sous la ceinture...Et on avait dit pas de coups bas!
Mais t'as quoi à prouver?
La vérité est que tu t'es pris un rateau par Antoinette,
une petite gamine gatée de la haute
et que depuis tu nous imposes en ton nom un vulgaire jeu de société
pour jeunes filles de bonnes familles victoriennes!Un jeu qui est devenu
une tradition de salon et qui désormais passe pour le summum de l'esprit
français!
Le pire c'est que tu as persisté dans le vice et que tu as recidivé au point que
l'on a retrouvé
Un manuscrit de tes réponses qui date de 1890 soit 6 ans après ces faits plus
que regretable.
Oui parfaitement, on l'a retrouver en 1924 ,il est intitulé Marcel Proust par
lui même...
Il a été vendu au enchère le 27 mai 2003 pour la somme de 102 000 euros!
Les preuves sont accablantes Marcel et tu as de la chance d'être mort, de t'être
repenti
en devenant homosexuel et surtout d'être comme jean-louis Costes, un grand
écrivain!
Tu resteras tant que je vivrais dans l'olympe de ma mythologie personnelle
mais il va falloir que tu acceptes Costes à l'heure du thé.
Tu as perdu parce que Costes lui ne triche pas...
Bravo Costes pour ton courage sans lui
je n'aurais pas pu édifier les masses...
Merci à Jean-Louis Costes him-self D'avoir Répondu à ce questionnaire de
Prout...
Stanislas kazal
Je parie que Marcel Proust n'en restera pas là...
En attendant retrouvez Marcel Proust partout et en particulier à la bibliothèque
municipale,
au cdi de votre bahut ou chez votre grand mère!
Aout 2006
Jean-Louis COSTES, le provocateur-né
Costes en général
A: Pourrais nous faire une présentation de toi et de ton parcours en tant qu’artiste, et de ton passé artistique pre-Costes tel qu’on le connaît ?
J’ai commencé par jouer de la basse et des claviers dans des groupes de rock
amateurs. Puis, insatisfait par le travail en groupe, dans les années 80, je me
suis construit un home studio où j’enregistrais seul des musiques bizarres, puis
des chansons mélangeant pop-rock et bruitisme industriel. J’ai sorti un premier
disque en 1986 ("Secouez…crevez !") et commencé à tourner avec des opéras
pornos-sociaux à partir de 1988. J’ai aussi réalisé des films à partir de 1991,
et écrit régulièrement pour mon site internet et des revues indépendantes depuis
1997. En 2006, j’ai publié un roman (Grand Père) chez Fayard.
A: Comment est le Jean-Louis Costes de tous les jours ?
Chiant. Je bouffe, je dors et je bosse sans arrêt. Ma vie privée n’a rien d’excitant. Elle n’a pas grand chose à voir avec le chaos et la folie de mon œuvre. Finalement, pour créer du chaos, il faut être organisé ! Mais j’ai quand même un coté aventureux. De temps en temps je lâche tout et je me casse au fond de l’Afrique ou de l’Amazonie. Seul au milieu des bêtes sauvages, je me sens mieux qu’avec les hommes qui me font chier.
A: Comment définirais-tu ton travail d’une manière générale, que ce soit la musique, la littérature, et tes shows, il y a une unité, comment présenterais-tu ton travail à quelqu’un qui ne le connaît pas ?
Vomir, chier, crier, c’est la base de tout. Transformer la haine, la frustration, l’angoisse en plaisir par la magie de l’art
A: Tes travaux artistiques sous
le nom de COSTES, toutes formes confondues, te permettent-ils de vivre ? Comment
vis-tu sinon, es-tu impliqué par ailleurs dans l’art ?
Jusqu’en 1998, je devais travailler pour financer ma musique. Depuis, j’arrive à
survivre sans travailler, mais je vis comme un clodo. Pas d’eau chaude, pas de
chauffage, pas de frigo, pas de télé, un seul slip et deux chaussettes. Mais la
richesse est mentale et je vis mieux sans le merdier matériel.
A: La démarche de tes travaux tourne autour du corps, et du rapport au corps,
en cela te sens-tu proche de cette fraction de l’art contemporain très axé sur
le corps vécu?
Je hais à priori l’art contemporain. Je déteste le concept préalable à l’œuvre,
je déteste les manifestes, les discours, les théories, et je crache sur les
subventions. Tous les artistes contemporains sont des sales putes molles, à
peine capable de sucer le ministre ou le maire et incapables de se faire enculer
bien profond par un rebeu à Pigalle.
Il n’y a pas de différence entre
le corps et l’esprit. Je suis un esprit prisonnier d’un corps qui triture sa
queue en geignant. Et pas une pauvre pute de l’art contemporain qui « travaille
sur le corps » comme si son esprit était un robot extérieur à lui-même, un PC
poussif qui joue des films de cul .
A: Le sexe, la scatophilie, l’homosexualité, la
pédophilie (subie), la frustration sont des thèmes récurrents de tes travaux ?
Ces thèmes et tous les autres. Manger du pain et des yaourts aussi est récurrent dans mon œuvre. C’est l’homme qui est récurrent. Bouffer, baiser, tuer, crever. C’est toujours le même truc depuis des millions d’années. Je suis récurrent comme le chimpanzé.
A: Qui sont les adeptes de Costes d’une part? Et qui pourrait représenter la relève ou la continuité de tes travaux d'autre part?
L’adepte type de Costes est le traître. Celui qui ne se sent pas tout à fait à sa place dans son groupe et le trahit en écoutant Costes au casque en secret dans sa piaule en se branlant. C’est le branleur, c’est le frustré, c’est le mal-looké. C’est celui qui baise pas, c’est celle qui a mal quand on la baise. Ce sont les loosers d’aujourd’hui mais les gagnants du futur. Aujourd’hui on rit de Costes et des Costiens mais vient le temps où ils seront la norme morale et esthétique.
Beaucoup de gens semblent inspirés par moi, tant en musique qu'en théâtre; Mais leur rage intérieure n’est pas la même. La vraie relève sera celui qui fera tout le contraire de ce que je fais. Il fera quelque chose d’inouï, d’inadmissible, de nul. Il commencera en bas et finira en haut. Il fera de Costes un ringard et l’enterrera
A: De quelles mouvances te sens-tu proche ou as-tu été
proche (sens large : spirituel, politique, philosophique, artistique, etc)
Je suis totalement asocial. Je hais les groupes. Dès qu’il y a trois personnes dans une pièce, je fuis ou j’agresse. Je peux supporter deux personnes, à condition que la deuxième soit une fille facile à sauter et que j’ai envie de baiser. Alors me parlez pas de mouvances, de mouvements, de partis, de bandes de potes. J’aimerais les descendre tous dans un vrai jeu vidéo.
Costes et la musique:
A: Doit-on voir ta musique comme en avant tout des «
sketchs », car on n’a pas là de la musique au sens courant du terme ? Comment
présenterais-tu tes travaux musicaux ? Quelles seraient tes influences ?
Ma musique est vraiment de la musique et pas juste des bruitages de dessin
animé. Mais c’est vrai que ma musique est visuelle. Toutes les musiques qui me
plaisent doivent être visuelles, charrier des flots d’images. J’écoute, je ferme
les yeux et je vois des batailles, des cadavres, des orgies et des enfants qui
dansent sur les morts. Je joue de la musique et je vois encore des orgies de
morts vivants. Alors sur scène, je danse comme un mort vivant. Ceux qui croient
que c’est d’abord du texte et de l’action et que la musique est secondaire se
trompent. La musique est le fondement de toute mon œuvre. Coupez le son, et
j’arrête de bouger, de jouer, de crier, de chanter. C’est la musique qui fout en
transe et transporte dans les mondes imaginaires plus réels que le faux réel.
A: Pourrait-on faire un tour d’horizon de ta
discographie et des différentes thématiques dominantes de chaque album ?
Tu as fait un album très axé « racailles », comment faut-il le percevoir, surtout dans un contexte très actuel ?
Souvent mes albums ont des thèmes. Parce que, à chaque période de ma vie, un
stress domine et m’inspire. que ca soit un CD sur une salope qui m’a jetté, ou
bien un CD sur des racailles du quartier qui me font chier. Ca ne veut pas dire
que je passe mon temps à haïr les filles ou à crever de trouille face aux gangs.
Ca veut juste dire que le jour où j’ai fait cette chanson, j’étais amoureux
malheureux ou sous-blanc persécuté. Mais demain je serai peut-être male blanc
dominant.
A: L’album « œuvre au noir » est défini comme du «
false death metal », il était même présenté par le label lors de la promotion
comme une rencontre de Costes et du black metal ? Comment est né ce projet ?
Parles-nous de cette collaboration avec Amortout ?
J’aime l’intensité mentale et tripale du black metal. J’en ai pas mal écouté
avant de faire ce CD. Pour moi, « Œuvre au noir » est vraiment black metal, car
je suis dans l’esprit de cette musique. Mais évidemment, pour les puristes du
style, mon synthé casio avec une pédale distorsion remplacera jamais une bonne
grosse gratte !
A: On sent parfois une certaine ironie par rapport à cet univers « dark »,
dans le cd mais aussi dans ton show « I love hate », tu évoques même à un moment
les « soirées gothiques », lol ? Quel est ton rapport aux scènes dark (black
metal, gothic, etc…) ?
J’ironise sur tout et d’abord sur moi même. Mais en vrai j’aime énormément
certains aspect du gothique. Evidemment, le coté mode et look me fait chier.
Mais j’y vois aussi une fascination pour le passé tribal et un authentique
retour vers lui. Il y a une fulgurance dans le gothique et une profondeur qui
défoncent toutes les idéologies du 20ème siècle prétendant construire l’homme
nouveau. Le gothique ne croit pas à la révolution et se fout de la réforme. Il
va chercher dans le passé le plus lointain la source de vérité et d’inspiration
pour le futur. Et là, je suis gothique. Et même plus, je suis singe. Pour moi,
le costume gothique ultime, c’est la peau de bête.
A: Connais-tu Eros Necropsique, une formation gothique
dark, très centré sur le corps, avec une approche aussi bien poétique, que des
connotations scatophiles, le groupe a d’ailleurs eu à ses débuts des procès pour
atteinte aux bonnes mœurs ?
Non, mais rien qu’à entendre ta
description, je veux les connaître tout de suite !
K: T'intéresses-tu au métal ? Connais-tu les libidineux
RockBitch, ou les tarés de Gwar? Si oui, qu'en penses-tu?
J’aime certains riffs et
rythmes, mais le coté farce superficielle me fait chier. Je préfère de loin le
black metal ou le gothique. Je préfère le drame à la farce.
K: Globalement, combien as-tu vendu de copies de tes
productions
Environ 30.000 par moi même depuis 1986. Pour les autres labels qui ont vendu des trucs de moi, je ne sais pas trop (en général ils tirent 500 ou 1000 copies d’un disque) Et Fayard a vendu pour le moment 10000 copies du roman « Grand Père ».
K: Tu es relativement connu au Japon : comment
expliques-tu cela? Peut-être leur besoin de sentir le goût de la décadence ?
Il y a des gens qui m’apprécient dans tous les pays où existe une scène
indépendante. Essentiellement, Europe, Amérique du nord, Japon. Je ne sais pas
si les motivations des japonais fans de Costes sont vraiment différentes des
fans d’autres pays ? Je crois que quand on m’apprécie, c’est plus au niveau
individuel que collectif. C’est plus l’individu universel qui est touché que le
citoyen national.
K: Quel matériel utilises-tu pour enregistrer ta
musique?
Je mélange techniques analogiques et numériques. J’enregistre sur un mac avec
cubase, mais peut repasser sur un magnétophone à bandes ponctuellement pour
rendre le son plus chaud et utiliser le variateur de vitesse analogique. J’ai un
piano, une basse, une guitare et divers claviers, un sampler, une boite à
rythme, et des casseroles. Divers micros que j’utilise souvent simultanément
pour grossir la voix. Et des racks d’effets.
A: Quel est ton public ? Quel genre de personnes le
compose ?
D’après ce que je vois dans les concerts, ce sont des gens entre 18 et 35 ans,
venant de milieux créatifs ou curieux de ce qui se passe de nouveau. Des gens
qui apprécient l’implication physique et mentale de l’artiste dans son oeuvre.
Des gens qui se sentent proches de moi, de mes thèmes, de la manière de les
aborder. Des gens qui aiment voir des queues, des culs et des chattes. Des gens
qui aiment rire et pleurer. Voir et entendre. Des gens qui aiment en prendre
plein les yeux et la tête. Des gens intenses. Des gens gentils capables de tuer.
Des gens tolérants qu’il faut pas faire chier. Des gens bien quoi ! Si toute la
société était comme les milieux indépendants (travail + passion), tout irait
mieux.
Costes et ses Show porno sociaux:
A: Je te laisse nous présenter ton nouveau show « I love hate ». Quel est le
cycle de vie d’un show ? Dans « I love hate », on retrouve des clins d’oeils à «
Grand père » non ?
« I
love Hate » est un one-man-show.
De la musique entre mélodie et noise, des chansons et des
actions. C’est l’histoire d’un mec qui attend anxieusement une fille. Elle finit
par arriver mais il débande, et tout merde de pire en pire…
Un spectacle tourne en général un an en Europe puis 3 mois aux USA. A chaque tournée, je présente un spectacle complètement différent, nouvelle histoire et nouvelles musiques. En général on est trois ou quatre sur scène. C’est exceptionnel que je joue seul.
Oui, la fin du show a un lien avec le roman « Grand Père » : Le branleur moderne trouve son salut auprès d’un guerrier du passé…
A: Est-ce que tu as eu à souffrir de plaintes à cause de tes shows? Comment
expliques-tu les accusations d’antisémitisme, apparemment il y a quelques années
à Genève ?
J’ai eu des procès à cause de mes CDs, mais jamais à cause de mes shows. On m’a
accusé de racisme à cause de paroles de chansons crues où je rentrais dans la
tête d’un raciste. Certaines personnes confondent, ou plutôt font semblant de
confondre la fiction et la réalité. J’ai eu un spectacle annulé à Genève en 1998
à cause d’un article de presse malhonnête qui me présentait comme… un groupe de
rock skin-head d’extrême-droite ! ! !
K: Tes tendances homo et scato ne sont-elles pas
dépassées, alors que Internet l'offre abondamment dans ses pages
Je vois pas en quoi des fantasmes pourraient être dépassés ? Est-ce parce qu’un
chimpanzé a rêvé de se faire enculer la crotte à la préhistoire qu’on ne peut
plus rêver de se faire enculer la crotte sur MSN ?
K: Que penses-tu du satanisme? Penses-tu le mettre en
scène?
Je n’ai pas de fascination particulière pour le Mal, la violence, et Satan. Ca
m’intéresse, mais la recette du couscous aussi m’intéresse
A: Quel est ton rapport d’une part aux religions et
d’autres part à la spiritualité ? Quelle serait la « philosophie » de Jean-Louis
Costes ?
Le catholicisme me fascine parce que j’y trouve le vieux paganisme sous le
vernis chrétien. Mais je ne peux pas dire que j’ai la foi. J’aime avant tout le
rituel.
Ma philosophie pourrait se résumer à cette devise « Meurs sans regrets ». C’est
gravé sur un mur de la cathédrale de Toulouse.
A: Le déroulement de tes shows est-il prévu à l'avance ou l’improvisation est
elle totale?
Les bases sont travaillées très précisément, mais c’est l’interprétation qui
change tout. Je répète quotidiennement, très calmement. Mais une fois sur scène,
je suis pris d’une transe hystérique, tout devient chaotique et je surfe sur la
folie
A: Lors du show auquel j’ai assisté, j’ai senti une part d’improvisation et
une interaction entre le public et toi ? Le public peut-il devenir acteur ? En
même temps je sens une grande maîtrise générale ? Tes shows ont-ils évolué avec
le temps dans leur forme et au niveau improvisation ?
Depuis 1988, les ingrédients de base de mes shows sont présents : scénario et
musique, chansons et actions. Simplement aujourd’hui je maîtrise mieux le temps
: les spectacles sont plus longs et mieux découpés, plus sophistiqués.
Oui le public peut monter sur
scène s’il le désire et participer à l’action. Ca arrive souvent.
A: Quel genre de préparation mentale et physique te demande ces shows ?
Le stress est la meilleure préparation. Il me fait trembler les cuisses et me
muscle. Il me fait compresser le cerveau et ça pète grave en montant sur scène.
T: Toi qui est passé chez Ardisson, que penses-tu de ce "socialo-royaliste" ?
J’aime beaucoup Thierry Ardisson. Je n’oublie pas que la première fois que j’ai
joué à Paris en 1989, il était présent. C’est quelqu’un qui connaît bien et aime
l’art underground.
T: Acceptes-tu d'être classé comme un "provocateur" ?
Non. Je ne me fous pas de la gueule du public. Je joue à l’heure, je me donne un
maximum. Je fais ce que je crois nécessaire, ce que je ressens. On vit dans un
monde tellement mou et médiocre que créer intensément et se donner à fond est
ressenti par certains comme une indécente, insupportable provocation !
T: Quels sont les provocateurs passés ou actuels (s'ils
en reste réellement…) qui ont grâce a tes yeux?
J’aime tous ceux qui sont montés nus et liés sur leur propre échafaud.
A: La provocation semble avoir été récupérée par le système, il semble que la
provocation soit stéréotypée. Il me semble que tu as bien réussi à ne pas tomber
dans le piège du provocateur récupéré.
Ca m’a été facile puisque je ne me rends pas compte que mon œuvre est
provocatrice ! Comme la femme fatale, je comprends pas pourquoi on me hait !
A: Il semblerait qu’il resterait aujourd’hui toujours
un domaine sensible, avec tout ce qui est en rapport à la seconde guerre
mondiale par exemple, qui resterait tabou, les tabous sexuels étant tombés ?
Qu’en penses-tu ?
Tout à fait d’accord. On peut s’enculer et se pendre par les couilles sur scène,
pas de problème. Que les gens intelligents s’autodétruisent ne dérange pas les
pouvoirs en place. Par contre, le sens dérange : S’enculer en criant « Heil
Hilter ! » ou bien se pendre par les couilles en braillant « Mort aux… ! »,
c’est risquer de se prendre directement une balle dans la tête. Il y a des mots
tabous, il y a une Loi, et gare à celui qui la transgresse.
Costes romancier:
A: Pourrais-tu nous présenter ton dernier roman « Grand
Père »?
C’est un roman d’aventures trash et mystique. L’histoire d’un homme né en Russie
en 1900 qui se retrouve happé par toutes les grandes tragédies du 20ème siècle.
Il est cosaque contre les bolcheviques en 1917, puis légionnaire pour la France
en Afrique dans les années 20, puis bagnard en Amazonie dans les années 30, et
enfin collabo et magouilleur du marché noir pendant la guerre de 39-45… Il
finira minablement sa vie bourré devant la télé à jouer au tiercé. C’est
l’histoire de la mort des héros qui ont survécu à toutes les guerres mais furent
bouffé à petit feu par la modernité de merde.
T: "Grand Père" est, à n'en pas douter, tiré de faits
réels sur ton ancêtre… Si oui, es-tu fier de lui? Est-ce lui qui te pousse à
être un provocateur social?
Je me suis inspiré de mon grand-père qui fut vraiment cosaque, légionnaire et
bagnard. Mais j’ai inventé tous les détails de l’histoire car il ne m’a jamais
parlé de son passé de tueur.
T: Cette histoire se complait dans l'inversion des
valeurs morales et l'adulation de la crasse humaine. Les cosaques, les bagnards
ou les légionnaires sont-ils des objets de fascination pour toi? Ou au
contraire, un repoussoir?
L’humanité est crasseuse de nature. L’humanité n’est qu’un slip cacateux sur le
cul d’un singe. La vie est fondamentalement meurtre et viol. Les valeurs morales
sont des leurres pour piéger, exploiter et bouffer tout crus les naïfs.
Oui je suis fasciné par les cosaques, les légionnaires et les bagnards. Je suis un marginal frustré qui n’a jamais réglé ses comptes à coups de couteau et s’est contenté de pleurnicher. J’envie et j’admire les désespérés qui tuent avant de crever
T: Ta plume est alerte, vivante et parfois très fleurie ! Quels auteurs
célèbres ont nourri tes lectures d'enfance et t'ont donné envie d'écrire ?
Céline, par exemple?
J’écris en flux continu tout ce qui me passe par la tête, sans relire, sans
corriger, sans censurer. Ce qui fait que la vivacité magique de la pensée
reptilienne habite mon livre. Ce n’est pas moi qui écrit, mais la bête cachée en
moi, et elle est particulièrement vive et cruelle.
Bien que j’ai beaucoup lu, ce ne sont pas les écrivains mais la vie qui
influence mon œuvre.
A: « Grand Père » n’est pas ton premier roman, pourrais-tu nous présenter le
précédent roman?
En 2003, j’ai publié un premier roman aux éditions Hermaphrodite : « Viva la
merda ». C’est un road-roman trash et scato. L’histoire d’un couple qui sombre
presque malgré lui dans la pire scatologie puis le crime.
T: Et quel style de lecture as-tu aujourd'hui? Quel auteur a grâce à tes
yeux? Un Houellelbecq, peut-être?
J’ai beaucoup aimé « Les particules élémentaires » de Houellebecq. Mais je lis
très peu actuellement car trop occupé à créer.
T: Qu'est-ce qui a pu séduire Fayard quand tu leur as présenté un roman si
déjanté?
Le directeur éditorial de Fayard, Raphaël Sorin, est un grand passionné de
littérature. Il suit tous les nouveaux auteurs qui apparaissent sur internet ou
dans les fanzines. Il a aimé les nouvelles que je publiais sur mon site web et
m’a proposé d’écrire un roman dans ce style pour Fayard.
T: Le livre " Grand Père " se vend-t-il bien, à la hauteur de tes espérances?
« Grand Père » se vend très bien pour un premier roman. Il a d’ailleurs été
ré-édité à peine un mois et demi après sa sortie, et continue à se vendre
régulièrement. Il est 13ème des ventes de littérature française dans le
classement de fnac.com.
T: Finalement, qu'est ce qui fait courir Costes ? En
d'autres termes, ton action répond surtout à quel mobile ? Altruiste (Réveiller
le monde bien-pensant) ou oedipien (exprimer des frustrations intimes
refoulées)???
Je ne suis pas altruiste. Je suis le pire des égoïstes. Beaucoup expliquent mon
œuvre par des théorioes pseudo-freudiennes à deux balles. Ce que je fais est
simplement l’art d’aujourd’hui, l’expression d’un individu qui se débat dans le
monde du luxe diabolique et de la misère mentale. Ce sait que je fais de l’Art
mais je ne sais pas pourquoi je le fais. Chaque jour je veux arrêter mais je
continue. C’est une malédiction, une faiblesse, un péché… ou bien une mission
divine que j’accomplis du mieux que je peux
A: A travers la provocation quel serait ton message, que cherches-tu à
exprimer ? Le côté décadent mis en scène est-il là pour délivrer un message plus
général?
Je n’ai aucun message, aucune esthétique et aucun concept préalable à la
création. L’Art n’est pas la poubelle de la pensée où on jette les sandwichs
socialistes-libéraux avariés. L’Art est un Mystère qui révèle. Et révéler de
grands Mystères peut être une terrible provocation.
Caca Bouffe Sexe et Gros Mots, c'est fini ou ça reviendra ?
Le scénario et la
réalisation d‘Alice ont été faits avec Darline Monfort qui est aussi l’actrice
principale. C est son influence qui m’a éloigné de mon style habituel. J’ai
essayé de comprendre le personnage qu’elle interprète et de rendre son trip le
mieux possible. C est l’histoire dune fille d’aujourd’hui qui vit par sms une
histoire d amour ultraromantique. C est une histoire de fille, pas de mec. Je
suis rentré dans la tête d une fille de 18 ans.
Qu'est-ce qui t'a donné envie de faire ce film si différent des
autres ?
On a commence a
travailler un scénario avec Darline pour un court-métrage. Quand on a commencé à
axer l’histoire sur les sms, ça devenait tellement passionnant qu on en a fait
un long métrage.
On a passé trois semaines sans dormir et sans sortir d’une piaule, à bosser jour
et nuit sur le scénario car on a compris qu’on tenait un truc trop excellent. Et
on a mis le maximum de nos moyens matos temps et fric pour le faire le mieux
possible.
As-tu un portable ?
Oui et je reçois
souvent des sms de filles qui me branchent amour et cul. Les sms comme le mail,
les filles adorent. Ca leur permet de se lâcher et de tester les mecs
tranquillement. Et c est l amour virtuel, beau comme un rêve de prince charmant.
Irréversible, tu penses vraiment que c'est un film commercial ?
Des acteurs
commerciaux pour rentabiliser un film pas commercial dans sa conception. Un
pacte avec le diable.
Article LA CHAIR ET LA CROIX dimanche 9 avril 2006, p. 11
Livre ouvert
Une fois qu'il eut peint une pipe, Magritte s'empressa de contredire son chromo par cette « légende » désormais fameuse : « Ceci n'est pas une pipe. » Figure centrale de l'underground européen, Jean-Louis Costes n'a cure, je l'imagine, d'inscrire ses désossages dans la tradition artistique, qu'elle soit surréaliste ou actionniste. Quand, sur scène ou dans ses vidéos, il pousse les portes de l'enfer, il le fait sans s'assurer une issue de secours. Il est tout à la fois toro et torero, plus proche de Mishima que de Breton ou de Debord. Il ne sous-titre pas. De sorte que ce « Grand Père », qu'il vient de faire paraître, n'est pas un « roman », quoi qu'en dise son éditeur, ni davantage un « récit », malgré son prétexte. L'histoire de cet aïeul arménien, indifférent aux uniformes que le XXe siècle lui imposa (un temps Cosaque, un temps légionnaire, mais toujours un sabre à la main), est un trompe-l'oeil. A ceci près que sous l'apparence trompeuse se dissimule le plus déchirant des aveux. Et donc le plus vrai. Ce n'est pas tant, en effet, un héritier de Cendrars qui joue ici le grand air de l'épopée, mais une sorte de Léon Bloy qui chercherait sa voie du côté de Sade et des traités de pathologie. Le scabreux n'est pas une posture chez Costes. Sous le tumulte obscène, sanguinolent, n'importe quel lecteur attentif percevra l'extase du mystique. Jadis la chose était habituelle. Le débauché entrait à la Trappe, et le barbare tombait en extase au pied de la croix. Moins aujourd'hui. Sans doute parce que les mièvreries de l'autofiction ont pris le pas sur les grandes turpitudes. Aussi, pour impie qu'il paraisse, « Grand Père », si drôle, si décapant par ailleurs, annonce le retour des Proses illuminées où l'auteur fait le sacrifice de sa raison et de sa chair dans l'espoir d'une rédemption. Le plus curieux, quand on me connaît, est que j'y sois davantage sensible qu'aux Plaidoyers pour l'athéisme du pauvre Onfray. C'est qu'en art ne nous guide que l'émotion. Pas le discours. A bon entendeur, salut !
« Grand Père », de Jean-Louis Costes, Fayard, 324 pages, 18 euros.
« "Grand Père" annonce le retour des Proses illuminées où l'auteur fait le sacrifice de sa raison et de sa chair dans l'espoir d'une rédemption »
Article ON Y ETAIT lundi 13 mars 2006, p. 22
« Ça ne t'excite pas que je publie un bouquin chez Fayard ? » hurle Costes à sa poupée gonflable. Seul sur scène, l'auteur de « Grand Père » performait après sa rencontre en librairie vendredi après-midi. Il s'accompagne d'une bande-orchestre aux bruitages prénarratifs, d'un minisynthé et de divers accessoires. Se pointe en peignoir, finit à poil comme toujours. Le thème du soir tourne autour de l'amour, qui le laisse seul, triste et incapable de partager quelque plaisir avec une femme : « Parce que je suis un pédé secret », chante-t-il, d'une voix aussi tordante que touchante. L'assistance se révèle hétéroclite, du punk à crête qui bouscule la scène au rédac-chef de « Spirit », en passant par un DJ spécialiste du mix indien. Tandis que la carte de L'Heretic démarre à 50 centimes d'euro pour un sirop ; bon esprit !
La Mauvaise Réputation tient un stand des productions de l'artiste complet : vidéos, CD, bouquins, dont le premier, « Viva la merda ». L'excrément reste un élément qu'il continue volontiers à manier, comme le ciseau qui lui sert à mimer une coupe en règle de son sexe, qui va gicler le sang grâce à une poire dissimulée. Et ce, au milieu de représentations en carton, tels animaux familiers, paternel/Odin orné d'une guirlande électrique, qui lui servent d'interlocuteurs dans sa story tonique et fun, tant elle exorcise. Celui qui va bientôt passer chez Ardisson a un clin d'oeil savoureux : « Pour l'after, on va aller à la soirée gothique, pourquoi tu me veux pas ? J'ai mon costume de chauve-souris ! », lâche-t-il, un bébé en plastique sur le front, dans un état gore. Rapporter paraît bien peu, comparé à la bonne énergie hardcore qu'il transmet.
Patrick Scarzello
Jean-Louis Costes, vendredi dernier, à L'Heretic de Bordeaux.
Article PREMIER ROMAN ULTRA COSTIQUE, vendredi 10 mars 2006, p. 22
LITTÉRATURE. Outre la performance qu'il donnera le soir, Jean-Louis Costes vient à Bordeaux pour la sortie de « Grand Père », son premier roman au souffle épique
Que Costes, « roi de l'underground », soit un sacré auteur, on n'en a jamais douté. Et même sans avoir lu « Viva la merda », le dynamiteur se distinguait discographiquement. Des premières cassettes faites main dans les 80's, jusqu'aux CD si nombreux que la liste étourdirait, le performer s'est imposé au-delà du singulier. Capable d'écrire des opéras destroy d'une féroce sincérité, « NTM FN » par exemple, où sa façon de moquer les rappers demeure d'anthologie. La belle occurrence est son entrée en littérature, là où Raphaël Sorin, son éditeur, repérait dès les 70's les hautes plumes punks.
Tonique. De la couverture évocatrice, au fil stylistique tendu derrière l'apparent morcellement télégraphique, ses 323 pages ragaillardissent. Costes fait du super-Costes : viscéral et véridique au possible dans cette story explosée de son « Grand Père » (1). Il régale d'images et de trouvailles aussi fraîches que constellées d'horreurs; avec une langue inédite d'aujourd'hui. Il aurait pu ne raconter que l'histoire de Garnick l'Arménien, né en 1900, qui traverse révolution bolchévique, Europe, Nord-Afrique et Guyane. Cela aurait été un bon bouquin épique. Mais il va plus loin, se met en scène aux deux tiers, et renverse le feu roulant. Ceux qui évitent ses shows « porno-sociaux » de peur de se salir, mesureront-là sa vivacité, dada-célinienne peut-être, assûrement ultra-Costique !
(1) Editions Fayard, 18 euros.
Rencontre à 18 h à la Mauvaise Réputation (19, rue des Argentiers); performance à 21 h, à l'Heretic de Bordeaux, (6 et 8 euros)
- On vous connait depuis longtemps pour vos chansons et vos opéras. Moins pour vos textes…
Costes Jean-louis J’écris régulièrement depuis 1997. Des textes courts que je publiais sur mon site internet. Je croyais que personne ne les lirait. Mais ça a plu. D’autres sites et des revues littéraires indépendantes, comme Cancer, Hermaphrodite, Bordel… m’ont demandé d’écrire pour eux. En 2001, j’ai écrit un premier texte long, “Viva la merda”, qui ressemblait plus à un scénario de film qu’à un roman. Hermaphrodite l’a publié. En 2005, David Kersan m’a présenté à Raphaël Sorin qui m’a proposé d’écrire un roman pour Fayard : Grand Père.
- C’est étonnant qu’un artiste aussi underground que vous soit signé par une grand maison d’édition.
Costes Jean-Louis: Je suis le premier étonné. Depuis vingt ans, je suis habitué à m’auto-produire et n’ai jamais eu un contrat avec une grand maison de disques, ni même de manager pour les tournées de mes spectacles. Pour mes textes, il y a eu un concours de circonstances extraordinaire. David Kersan a eu assez de foi en ce que je fais pour convaincre un grand éditeur. Et Raphaël Sorin de Fayard a eu le courage et l’ouverture d’esprit de publier un auteur considéré, même par ses fans, comme ne faisant pas assez de concessions pour sortir de l’underground.
- C’est vrai que vous abordez souvent des thèmes sulfureux, avec un style cru et violent qui peut choquer. Avez vous dü vous censurer pour que ce livre soit publié ?
Costes Jean-Louis: J’ai écrit le livre à ma façon sans me brider. Je ne peux rien créer de bon si je me fixe des limites esthétiques ou morales. Je n’excelle que dans le chaos. Je ne nage bien que dans la tempête. L’éditeur n’a demandé aucune censure du roman. Il a simplement proposé des modifications ponctuelles du texte dans le but de l’améliorer.
- On peut donc s’attendre à du pur Costes, trash, violent, choquant à tout va…
Costes Jean-Louis: Le livre est très violent car c’est l’histoire d’un homme pris dans les grands massacres du 20ème siècle. La violence de mon style correspond à la violence de l’époque. Mais parfois, au milieu de tous ces crimes, surgit un moment de paix, d’amour, et même de mysticisme. Des miraculeux répits que j’exprime aussi. Il y a bien des fleurs qui poussent sur la merde…
- Vous avez souvent dit que les textes de vos chansons étaient largement improvisés, sans que vous sachiez à l’avance quel thème serait traité? Es-ce aussi le cas pour votre roman? Avez vous suivi un plan précis?
Costes Jean-Louis: Mon expérience de la chanson influe certainement sur mon écriture. Je ne sais pas à l’avance de quoi je vais parler. Mon seul plan est de me conditionner pour entrer dans un état proche de la transe, en m’isolant complètement, en ne mangeant et ne dormant presque plus. La solitude et la faiblesse ouvrent un porte secrète dans ma tête. Je plonge dans un tunnel mental. Une voix me parle et je n’ai plus qu’à transcrire ce qu’elle me raconte. J’écris à toute vitesse, sans relire. Que ça soit bon ou mauvais n’est pas important. L’essentiel est de laisser jaillir librement le flux mental. De ne surtout pas chercher à le canaliser. Je fixe sur le papier tous les mots qui me viennent, nuit et jour, jusqu’à ce que je tombe épuisé. Et quand je me réveille, je recommence. Au bout d’un moment (six semaines pour Grand Père) le flux se tarit, la voix se tait. Je n’ai plus rien à écrire et le livre est fini. Mais il s’agit d’un livre incommunicable, le charabia incomprehensible d’un sorcier. Mon travail consiste alors à élaguer et reconstruire ce délire pour le transformer en roman accessible à tous, avec une histoire et un style simple. Avec 1500 pages d’un flux hallucinant de mots, je fais un roman de 300 pages.
- Si vous n’avez pas de but précis quand vous écrivez le premier jet, quelle est votre intention quand vous reconstruisez le texte initial ?
Costes Jean-Louis: Je veux communiquer les émotions les plus fortes dans le style le plus concis et percutant possible. Que le lecteur plonge dans le roman comme dans un excellent film d’aventures physiques et mentales. Que lire soit vivre une aventure. Comme un spéléologue qui aménage la grotte secrète, je crée des escaliers et des passerelles, j’éclaire l’abîme mental pour en permettre la visite. Je suis le guide du voyage mental.
Costes on adore ou hais mais on ne reste pas indifférent,un génie débile et dérangeant
Un nom comme un mot de passe. « T'as déjà vu Costes ? » Oui, même une fois dans sa vie, on s'en souvient. Des cris, du sang, de la merde, du sperme, sur scène, vraiment. Depuis 1986 à Paris, des arrières salles de Belleville disparues au Point FMR, la semaine dernière. Aujourd'hui, Jean-Louis Costes a 52 ans, reste toujours aussi sec et fauché. Papa d'une fillette, il habite à Saint-Denis. Il a quarante disques au compteur, des opéras et des fans au Japon. Un habitué raconte : « Son public, au début, c'était les bas-fonds. Punks, skins, clodos, tous bourrés, balançant des cannettes et lui qui continue de chanter. »
Pourquoi en parler aujourd'hui ? Parce que, contre toute attente, Costes publie chez Fayard. Grand-père, une fresque sur un papi arménien, Cosaque sabrant les moujiks dans la steppe, légionnaire décimant les Berbères, prisonnier à Cayenne finissant dans une HLM de banlieue à taper sur sa femme. On n'a rien lu de pareil depuis des lustres, avec une langue charriant l'argot, l'histoire, la misère. Oui, Céline, on y pense forcément et aussi difficile soit la comparaison, le livre, condensé de « 1 000 pages écrites à voix haute dans ma cave », soutient le choc : « Mamie bossait chienne femme de ménage chez les bourges du premier étage. » Les influences ? Expressionnisme allemand, rap et livres d'explorateurs.
L'hurluberlu vient d'« une famille coercitive où un père colonel nous apprenait à mâcher correctement ». Plus tard, lycéen en blazer, il ne décroche pas un mot de l'année et dessine des suicidés. Il se sent hors jeu : « Quand un mec buvait un Coca, j'avais l'impression d'assister à une orgie. » Au fil des ans, il obtient tout de même son diplôme d'architecte et trouve l'énergie de traverser le Soudan à pied. A la ville, il parle avec douceur autant qu'il hurle ailleurs. A chaque fois, on retrouve le mal, « seul sujet véritable de l'art et force que nos générations ont tue ». Mais aussi une lignée, celle des oubliés sur qui la société marche : « Les vieux, les immigrés, les clochards, je me sens proche de ceux qui se sont chiés dessus et dont on s'éloigne dans le métro. » Les chercheurs ont raison, les bas-fonds regorgent d'or.
Arnaud Sagnard
Jean-Louis Costes, Grand-père, Fayard, 324 p., 18 e.
John B. Root, réalisateur de films X « Je ne peux le regarder ou l'écouter qu'à dose homéopathique, sa rage me terrifie. C'est pourtant un cri salutaire. Il est parfois pris au premier degré et ça se retourne contre lui, il a alors des ennuis avec la justice. Pourtant, il est l'exact inverse d'un raciste, il est d'une profonde délicatesse. » Virginie Despentes, écrivain « Dans les années 1980, ses cassettes étaient tellement à contre-courant, inspirées. Sur scène, je le voyais entouré de filles qui n'étaient pas des “impostrices” de l'outrage. Je l'ai fait tourner sur Baise-moi, il était parfait. Ses textes m'impressionnent encore plus. »
COSTES: LE BORBORITE CONVULTIONNISTE
Arrêtons de tourner autour du pot : Jean-Louis Costes est un des plus grands écrivains catholiques de France. Car un écrivain catholique aujourd'hui, c'est un enfant septénaire dont l'âme entièrement livrée aux répugnances sociales pressent violemment la voile de l'Apocalypse lui tarauder l'entendement. Au-delà des classiques adversaires de Costes : l'antibiblique enragée UEJF, les monceaux d'humanitaristes progressistes, les fumeux rebelles de gauche collés par la crasse à leurs sqatts fongueux... en ligne de fuite de cette troublante perspective quadrillée d'individus haineux et profondément racistes, se dresse un seul véritable Ennemi, quintessence et annonciateur de tous les autres : le Concile de Nicée I. C'est en l'an 325 que Costes et tous les véritables catholiques de l'époque furent illuminés de l'intérieur, et se réfugièrent instantanément dans l'Invisible pour échapper à la lourdeur drapée de Saint Paul. C'est l'amour qui fut - et reste à jamais - leur moteur. La preuve de ceci se trouve à chaque page de la catéchèse costienne dénommée Viva la merda. Gueuler "Viva la merda!", c'est dire merde aux anarchistes. (...) Si Costes se couvre le visage de boue et d'excréments sur scène, c'est parce qu'il sait que l'homme a été créé à l'image divine, et qu'il convient de déguiser le visage de Dieu. Sa résolution inébranlable est de fonder une Eglise véritable, mystique et invisible, corporelle et vibratile, dangereuse et violente, sexuelle et iconique, marine et métachristique, merdeuse et virginale, une Eglise qui saurait nous rappeler qu'à l'instar de nos ancêtres paysans, nous pouvons nous aussi redevenir des nègres.
Avec son nouveau roman, Jean-Louis Costes fait une « entrée fracassante » dans le monde des lettres. C’est en tous cas, ce qu’annonce son éditeur, Fayard. Vraie figure de l’underground, Jean-Louis Costes n’en est pas pour autant à son coup d’essai. Auteur d’un premier roman, dans une maison d’édition assez originale, Hermaphrodite, intitulé Viva la merda, Jean-Louis Costes signe cette fois-ci un ovni dans le paysage littéraire, un étrange objet littéraire qui réveille un monde qui semblait jusqu’ici, s’être endormi. Un vrai style (entre Céline et Bukowski) et une dimension d'écrivain. Son passé d'artiste est déjà long, et sa rage d’écrire confirmée.
Grand-père
est un ouvrage qui
affiche la mention « roman », mais inutile de dire que dès l’incipit, vous
annoncez la couleur : « Je m’appelle Jean-Louis Garnick Philippe Costes. Garnick,
parce que mon grand-père s’appelait Garnick Sarkissian. »[2]
Alors, évidemment, première question : pourquoi « roman » ? Seconde question :
quelle est la part de fiction, et quelle est la part autobiographique dans votre
nouvel opus ?
J’ai vraiment eu un grand-père qui s’appelait Garnick. C’était un immigré
arménien qui avait subi les pogroms, puis été cosaque, légionnaire, bagnard et
collabo. Mais je n’ai aucun détails sur sa vie, car, quand j’étais enfant, il
n’était plus qu’un vieillard qui se bourrait devant la télé et ne parlait
jamais. Alors j’ai fermé les yeux et j’ai deviné toutes ses aventures à partir
de ces 4 mots : cosaque, légionnaire, bagnard et collabo.
Ces 4 mots magiques faisaient d’emblée de lui un personnage romanesque. Et le
mystère qui l’entourait a stimulé mon imagination
Ce qui frappe d’emblée dans votre nouveau roman, c’est la gifle que nous inflige
le style. Il faut bien le dire, - qui pourrait le nier ? - vous réinventez la
langue française, vous la secouer, vous inventer une nouvelle musique. A croire
que vous vous êtes inspiré du génie de Céline pour bâtir un style qui vous est
propre, et qui secoue les tripes. On sait, puisqu’on parle de lui, que
Louis-Ferdinand Céline mettait le style au premier plan, accusant les histoires
de n’être que secondaires : « des histoires, il y en a plein les commissariat,
plein les journaux, plein les hospices. Mais un style vous n’en trouvez qu’un ou
deux par génération », disait-il. Votre avis sur la question ?
Il est vrai que les histoires humaines sont toujours les mêmes. C’est la manière
de les raconter qui est essentielle. Je plonge dans un livre, absorbé par les
mots, les images et les émotions qu’ils font surgir. Comme en musique,
l’interprétation prime sur le motif.
Mon style ne vient pas
d’un travail de l’écriture mais de ma manière particulière de créer : Je
m’enferme dans une cave noire et n’en ressort qu’une fois le roman terminé. Je
voyage à l’intérieur de moi-même jusqu’à ce que j’ai trouvé ce que je cherchais,
et le ramène à la lumière. J’écris nuit et jour, sans aucun contrôle sur
l’histoire ou le style. Je ne sais pas de quoi je vais parler. Je ne me censure
jamais. Je ne corrige rien. Je ne relis pas. C’est un état de transe. Je me
balance, je parle à voix haute, et je note fidèlement tout ce que cette voix me
dicte. Ce que vous appelez mon style et la manière de s’exprimer de la voix
intérieure.
Quand elle s’est tue, je
me suis réveillé avec 1000 pages, un flot continu de mots. De ces mille pages
j’ai extrait un roman : Grand Père.
C’est un livre grandiose
qui me dépasse. Je peux dire que je l’admire car je n’en suis pas l’auteur. Je
suis juste le médium.
Votre style, fluide, direct, sans concession, est tout au service d’une
dénonciation des barbaries de la guerre, des révolutions, des génocides, des
cruautés des sociétés civilisées. C’est l’énergie du désespoir. Cette petite
musique assourdissante, c’est l’énergie du chaos. Est-ce à dire que votre vision
du monde est des plus pessimistes ?
Je n’exprime aucune opinion personnelle. Je ne dénonce rien. J’écris, c’est
tout. C’est la voix intérieure qui décrit ces batailles, ces massacres, ces
viols. Je ne suis pas sûr qu’elle dénonce. Car la littérature se fout de
l’idéologie et de la morale. C’est une pratique magique. C’est une aventure
intérieure qui éclaire avec une effarante puissance tous les recoins sales et
cachés de la réalité. C’est pour ca que ça choque et émeut : On lit Grand
Père et on se retrouve face aux génocides niés et aux ancêtres oubliés. Face
à la beauté cachée sous le crime.
Le vingtième siècle a été le siècle des idéologies des massacres de masse, de
l’industrialisation de la mort, il suffit de lire votre roman pour s’en
convaincre. Le style, jamais bridé, jamais sec, chante, si je puis dire, les
pogroms, les viols, les meurtres à grande échelle, l’essence de la grande folie
humaine qui a sévit durant ce dernier siècle. Mais derrière tous ces crimes à
grande échelle, derrière votre grand-père qui est pris, parfois bien malgré lui,
dans ce tourbillon de crimes et de barbarie à grande échelle, pointe des moments
d’accalmie, quelque fois même, l’espoir d’un peu d’amour entre les hommes. Cela
voudrait-il dire que vous croyez encore en l’espèce humaine après tout
ça ?
Je ne crois pas à l’espèce humaine supérieure à l’animal. Mais j’ai pitié de
l’homme, pauvre sous-singe perdu. L’homme, handicapé malfaisant, bardé de ses
prothèses technologiques, est émouvant comme un enfant maladroit. Comme à
l’enfant qui tue innocemment, je pardonne les crimes commis sans calcul. Je
pardonne la colère et le rut incontrôlés de celui qui souffre et tue, plus que
le froid calcul de celui qui s’enrichit des crimes et supplices des autres. Je
n’aime pas les hommes mais leur dignité et leur beauté, même dans le plus rend
malheur, me touche et m’inspire.
Ce grand-père que vous décrivez avec beaucoup de tendresse et d’amour, après
avoir été cosaque, puis légionnaire, enfin bagnard, se retrouve collabo durant
la Seconde Guerre mondiale. On a l’impression que son destin est tout tracé.
Qu’il est prisonnier même de ce chemin qui l’emporte, incapable de se dégager
d’une destinée ivre et cruelle qui l’enferme dans la violence et la barbarie.
J’imagine que ce n’est pas un argument pour vous assez suffisant pour disculper
les hommes, comme votre grand-père, de ce qu’ils ont commis, mais pensez-vous
par là, que certains hommes ont été, comme cela, prisonniers de la grande hache
de l’Histoire, et que ce destin « maudit », assez affligeant, il faut le dire,
doit être dénoncé par l’art et le roman, pour qu’il ne puisse plus se répéter ?
En bref, croyez-vous à cette phrase de Louis-Ferdinand Céline : « L’histoire ne
repasse pas les plats » ?
Un homme né en 1900, qui a eu toute sa famille massacré a 15 ans et s’est
retrouvé plongé malgré lui dans tous les pogroms et guerres du 20ème
siècle, ne peut être considéré comme coupable. L’Histoire féroce l’a emporté en
1915 et l’a lâché en 1945, estropié physiquement et mentalement. Trente ans de
folie collective ne peuvent être imputés aux malheureux pris dans ce tourbillon.
Ils ont tués des millions d’hommes pour survivre, et ont payé leurs crimes de la
manière la plus atroce : après trente années de guerres, trente années de bagne,
bourrés devant la télé, à crever à petit feu dans le mépris général et le
dénuement le plus total. L’art n’est pas là pour dénoncer inutilement la roue
aveugle de l’Histoire, mais simplement pour magnifier notre misère. Lire un beau
livre d’aventures tragiques est un grand plaisir.
Le style. Revenons une dernière fois au style. Vous inventez une musique. Pas
des plus lisses, ni des plus consensuelles. Vous ne faîtes décidément aucun
cadeau au lecteur. Hachée, décalée, déstructurée, la langue est réinventée pour
chanter la barbarie, les crimes, la violence, le sexe, l’inhumain.
Quelques emprunts à Céline (désormais entrés dans le style de la seconde moitié
du vingtième), l’absence de négation dans les phrases par exemple, une
distorsion de la grammaire, et un langage des plus cru, maniés avec un plaisir
féroce, non de choquer le « bourgeois » -qui semble vous indifférer violemment
-, de marquer votre lecteur, de graver dans le marbre cette terrible randonnée
meurtrière et barbare. Sans vouloir sombrer dans cette tendance facile aux
étiquettes, on peut parler à votre propos d’écrivain « trash ». Mais plus
encore, vous êtes habitué aux performances crues et violentes sur scène, qui ne
respectent aucun tabou : ce roman, est-ce pour vous le prolongement de cette
logique, ou au contraire, la signifiance même d’un style si dérangé, d’une
musique aussi étourdissante, est-elle d’un tout autre ordre ?
J’ai fait beaucoup de musique, et improvisé des milliers de textes sur cette
musique. Cela a certainement influencé mon écriture. On sent un rythme
sous-jacent quand on me lit qui pulse, comme un battement de cœur qui commande
aux émotions. Ce n’est pas la rime, loi rigide de la poésie, ni un remake du
langage parlé. Ce que vous appelez mon style, c’est juste la vibration de la
pensée qui parle. Sans détours, sans égards, sans bonnes manières. Je pense ça,
donc j’écris ça. Et tant pis si ça plait pas. Et en plus ça plait. Ca fait jouir
de pouvoir lire dans les tripes de la tête d’un écrivain.
Au milieu de tout ce désordre, il y a un enfant : vous ! Il observe, il pose des
questions, il écoute. Il s’interroge : « Bon-Papa était-il nazi ? Bof, je crois
pas… C’est pas parce qu’il a fait « Heil Hitler ! » à une tourelle de
Panzer qu’il a la carte du parti ! Il en avait rien à foutre des idéologies. La
seule politique de valable pour lui, c’était de tuer pour survivre. »[3]
N’est-ce pas finalement une appréhension du monde la plus désenchantée ? Tuer
pour survivre, suivre les idéologies les plus meurtrières pour sauver sa peau…
peut-on avoir encore un peu d’espoir en l’homme, après ça ?
Au contraire, ca me rassure de croire qu’il y a des hommes qui sont restés
indifférents aux idéologies, même aux plus follement exaltés moments du 20ème
siècle. Des gens qui ont su garder le bon vieux bon sens du singe. L’instinct de
conservation me paraît bien plus sain que tous les beaux discours et bonnes
intentions. Sauver sa peau, le temps de se reproduire, et crever. Voilà un
programme qui me plait.
D’après vous, quel avenir cet enfant peut-il avoir après avoir entendu raconter
tout ça ? Vous écrivez : « Le bébé a l’air innocent comme ça, mais au fond il
est contaminé. »[4]
Peut-il ensuite avoir une vie normale ? Pensez-vous que le mal ne se transmet
pas ? Je vous cite encore : « J’ai craché sur mon grand-père immigré. J’ai eu
honte de lui et nié descendre de ce clodo alcoolo. Non ! Je ne suis pas le
petit-fils du vieux qui pue la pisse. Non ! Je ne mourrai pas dans ma merde
comme lui. Non, non et non ! Je ne suis pas l’enfant du pogrom qui plombe. Oui !
Je m’échapperai et j’oublierai tout ce passé pourri. »[5]
La question que j’ai envie de vous poser, c’est : est-ce seulement possible ?
Derrière le déni de la filiation, ne peut-on pas finalement lire une
aliénation, ne serait-ce que par l’amour qu’il voue à ses parents ? Car
après tout, cet enfant, horrifié par une telle Histoire, tant de massacres et de
malheurs, craignant d’être contaminé par tant de saloperies salement faîtes,
comme on pourrait être contaminé par la peste ou le choléra, derrière cette
angoisse légitime, n’y a-t-il pas un enfant qui souffre pour son grand-père et
qui lui hurle son amour ?
Je me sais lié à mes ancêtres par le Mal. Le Mal qui les a fait s’entretuer,
qu’ils m’ont transmis, et qui me fait m’auto-détruire, puisque j’ai vécu à une
époque incapable d’affronter un ennemi extérieur. Je suis né maudit, pollué par
le péché originel et seule la mort me délivrera…
A cet instant vous me
révélez que je suis aussi lié à mes ancêtres par l’Amour. Ca ne m’était pas
apparu en lisant le livre, et je vous remercie de m’en faire prendre conscience.
Sous tous les crimes, maintenant je vois clairement l’Amour frustré que vous me
montrez. Il pleure silencieusement, ne fait pas de reproches et attend
éternellement en vain. Donc, après ce roman de vie, c’est à dire de massacres,
c’est à dire de mort, je vais écrire un roman d’Amour, c’est à dire un roman sur
l’Eternité, un roman dans le Ciel.
Je termine : parlons de vous ! Vous avez commencé dans l’underground, par la
création d’opéras socio-pornos. En parallèle, vous écriviez de courts textes mis
en ligne sur votre site Internet, ce qui a séduit des revues comme Cancer,
Bordel, ou des éditeurs comme Hermaphrodite. Aujourd’hui vous venez de faire
votre entrée par la grande porte de Fayard. Cette entrée, c’est en définitive la
sortie de l’underground, et de ce que vous avez toujours été jusqu’ici, non ? Ne
pensez-vous pas que pour continuer dans le monde actuel des lettres françaises,
il vous faudra tempérer votre style, aligner votre fougue sur le « politiquement
correct » qui semble de rigueur parmi tous les « gensdézartzédeslettres » dont
vous ferez peut-être bientôt partie, ou au contraire, pensez-vous que
l’alternative à tant de mauvais romans qui pullulent et anesthésient la
production française du moment, c’est ce style de romans ? Difficile question,
j’imagine.
Je m’enfoncerai toujours plus en moi-même, sans répit, jusqu’à ce que je trouve
la sortie. Mes livres seront les scories sorties de ma mine.
SC - Peux-tu nous parler de tes projets en ce moment?
JLC -
Je tourne avec l'actrice Lisou
Prout dans un nouvel opéra porno social. Nous tournons jusqu'en janvier en
Europe, puis février-mars aux USA et avril au Canada. Je viens de proposer
nouveau roman à Fayard et attends leur réponse.
SC
- Peux-tu nous parler un peu de ton nouveau spectacle?
JLC -
Il y a à peine une histoire
tant elle est banale : un garçon et une fille se rencontrent, flirt, sexe,
enfant, embrouilles de la vie, la trame est banale mais c'est notre manière de
jouer et la musique qui font que ça rend très spécial. Le seul truc pas
inattendu dans l'histoire, c'est qu'a la fin Dieu les envoit en enfer.
SC
- Sens-tu une évolution dans ton travail quand tu regardes tout ce que tu as
fait ?
JLC -
Je ne sais pas si j'évolue.
Probablement oui, comme le vieux lierre, il grimpe toujours de la même manière
mais toujours plus haut.
SC
- Tu as pas mal été sur le devant de la scène pour la sortie de "Grand-Père", tu
as été médiatisé comme jamais. Quel avis as-tu à l'égard des médias ?
JLC -
Les médias ne sont pas a
l'origine de ma réputation. Ils ne font que suivre de l'extérieur un phénomène
qui s'est construit dans la scène indépendante. J’apprécie que les médias
parlent de moi, en bien ou en mal, car ça fait connaître mon oeuvre au-delà du
cercle restreint des passionnés d'art et musique.
SC
- Musique, vidéo, spectacles, y'a-t-il un domaine que tu favorises le plus ?
JLC -
La musique est à l'origine. Du
concert est sorti le spectacle. Du filmage du spectacle est sorti la production
de films de fictions. Les textes de chansons et scénarios de films m'ont mené à
la nouvelle, au roman et les attaques contre moi, au pamphlet ! Pour me
défendre.
SC
- Tes spectacles sont-ils bien reçus partout où tu vas ?
JLC -
Bien sur que non. Des fois je
me fais jeter au bout de 5 minutes. Le plus fréquent est un mélange
d'enthousiasme et de détestation. Le même soir, face au même spectacle, certains
adorent et d'autres détestent.